23 février 2018

Totalement vôtre?

C'est vendredi soir
Je m'ennuie encore
des Décrocheurs d'étoiles
J'aurais voulu parler tout bonnement
du Zimbabwe ou de l'aventurine trouvée là-bas, 
ciselée en bijoux fous pour une personne chère
avec ses inclusions de fuchsite,
ou bien encore citer sans ponctuation jusqu'à plus soif
Le festin au crépuscule
son chakra du coeur parmi les billes
du troisième œil...
Hélas, ma feuille de papier brouillon
est outrageusement raturée
de tous bords tous côtés
Il me faut du sable, ai-je noté
pour contenir les eaux de mars,
des trappes à souris pour celle
qui en mon absence vient squatter
le tiroir à couteaux
« L'enfant n'est pas un vase que l'on remplit mais 
un feu que l'on allume », dit dare-dare Rabelais
Et je recalcule 
pour la énième fois
sur le recto
le brut et le clair
est-ce que je vais arriver?
et au verso,
comme il s'agit d'une page rescapée
de mon ancienne vie gargantuesque
(chut! c'est une blague à tabac),
il y a ces articles d'appel d'offres
sur les frais de subsistance
et autres frais directs,
la Caisse de dépôt est forte en la matière
mais, que vaut à ce jour ma maison sur terre battue?
Enfin, je dirais que l'encre bleu pâle, si pâlotte...
bref, c'est à peine lisible, c'est du chinois
c'est surtout pêle-mêle
comment tirer profit
d'une perspective radicale?
« Les intérêts sont dans le langage »,
énonce le philosophe à pleins tonneaux
Ah! Tiens donc! Le museau de la lune
chiale encore, c'est vendredi soir
et je pense
à Garneau
Être puissant aujourd'hui,
c'est profiter de la conjoncture
peu importe la température
oui, mais s'il mouille des cordes
sur les poètes sur L'homme de pluie?
La famille Plouffe, on s'en contrebalance
On se fout du programme,
clame le Président
de la France,
« ce qui compte, c'est la vision,
le projet. »
La classe moyenne? Libre à elle
Libre à elle n'est pas un pays,
je le rappelle
Or, je ne te donne plus d'ordres,
non, non, non
je te laisse la liberté capitale
de deviner ce qui me convient, là,
c'est cool, c'est zen, c'est psychiatrique,
disent les pervers polysaccarides
En réalité, ne pas perdre le contrôle
voyons donc!
ce n'est pas si complexe,
puisqu'il n'y a sur la boule
qu'un seul véritable attribut
naturel, universel, ad vitam taratatam
le tout nouveau temps présent,
oublie ton ego, il est mondialisé
ne reste plus qu'un seul sujet
— je me noie —
qu'un seul peuple
en vitrine biseautée
du grand théâtre
c'est ta bonne étoile
effarouchée, je sais,
mais remplie d'espoir
boom boom boom
c'est de cela qu'est venu
tintinnabuler en Inde
notre Tintin postnationaliste
« Panorama terrible de l'Occident »
dira en conclusion l'intervieweuse.
Qui lancera par la tête
le premier paquet de grenats
habituellement d'un beau rouge sombre?

Cela n'a pas d'allure!

Totalement vôtre.

Radio philosophes en onde

L'émission littéraire quotidienne sur Ici Première de Radio-Canada, en sa livraison du 22 février dernier, accueillait sur son plateau plusieurs philosophes. C'était excellent.

Frédéric Lenoir a bien résumé son Spinoza. J'ai notamment relevé un point important en lien avec mes propres, mes humbles, mais tenaces recherches en éthique  : la notion de joie chez Spinoza relance ma compréhension du " devenir soi ensemble " si cher à mon distingué professeur, feu Jean-François Malherbe.

Alain Deneault, infatigable, a parlé de son plus récent ouvrage sur les multinationales : Le totalitarisme pervers.

Enfin, Georges Leroux, Chantale Maillé et Xavier Brouillette, de même que l'étudiant Jean-Luc Brisson ont échangé sur le rôle de l'université dans la foulée de la récente démission de Lise Bissonnette du Conseil d'administration de l'Université du Québec, le réseau public des universités québécoises qui est sous financé en comparaison des institutions privées. Vraiment remarquable et pertinent, d'autant que cette démission à trouvé peu d'écho dans l'espace public.

Plus on est de fous, plus on lit

19 février 2018

Les maudits poètes!

J'ai l'esprit bien trop ébouriffé aujourd'hui pour donner un écho qui m'eut satisfait du passage cité par Richard Maltais Desjardins sur sa page FB https://www.facebook.com/richard.desjardins.58?hc_ref=ARTnMmLSrqOUTt7eMSFx5mtuPza1swh39It-FaKn4sGI53Eh8e13uvKy6bhj6ZOZcLY&fref=nf&pnref=story. Je ne connais pas Marcel Detienne (né en 1935, en Belgique), ni de Libera qui le cite, ni le contexte. J'aime néanmoins beaucoup ce passage vibrant. Je ne saisis pas tout, mais je ressens le propos qui à mon sens chatouille la notion idéaliste de la Vérité en laissant voler les ailes des poètes sur l'horizon de l'oubli et du désoubli, tel que l'explicite Richard en commentaire. C'est une vieille histoire. Ayant été mis à la porte de la République de Platon, les poètes ne se tiennent pas en réserve. Aussi, cela s'intercale dans mes lectures du moment, dont La liberté des modernes de Charles Taylor (PUF, 1997). Très rapidement, dans les premières pages, au chapitre intitulé Le langage et la nature humaine, Taylor entend prendre la mesure du tournant linguistique en philosophie au XXe siècle, ce qui chambarde notablement les considérations héritées des Grecs sur la pensée, le logos, la signification, la Vérité, l'herméneutique, l'apodictique... L'auteur procède à une analyse comparative entre, d'une part, les théories désignatives - la signification des mots est simplement posée Ici par leurs relations aux choses ou états de choses dans le monde -, et d'autre part, les théories expressives qui " [...] maintiennent une partie du mystère entourant le langage. " C'est ici que trouve grâce à mes yeux la formulation de Marcel Detienne sur la parole libre, assertorique des poètes et l'ouverture à la surprenance, la voyance... Sur fond de quelques traces sceptiques de pragmatisme (Dewey, Rorty) en regard de la vérité; traces ou filaments qui attendent en silence sur un banc de la pensée, alors que reste inoubliable pour moi cet énoncé de Georges Leroux partagé dans un atelier d'introduction sur le concept de méthode et d'écriture : En philosophie, disait-il, il nous faut travailler pour la vérité. Da capo.

Rapaillage au sujet des aèdes sur leur " trône de vérité " 
http://journals.openedition.org/pallas/337?lang=fr