17 décembre 2006

Il se fait tard





Marcher très tard dans le bois pour chercher mon sauvageon,
l'exiler en ville,
le décorer

pour que ça sente bon
pour les étoiles dans les yeux des enfants

Pas pour l'envoyer à la Cour de France
Pas pour envoyer paître les bêtes
dans les marais de La Marque

Desmarais, Desmarêves
tu débarques là!

Marcher dans le bois
tourner en rond
frapper à la porte des sauvageons

Trouver mon compagnon
le couper à la hache
comme le ferait un castor

Il se fait tard...
c'est gris noir
mais celui-ci est trop petit,
l'autre trop gros,
pas assez de plumes
bien trop beau!
Je tourne en rond!
Celui-là est mieux, me semble,
mais j'étais où déjà?

Comment y faisait mon père pour se décider?

J'ai au moins un millier de sapins verts sur ma terre
qu'on appelle aussi chiendent des forêts

Les sauvageons sont lettes pour la ville, hein?

Couper à la hache le roi des forêts,
c'est fait, l'offrande...
Je le traîne par le collet entre chien et loup,
je lui dis merci de mourir pour moi,
je vous en prie, je ne suis pas un bon chasseur

Il me gomme les doigts ce baumier
translucide unique au monde, il pleure
Ils ne l'ont pas à Fretin menu clin d'oeil
et nous, nous n'avons plus de manteau blanc
Au village, ils ont fermé l'école
vendu l'église, il se fait tard
reste quasiment plus de bleu





Qui est-ce qui lâche un wak
dans le bois à cinq heure du soir,
un 16 décembre 2006,
parmi les saxos disco des canards dézippés dans le ciel de bronze et de cendre
et pas une graine de neige bouillante sur le sol?

Une dinde sauvage qui fait des farces?

Vu des ossements de chevreuil éparpillés
sous les pruches surréalistes
et parmi les souches bouleversées des épinettes

L'ombre m'éclaire
je connais mon chemin,
les roches, les buttes, les fossés, les craquelins, les marécages, les clôtures

Mon instinct de poche

Mon oeuf est tombé près de la grenouillère
les vieux érables me reconnaissent

Marcher trad. dans le bois
Pour trouver mon sauvageon

Pas pour l'envoyer à la Cour de France
Pas pour envoyer paître les Baillis mouchards
dans les marais de Béthanie

Si j'étais Ambrose La Pétrole
je m'embraserais pour Charles Darwin

Desmarais, Desmarêves
tu débarques


Marcher très tard dans le bois
Tourner en rond
pas une graine de neige
Les canards au-dessus de moi
ils s'en vont ou bien s'en reviennent?


Sauvageon accoté dans le coin du salon, exilé comme moi en attendant les lumières et les petits glaçons.

5 commentaires:

Nina louVe a dit...

Salut Jack!!
Ta poésie "Rivebelle" aura voyagé à Cuba. J'ai tenté un écho, une poésie qui lui ferait honneur, un genre de sourire en retour... On verra si je ne charcute pas trop à l'étape du peaufinage ce qu'il en restera.

Jack a dit...

Nina,ne coupe pas trop de branches, je lirai entre les lignes. D'abord qu'il y a ce sourire et un brin de turcoise de Cuba.

Nina louVe a dit...

Le boucher est passé. Résultat ? Il ne reste pas grand chose. Que l'os et un peu de moelle. Sous son coutelat cenceur, il a laissé des bribes et de larges marges ouvertes. D'Zolée.

Jack a dit...

Il a peut-être laissé une porte ouverte sur l'horizon pour plus tard.

Nina louVe a dit...

Tiens. Je l'ai fini. Je le blogue à l'instant.

(sourire) C'est mon cadeau d'anniversaire. Nina est née la veille de la veille !!