14 janvier 2015

Soeurs dans la mémoire longtemps

On ne l’entend pas si souvent, mais sororité sonne bien français aussi. Soeurs, une histoire de douleurs et de résistance qui se passe dans une chambre d’hôtel chic et « intelligent » à Ottawa, ma chère! Au début, c’est drôle. Le mini frigo déparle! La télé caméléon recrache toutes les langues de la terre, mais pas le French! Elle n’y arrive pas! Ce n’est pas très important au demeurant. Mais ça peut mettre en tabernacle même les esprits les plus éthiques, même la médiatrice professionnelle Bergeron, Franco-manitobaine d'origine, renommée Berguer par les robots de la chambre. Et ça vire à l'envers. Au sens propre comme au figuré. Une experte en sinistre d'origine libanaise viendra constater les dégâts! C’est qu’il faut surtout dire lumière. Il faut ici dedans dire lumière en anglais pour avoir de la lumière, métaphore de la langue pendue, du chant égorgé de jadis, du nom déflaboxé, métaphore surtout de la longue lignée des humiliations en miettes campées ici et là en tricot serré pour les enfants de 50 ans de Saint-Boniface à Beyrouth. Vouloir dire qu'on n’a plus rien à faire icitte! Dans ce monde-là! J'ignore si Wajdi Mouawad le magicien, comme il aime parfois le faire, était tapi dans le noir en observant les spectateurs pour la première montréalaise de sa nouvelle pièce. Nous aura-t-il vus, profondément silencieux, traverser la fable comme l’on traverse l’inconscient et ses bisons à contre-vent, à dos de femme magnifique jouant l'actrice et son double et pour une fois, pas tout à fait dans le registre de la stricte gémellité? Un cycle domestique issu de Seuls, dit-on, pas nécessairement délicat, mais si fin, source de l'intimité de la parole et des gestes de vie qui comptent où l’insupportable colère rentrée s’accorde pendant deux jours une mémorable et cathartique tempête de neige. Pleins feux sur Annick Bergeron. Magistrale!

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