28 juillet 2009

Sucette dans le cou


Les tourniquets de Train de nuit viennent de franchir le cap des
50 000 passagers. Cela s'est produit cet après-midi à 15 h 41. Je préciserais «50 000 grosso modo» puisqu'il y a eu dans le passé des pannes interrompant le compteur et parce qu'il y a mes propres visites que je n'ai jamais été en mesure d'exclure des statistiques.

L'Hexagone me tient : le distingué 50 000e est Français (plutôt que Française, c'est mon hypothèse), il est de Septèmes-les-Vallons dans La Bouche du Rhone, près de Marseille et il recherchait des informations sur une dénommée Eva de LaRue. Probablement nue. Or, il tomba, probablement de haut, sur un texte qui parle de « ma tante Éva de la rue Nicolet »!

C'est drôle comment les recherches sur la gogoune, poule aux cent têtes chercheuses, aboutissent parfois à des retailles de cadavres exquis.

Ma tante Éva a de quoi décevoir pareil visiteur. Mais c'est bien plus salé choux blancs encore lorsque les recherches, parmi les plus populaires sur Train de nuit, portent sur les énoncés tels que : «Elle se laisse caresser dans le train», ou «Belles filles de 20 ans », ou encore «Huiles essentielles pour la bandaison». Ce dernier point m'intéresserait peut-être.

Celle-là qui advient régulièrement m'attriste à chaque fois : «Poème sur le cancer». Je n'ai jamais écrit de poème sur le cancer. Mais j'ai probablement cité un passage de la revue Steak Haché qui grosso modo disait que la poésie est...

On n'y peut rien, c'est la liberté emmêlée à la libido. Et moi, ici, j'écris librement.

Pendant des semaines, au début, il y avait à peine cinq visites par jour. Je n'en écrivais pas moins avec autant d'ardeur et de passion que s'il en eut 500. À présent, ça tourne autour de 50 lecteurs en moyenne. C'est le fun.

Je sais bien, cent fois, cent fois, c'est pas beaucoup, avec des poèmes d'amour en rondins durcis qui débouleraient dans le crâne comme des cordées de bois saupoudré de bran de scie humide et des restes de peaux d'écorces perdues, fendues, affouillées, griffées par les bêtes, gravées au canif ou à la pierre mauve, jargon de galets de nuit dans la chair de l'écho, cascadeurs en canot, entailles de sexes de lynx je t'aime, je t'aime Perdrix au grand X, envolée, noircie à la main sur l'arbre qui cache la forêt des mots, ces échardes, ces yeux en forme de lune qui ne se couchent jamais, ces pensées, ces gorgées de Miller ou de Don Fante j'ai adoré à la planche Les anges n'ont rien dans les poches (tr notable de Léon Mercadet, Robert Laffont,1996), livre qui m'a été donné il y a deux siècles par Onassis après qu'il eut viré la ville à l'envers pour mettre la main sur un exemplaire —, je sais bien, dis-je, qu'on peut doper les stats à coups de scats en bas de la ceinture. Après tout, on fait aussi dans le jazz à Train de nuit!

Très bien. Je gage que ça va déjà gonfler un peu avec l'expression «Sucette dans le cou»!

Qui vivra cochon...non!
Qui vivra verra!

Rien à voir.

J'écris pour ne pas trop délirer.

«Ce que je cherche à dire, c'est qu'il existe un endroit, au-delà de la volonté et de l'angoisse, où les valeurs et les exigences de la vie quotidienne disparaissent. Où seule compte de survivre, moment après moment, pour éviter la dépression. »
Don Fante, Les anges n'ont rien dans les poches, p. 9.

Photo : jd.

Vaches pas maigres

Belles vaches venant à ma rencontre sur un petit chemin croche d'Angeville. Cornes naturelles en liberté. Pas de yeux rouges sur la photo, mais celle à l'avant plan, la crème, a les yeux clos! Est-ce Dieu possible?



















Photo : jd

26 juillet 2009

Donovan





hou!

à un moment donné
sur la route
du retour
dans la van
on a parlé
de Donovan

vlà que mon amie
Louise
aujourd'hui
cite sur son site
une vidéo qui n'est pas de lui
mais qui joue
sur une de ses tounes
récentes

je tripai jadis
sur quelques pièces
faisant tourner
à la radio étudiante
Hurly Gurdy
(en larges ondées de trémolos)
Melow Wellow
peut-être
Do you hear me now
ou encore
Wear your love like heaven
Jenifer Juniper
sûrement

au grenier vibrato
des 45 & 33 tours
j'ai un disque double vinyle
qui date de cette époque
assez hip & fleurie & guerrière



beaucoup de balades hallucinogènes
sur ces plages!

on trouve par ailleurs ce vieil extrait le fun avec Bob
tiré de Don't look back



en 2008
ce fils de Glasgow
lançait une bio + DVD récapitulatif
avec des images
de cerf-volant
un mot
qui va bien
avec Donovan

j'aime bien aussi
j'aime beaucoup en fait
Colours
en duo
avec la belle
Joan Baez

moi qui n'ai pas joué
depuis des lunes
j'ai risqué un petit segment
here je sévis

tourlou
jack




___________________

Colours

Yellow is the colour of my true love's hair
In the mornin' when we rise,
In the mornin' when we rise,
That's the time, that's the time,
I love the best.
Blue's the colour of the sky
In the mornin' when we rise,
In the mornin' when we rise.
in the mornin' when we rise.
That's the time, that's the time
I love the best.
Green's the colour of the sparklin' corn
In the mornin' when we rise,
In the mornin' when we rise.
in the mornin' when we rise.
That's the time, that's the time
I love the best.
Mellow is the feeling that I get
when I see her, mm hmm,
when I see her, uh huh.
That's the time, that's the time
I love the best.
Freedom is a word I rarely use
Without thinkin', mm hmm,
Without thinkin', mm hmm,
Of the time, of the time
When I've been loved.

24 juillet 2009

Paulilles, chroniques de la mémoire et de la nature



















Photo : site de l'Accent catalan



Pour sortir de St-Cyprien, je sais qu'il a fallu emprunter la rue Paul-Éluard. Mais après... À mon corps défendant, même si je ne voulais rien perdre de la route que je ne reverrai peut-être jamais, je me suis mis à cogner des clous pendant que le soleil cuisait franc et sec sur la carlingue de la Citroën blanche.

Si bien que je n'ai qu'un souvenir embrouillé de dormeur coupable qu'on « transportait » un peu au-delà de Port-Vendres, vers Bayuls- sur-Mer, guère plus de 30 kilomètres, mais qui m'ont semblé le double entre les craques de mon endormitoire.

C'est aux Paulilles que nous nous rendions, ancien site de la dynamiterie d'Alfred Nobel, inventeur de la chose qui fit exploser sa fortune et permit qu'il se potstériorise avec les prix si prestigieux qui portent son nom.


Ce lieu patrimonial (classé) est au croisement de la nature, soit une grande aire luxuriante de pins maritimes, de chênes lièges, de magnolias, de cyprès, de bougainvilliers, de tilleuls et d'oliviers, peinturlurée de coucous, de fauvettes, de merles bleus, protégée le long du littoral et qui mène à la baie où nous nous sommes baignés, et puis de l'histoire récente à la manière d'un petit musée pédagogique qui raconte la vie ouvrière ponctuée d'accidents mortels sur ce site industriel qui fonctionna près de 130 ans, jusque dans les années 1980, sous la forme d'un véritable village.



Un coucou. C'est de même que je l'ai appelé!


En cliquant , on distingue vers le cap les vignes cultivées en terrasse que l'on voit défiler ainsi tout le long jusqu'en Espagne.
Photos : jd
.



Nytroglycérine sur la plage

Flore du Cap Bear

Mystery Train, l'éphémère

Playing For Change | Peace Through Music

23 juillet 2009

Les Poèmes cannibales prennent l'air






















Foix
vue du Château (Photo : jd)


Déjà plus tôt, le collègue, voisin & ami Réjean Bertrand m'avait envoyé une photo où l'on voit un exemplaire des Poèmes cannibales appuyé contre un rocher bleu gris « sauvage » du Bic, là où se trouve son chalet familial. Surprenant comme effet. De toute beauté.

Voici que Gaétan Blais a eu la même idée. Il m'a fait l'honneur d'emporter mes poèmes dans ses sacoches de vélo et de les faire voyager lors de son grand périple dans les maritimes du printemps dernier en compagnie de Richard Desjardins!

Par temps de pluie sous la tente, il semble que mes humbles récits furent de quelque utilité.

À mon retour d'Europe, Gaétan m'a en effet envoyé ce clin d'oeil venu de Ste-Barbe dans la Matapédia que je me permets de lui piquer + un échange avec Hélène.



Blogger helenablue a dit...

Et ces poésies, dis-m'en plus ?

3 juillet 2009



Photo : Gaétan Blais
Blogger gaétan a dit...

alcool, ailleurs, éloignement, route,saisons, musique, politique... poèmes RÉCITés.... sais pas comment dire. Pas lu beaucoup de poésie dans ma vie. Je m'initie. J'ai surtout apprécié ces lectures certains soirs où la tente était trop grande et une trop longue journée de congé à Rocky Harbour (Terre-Neuve) où il pleuvait à boire debout et que j'étais confiné à ma tente à lire et à dormir (...).

3 juillet 2009


Par ailleurs, c'est à Foix, en France, que j'ai rencontré Max Biro qui publie également aux Éditions de la Brochure. (Je reviendrai spécifiquement sur cet oiseau des plus rares et des plus comiques).


Max Biro (photo jd)

Au lendemain de notre rencontre, après avoir jeté un coup d'œil à mon recueil, Max a griffonné un mot qu'il remit à notre éditeur. Ce dernier vient de publier cette note sur le blogue de La Brochure. Tout cela m'a fait un grand petit velours.

Toujours à Foix, toute la bande participait au festival des Résistances (essentiellement un festival de cinéma et de débats).


Les Éditions de la Brochure étaient parmi les exposants. Bien que je ne crois pas avoir vendu un seul exemplaire pendant la durée du Festival, lors des quelques moments où j'ai pu être présent à la table, j'ai eu droit à de chaleureux « Bonjour Québec! »

Jean-Paul Damaggio, l'éditeur, rapporte :

« À cette occasion, l’ami Max a croisé un autre écrivain de La Brochure, le Québécois Jacques Desmarais, auteur des Poèmes cannibales, à qui il écrivit ensuite ce petit mot :

Cannibale ! Cannibale ! qu’y dit le Canadien (Québécois qu’y dit). Les mots, il les bouffe, les dégurgite, les respire, les envoie en l’air. Il les forme, les déforme, les chloroforme jamais ! Les conforme jamais ! Pour conformer, il ne faut pas informer, faut con-municher ! Il munich pas ! Il résiste.


Nous n’étions pas pour rien à Résistances. »





Poésie à la Gamacherie

Noticias

J'ai dit oui.
Que j'irais lire de mon cru
à la soirée de poésie de la Gamacherie,
À Norbertville, P.Q.,
Vendredi, le 31 juillet 2009.

Entrée : 10 $

Devrait y avoir la présence, entre autres,
de Jean-Marc Lafrenière
et de Patrice Desbiens.


Publier le message

22 juillet 2009

Retour de Barcelone






Espagne, 19 juin 2009
Sur l'autoroute, vers Girona et Figueres.

Je n'ai pas mes lunettes et ça branle-brasse à l'arrière de la voiture. J'écris tout croche. Il se peut que la patrie de Dali fasse fermenter des émancipations spontanées. Mais là, en cet instant, j'ai plutôt tendance à cogner des clous comme une mitraillette découragée, molle comme une montre. Mais pourquoi donc abandonnerais-je mes pieds enflés de Barcelone à mi-chemin d'une conclusion portative? Je ne sais pas comment les choses se tiennent ensemble. Comme le disent mes amis, je suis très graine à ce chapitre. Mais en revanche, je sais très bien comment elles se déshabitent en silence.

Photo jd. Figueres la nuit vue de l'Hôtel Duran
.

21 juillet 2009

Des chemins sur la mer

Sur la Côte Vermeille, Colliure, 17 juin 2009

















L'anse de Colliure et le fort St-Elme construit par Clarles Quint en 1542

Colliure, village catalan, c'est magnifique!
Colliure, mot catalan qui veut dire « col libre ».


Clocher N.D. des Anges. C'était jadis un phare


Parcours fauve à travers les rues témoignant du passage des grands peintres comme Matisse et Derain dont on voit ici une reproduction.

En fin d'après-midi, arrêt-drink bienvenu à une grande terrasse déserte en cette période hors-saison.


Nous cherchons de l'oeil parmi les maisons empilées le carré de cyprès, c'est-à-dire le petit cimetière où repose le poète exilé du facisme Antonio Machado.

Photos : jd


20 juillet 2009

St-Cyp pour les intimes

Vue de la véranda à 6 heures le matin.


La sage Méditerranée : je rêvais de la voir.
La plage très large s'étend sur 6 kilomètres de long.



Le port de plaisance de St-Cyprien compte 2200 anneaux.


Quelques pêcheurs s'affairent au quai.


Jean-Paul Damaggio, mon ami et éditeur (La Brochure) achète L'Indépendant au «dépanneur».


Les palmiers assoiffés ont remplacé les platanes!


La plage à nouveau à midi

Photos jd



19 juillet 2009

Willie, John & Bob au Vermont.



Beau sans dessin que je suis! Sur l'échelle de Kohlberg je ne dois guère avoir dépassé le stade du jugement moral collé sur le respect des règles sociales! En tout cas, en franchissant l'entrée de l'immense Champlain Valley Exposition Center, à Essex Jonction, Vermont, c'était écrit « No camera ». Alors, en bon petit gars que je suis, j'ai rangé mon kodak et, résultat des courses, je n'ai aucune photo perso du show triple de Nelson, Mellencamp & Dylan, ni de la fille à côté de moi si American en talons aiguilles et décolleté dansant le rock'roll, ni de toutes les blondes qui se collèrent au cours de la soirée à mon comparse Emma!

Autour de moi, ça mitraillait pourtant à qui mieux mieux malgré les objurgations des responsables de la sécurité.

Heureusement, il y a l'ami Françoys qui fit le délinquant, lui qui était posté à un point de vue plus éloigné, mais plus central par rapport à la scène. J'attends le déversement.

Pour l'heure, je me permets de piquer une photo du Burlington Free Press où l'on distingue avec des yeux de lynx (me semble-t-il) un quart seulement du même Françoys, bras levé, chandail rouge à gauche vers le bas, puis très distinctement Randy, casquette et t-shirt noir, à ses côtés!


Et puis tiens : voici la fille (boléro blanc) qui dansait à mes côtés !

(Photos : Glenn Russell)

J'aime toujours ça poser les pieds au Vermont. Ces voisins du Québec* sont spontanément accueillants et amicaux. J'étais néanmoins encore à l'heure européenne et c'était tout un changement d'ambiance avec moult tatous et personnages hétéroclites.

Ce programme triple qui fut arrosé d'une petite pluie pas trop pire valait certes le détour. Comme la plupart de mes camarades de route, je n'avais jamais vu Mellencamp et j'en ressort ravi. Programme musical varié incluant violon, accordéon, contrebasse... Willie fut égal à lui-même : impeccable. Bobby, chapeau espagnol blanc à larges rebords, était en voix, mais son tour fut un peu court, il me semble.

Je partage l'avis de Rod Brennan, un blogueur de Plattsburgh : le batteur de Dylan que certains trouvent trop envahissant est à mes oreilles vraiment impressionnant. Il tient l'aiguillon.

Tiré du site de Dylan, voici le programme des chansons entendues :
  1. Leopard-Skin Pill-Box Hat
  2. Señor (Tales Of Yankee Power)
  3. I'll Be Your Baby Tonight
  4. Rollin' And Tumblin'
  5. Spirit On The Water
  6. Things Have Changed
  7. If You Ever Go To Houston
  8. High Water (for Charlie Patton)
  9. I Feel A Change Comin' On
  10. Highway 61 Revisited
  11. Nettie Moore
  12. Summer Days
  13. Like A Rolling Stone
  14. All Along The Watchtower
Enfin, voici les gars de la bande du « chevelu Motel 6 » se croyant un instant être sur les bords du bayou Teche... mais prenant plutôt la pose devant une petite swamp quand même le fun du Lac Champlain.

(Photo jd.) Randy, Denis, Françoys et Emmanuel.

La Louisiane, je le souhaite, ce sera pour un autre trip cet automne! Mais pour ma part, snif! snif!, je dois accrocher mon pack sac... Les vacances sont finies! Je n'ai même pas eu le temps de réparer mon flat de bicycle!

Summer days, summer nights are gone
Summer days, summer nights are gone
I know a place where there's still somethin' going on


* Je suis abonné au bulletin mensuel de Mattew Farfan auquel j'ai déjà collaboré. Mattew qui vit à Stanstead vient de publier The Vermont-Quebec Border: Life on the Line, chez Arcadia. L'ouvrage se décrit comme étant « a visual record of life in the villages, towns, and countryside in a unique part of the world – the region that spans the imaginary line separating Quebec from Vermont. Never before has a book in this series been devoted specifically to the international border ». Pour info, voici le courriel de Mattew : mf@qahn.org.

18 juillet 2009

Vent de chien et beautés superbes



« J'ai perdu la tramontane (...)
Qu'il me pardonne ou non
D'ailleurs, je m'en fous
J'ai déjà mon âme en peine
Je suis un voyou…. »
- Brassens


Photo Jacques Desmarais.


















Étang de Canet, Saint-Cyprien,
Canton de la Côte Radieuse
Midi-Pyrénées (Miègjorn-Pirenèus)
Région du Languedoc-Roussillon
En terre catalane, France, Europe
Planète Terre, Galaxie Poésie.

21 juin 2009. C'est l'été. Les lauriers sont fleuris. La Méditerranée est à mes pieds. C'est la matinée. Il fait hyper beau, mais la forte tramontane siffle au-dessus de nos têtes. C'est une expérience.

Pas un chat sur la plage. Un joggeur, c'est tout. Longeant les dunes, le vent sec, assez froid, soulève le sable, ça picosse les jambes et picote les yeux. Le drapeau rouge est levé : interdiction de baignade aujourd'hui. En revanche, quelques valeureux planchistes saisissent à deux mains l'occasion et ils en prennent plein les voiles.


Photo Jacques Desmarais. Cabanes des pêcheursCliquer pour voir la mouette.

Situé entre Canet et Saint-Cyprien, au bord de l'étang de Canet, nous gagnons en auto le lieu où se trouvent quelques rares cabanes de pêcheurs réhabilitées en 1993 dans une perspective patrimoniale. Certaines sont encore utilisées de nos jours comme lieu de stockage par les pêcheurs d'anguilles. Elle sont construites en sanils, des roseaux marins qu'on trouve à profusion dans les étangs. Ces espèces de huttes témoignent du temps où le littoral était modelé par l'activité traditionnelle de la pêche.

Enfant, mon ami Moucho a bien pu courir dans les herbes aussi hautes que lui, tout surpris d'aboutir soudain à la mer. C'était l'époque où l'on n'avait pas encore couper les platanes au village pour les remplacer, quel dommage, par des des palmiers « style Côte d'Azur ». Les touristes se ramassent aujourd'hui à la pelle.

Cabanes des pêcheursCliquer pour voir la mouette.
Je ferai le retour à pied jusqu'au studio des parents de Moucho.


Photo Jacques Desmarais. Jean-Paul «Moucho» et Marie-FranceNous, on est dans le vent.


La zone humide de l'étang n'est reliée à la mer que par un étroit grau (un canal).



Je me suis installé à mon tour dans les herbes hautes, à l'abri du vent, j'ai admiré le magnifique paysage, j'ai écouté le souffle venu des Pyrénées pendant un long, long moment. J'étais complètement camouflé, invisible aussi bien de la route que du sentier de terre qui longe l'étang jusqu'au grau. J'ai gribouillé dans mon cahier.

Photo Jacques Desmarais. Sentier menant au grau.

J'aurais pu me mettre flambant nu, dret là, en plein soleil carillonneur. Heureusement que non! Une cavalière blousée comme une vraie de vraie écuyère, cheveux noirs courts, très jolie brin de fille, passa soudain dans mon dos. Elle me fit sursauter ce qui entraîna illico un coup de cou et de frein de sabot de la part de sa bête aux flancs rutilants. Je ne conte pas de menteries : les flancs roux rutilaient. Et la fille était belle comme une princesse. La belle plus que la bête me salua et ils continuèrent lentement leur ballade.

Je suis resté encore un moment malgré les trous béants de mon abri.

Je mentirais en disant que j'ai vu de mes yeux vus tout ce qui peut bouger et pateauger là, devant moi, dans cette étendue brunâtre aussi vaste qu'un lac. Mais outre les pies et les merles, j'aurais très bien pu rencontrer les hérons pourprés, le busard des roseaux, l'échasse blanche, le fameux flamand rose, le crabier chevelu, le chevalier sylvain, la grande aigrette, l'avicette, le martin-pécheur...

Je suis particulièrement fier de la photo du haut. On y aperçoit au loin le Pic du Canigou. Ce n'est point là un nom d'oiseau virevoltant autour de l'étang, mais bien celui du plus haut sommet (2784 m) enneigé des Pyrénées, sur le massif du Canigou.

J'ai repris le sentier pédestre puis, j'ai traversé au grau du côté de la mer vers Saint-Cyprien. Quelques kilomètres à faire dans le sable coulant avec la tramontane dans la face pour me forger un beau souvenir.

Photos (sauf les cartes) : jd.

16 juillet 2009

Lavande, anges & papillons

C'est bien pour dire :
Le papillon surréaliste
s'intéressa en Amérique
au papillon-lune, à son énigme

œuf
larve
cocon
résurrection
éclosion
légèreté
métamorphose
légèreté légèreté
broderies des ailes graciles
poudre fragile dans l'air

Aux Îles Canaries
on trouverait de la lavande-papillon

À Angeville
il n'y a qu'une seule intersection
des abeilles à profusion
des papillons, de la lavande
ce n'est pourtant pas la Provence

lavande sonne
vacances
chant des cigales
miellerie

Dans le patois des fleurs

la lavande lave les yeux et dit :
« Répondez-moi »













Ajouter une image






























Photos jd - Angeville, France, juin 2009

15 juillet 2009

La fraternité est toujours en retard




















J
e sais bien que le 14 juillet, c'était hier. Mais hier encore, j'étais à Toulouse-Bagnac en train de dire au revoir à mes amis français.


Je n'ai donc pas manqué de leur adresser mes souhaits les plus affectueux en ce jour des enfants de la patrie.

Je n'en connais toutefois aucun parmi eux qui se mobiliserait pour être de la parade militaire du Président et Chef des armées. Que voulez-vous? Le Sud produit trop de soleil! Cela tape sur les vignes et sur l'Histoire.

On ne saurait cependant être indifférent au sort de la République et par voie de conséquence, à celui de ses ingouvernables et innombrables fromages, comme le disait Charles de Gaulle, l'unique Grand maître de l'ordre de la Libération.

Bien sûr, le mot «chien» n'a jamais mordu personne, disait-il encore en faisant du Balconville. J'ignore s'il en est de même lorsque le chien se déguise en politichien habile, rusé, fonceur, calculateur, toujours pressé d'en finir avec la «lourdeur» de l'État afin de rapporter prestement l'os aux copains? Les copains d'abord version sans bancs publics.

On notera ici que je feins d'ignorer par pure diplomatie, car nous avons nous aussi ici-bas, en Amérique du Nord, nos cas de pure espèce de câlice! Excusez-moi.

Nous «exportons» volontiers en France les personnages de Mouawad. Mais sur la scène de la filière du Grand Théâtre «privé et bourse cousue», nous téléportons également du Desmarais full équipé qui nous revient médaille au cou. Remarquez que ce n'est surtout pas moi qui vais commencer à baver sur la famille!

En un mot comme en mille, en douce, Marianne, parfois représentée torse nu sur les Places des villes, est en voie de se statufier un avenir capital. Elle ne veut pas être déclassée. Elle aspire. Alors, en haut lieu et sans doute dans quelques loges obscures, ça siphonne.

Or, l'essentiel comme l'eau par exemple (mais soyons clair comme de l'eau de source «Il n'y a (...) jamais, en France, de "privatisation de l'eau", mais uniquement des "délégations de service public") est déjà une affaire vue, classée, on y va par là malgré des contestations dans le Ger notamment ou à Montauban.

Certains poussent leur lecture jusqu'à déduire que la «sortie de crise» du capitalisme - quelques bons Zouaves éclaireurs ici et là affirment qu'on doit le refondre - converge vers et par un mouvement de néo-féodalisme dominé par de grands seigneurs argentés pour des siècles et des siècles à venir, au-delà des multinationales (est-ce imaginable?), au-delà surtout des États dorénavant sans graisse. Ces derniers seront devenus des espèces de mannequins politiques défilant pour la frime et au seul bénéfice du fric.

Alors, à quoi bon la peau et les os de la Res republica? Qu'on les jette aux politichiens en place!

Féodalisme ou, comme l'a illustré le «pessimiste» Denys Arcand : nous nous dirigerions vers l'Âge des Ténèbres.

Je me dis toutefois : wow back arrière! Les temps sont incertains comme toujours. Il est par conséquent stimulant de donner toute la place et toute la chance à la liberté, y compris la liberté de s' engager et de transformer nos petits bouts de «royaume», y compris celle parfois de niaiser devant ce beau parterre, de prendre le risque d'exagérer, de se tromper, etc.

Les déterminismes pèsent comme du plomb, découragent lorsqu'on ne voit qu'eux. Mais tout n'est pas écrit à l'avance comme dans le ciel de Jacques le fataliste. Je ne crois pas aux complots. En revanche, faire tomber la monarchie, entre autres, ne fut pas une mince affaire!

La fraternité dans tout cela? Toujours en retard, la fraternité. Selon certaines versions, la Révolution proclamée en 1790 n'a pas inclus de façon manifeste ce terme parmi son lexique. On y parlait surtout de liberté, puis d'égalité. Ce serait donc plus tard, à la faveur de la réconciliation de l'État avec l'Église, vers 1860, que la fraternité, valeur chrétienne entre toutes, entra au fronton de la devise cardinale des Français.

De nos jours, la fraternité ne peut plus être un impératif moral qui creuse la culpabilité en cas d'échec. Car cent fois le jour nous manquerons à notre «devoir»! Ça, c'est écrit dans le Ciel.

S'il s'agit plutôt de renverser les maîtres et les bourreaux, les rois et roitelets de notre temps, les mafias, les dieux de la publicité comme ceux qui «font» égorger nos frères quels qu'ils soient et peu importe où ils se trouvent, alors la fraternité en tant que valeur, en tant que passeur est inséparable du dialogue entendu comme construction du sens par la parole plurielle, collective et libre.

À travers les grandes fresques et les épopées tragiques d'un Wajdi Mouawad qui touche présentement un large public français, on trouve l'exemple admirable d'un engagement artistique et humain qui dépasse de cent milles lieux le jeu banal des représentions pour consommation sur place dans la caverne, divertissement sans retour d'ascenseur.

Sur le plan personnel et celui des institutions (famille, bureaux, usines, lieux de culture, droit administratif, etc., etc.), la fraternité n'est jamais isolée du vivre ensemble au jour le jour.

On ne peut donc pas la restreindre à un impératif moral comme la règle d'or de Kant ou le «commandement» « aime ton prochain comme toi-même». La fraternité se trouve à l'épreuve et en chantier lorsque nous tâchons de réduire (principalement par le droit et par l'éthique) les comportements de domination, c'est-à-dire ceux par lesquels nous considérons «l'Autre» comme un objet pour satisfaire des besoins ou des intérêts particuliers.

À ces cas de figure un peu statiques s'ajouterait une dimension importante esquissée d'abord par Michel Foucault, reprise aussi par le philosophe Jacques Rancière dans le cadrage qu'il propose du partage du sensible, à savoir l'inscription de la loi dans le corps, ou pour le dire autrement, la complicité de celui qui est pris comme objet et qui va consentir à porter ce masque comme si cela était le seul jeu de langage possible dans son contexte à lui. Qui d'entre nous ne joue pas le jeu de la domination?

À une époque où l'économisme s'approprie tout l'air disponible des cités, le droit individuel de «faire des affaires» est érigé au dessus de tout, il explique tout, il fonde la «croissance». Malgré la solennité des «Déclarations universelles», c'est grossier mais c'est comme ça : il est plus important de pouvoir commercer«sans entraves» que d'assurer le droit à la vie, c'est-à-dire manger, boire de l'eau potable, respirer l'air qui n'est tout de même pas patenté par une corporation, avoir un toit, se développer, vivre avec les autres dans la dignité et le respect.

Mon ami et éditeur «Moucho» ne cesse de le répéter : la compréhension politique de notre temps, car c'est bien de cela qu'il s'agit en définitive, que cela ne soit pas d'emblée ma tasse de thé est une autre paire de manche, passe par ce patient dialogue où l'on poserait avant tout une question préalable et qui pourrait être celle-ci : à quoi désirons-nous accorder de l'importance pendant le court passage qui est le nôtre?

En attendant, vive la France libre!

Photo : jd.