10 mai 2016

L'esprit des lieux

« Il faudrait t'habituer à regarder les mots comme des yeux qui te regardent ».
— Edmond Jabès, Le soupçon du désert, Le livre des ressemblances, Il, Gallimard, 1978, p.15.


À l'âge de 12 ans, j'ai planté cinq sapins derrière la maison. Deux à deux pour faire un quatuor, avec un solitaire à l'avant pointé vers l'Ouest pour ouvrir la marche. En 1978, j'en ai bûché un avant Noël pour faire un arbre de lumière. Je l'ai amené comme un petit orignal sur le toit de mon char à Granby où je demeurais à l'époque. Il y a quatre ou cinq ans, un sérieux grignotage est apparu dans le bas de l'un. Je l'ai entouré d´une muraille de broche, mais il était pris de bébittes sans doute, en tout cas, le pic a picossé en masse. Mon beau sapin a fini par perdre la tête. Là, mes bébés qui restent debout sont des géants de cinquante ans. Parfois, j'appuie une main contre l'un d'eux. Comme ça. Ça fait un peu Indien. C'est humblement l'esprit des lieux. Comme un totem vivant.

Photo Jacques Desmarais, Béthanie, 9 mai 2016.

2 commentaires:

  1. Pauvre Rutboeuf
    Chanté par Desjardin
    Indisponible ce matin
    Malgré sa mise à disposition
    Dans le seul Train de Nuit où
    la prose toujours vivante
    Comme celle sur les quatre sapins
    Pour le quidam que je suis
    ça ne s’invente pas
    c’est magie
    des mots y sont pour
    celui qui y écrit
    comme une bouchée
    donnée à l’agonisant
    elle le sauve tous les instants

    voici présent
    choisi ici pour le poète
    vous êtes
    n’en retenez

    https://youtu.be/ZSSe-DFYBsY

    que reconnaissance
    et petit bonheur à retrouver
    au long des jours
    qualité, sensibilité toute
    particulière d’être au monde

    Anneaux Nîmes

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