24 septembre 2013

Le Québec au-delà du 49e : poésie, beauté, amour

L'admirable Jean Désy pour qui Vivre ne suffit pas (XYZ, 2011) à cause de ses influences et le fabuleux Serge Bouchard avec son oeil mamouth en entrevue autour du recueil Objectif Nord (Éd. Sylvain Harvey, 2013).

23 septembre 2013

Arthur Lamothe et Michel Brault, ces étoiles en allées du cinéma


Tristes nouvelles, coup sur coup, Arthur Lamothe et Michel Brault, ces deux grands cinéastes québécois des plus authentiques se sont éteints.   Leurs oeuvres vont continuer à faire du chemin dans notre mémoire collective et à inspirer créateurs et artisans, toutes disciplines confondues.

Sur sa page facebook, le documentariste André Gladu que j'ai eu l'immense plaisir de rencontrer lors d'un Grand slam où il tournait, partage un témoignage de l'intérieur à la fois touchant et essentiel sur ces deux grands humanistes qu'il a cotoyés.   Ah! Le métier fabuleux qui est le leur.     



« L'indiscret Facebook me demande "À quoi pensez-vous ?" Je ne peux m'empêcher de penser au fait qu'on vient de perdre en quelques jours deux pionniers majeurs du cinéma québécois: Arthur Lamothe et Michel Brault. J'admirais Arthur pour ses films engagés: BÛCHERONS DE LA MANOUANE (1962) et surtout sa magnifique série sur les Innus (Montagnais) CARCAJOU ET LE PÉRIL BLANC et LA TERRE DE L'HOMME (1973-1983) en collaboration avec Rémi Savard, anthropologue. Puis MÉMOIRE BATTANTE (1983) sur l'univers spirituel des Innus. Lamothe donnait la parole aux autochtones qui racontaient leur vie dans leur langue. Un choc !

Michel Brault était un ami et certainement le collaborateur le plus important que j'ai eu en cinéma. C'est lui qui m'a transmis les grands principes du documentaire et surtout l'esprit du cinéma direct. Nous avons coréalisé la série Le SON DES FRANÇAIS D'AMÉRIQUE de 1974 à 1980 (27 courts métrages sur la musique traditionnelle des collectivités francophones du continent incluant 5 films tournés en France, Bretagne et Irlande sur les origines).

J'ai eu le privilège de voir Michel à l'action sur le terrain pendant six ans accompagné de ses assistants dont Andy Chmura, Suzanne Gabori, Ronald Brault, Jacques Méthé, Louis De Ernsted, René Daigle, son garçon Sylvain, Jocelyn Simard et la plupart du temps avec Claude Beaugrand à la prise de son, sinon avec Serge Beauchemin ou Esther Auger. Le montage des films étaient faits majoritairement par André Corriveau et à l'occasion par Josée Beaudet, Yves Dion, Éric De Bayser. Une équipe du tonnerre.


Il y aurait beaucoup à dire sur l'apport de Michel à notre cinématographie, son héritage cinématographique et ce qu'il laisse aux Québécois. Son principal legs se trouve dans ses films. Il était un des chefs de file du Cinéma direct et certainement un des plus doués. Son influence a marqué plusieurs grands documentaristes québécois, français et américains. Il était motivé par une curiosité technique peu commune et toujours à l'affût pour améliorer les outils du documentaire. Il était consulté régulièrement par des gens comme Jean Rouch, un des pionniers du Cinéma vérité en France, Richard Leackock l'opérateur de Flaherty et Jean-Pierre Beauviala l'inventeur de la fameuse caméra légère Äaton 16 mm. Son oeuvre cinématographique documentaire et fiction est incontournable. Je mentionne certains repères: LES RAQUETTEURS (1958) film précurseur du Direct coréalisé avec Gilles Groulx, LA LUTTE (1961) coréalisation Fournier, Jutra, Carrière. Le film culte POUR LA SUITE DU MONDE (1963) et L'ACADIE L'ACADIE !?!?(1971) coréalisé avec Pierre Perrault. ENTRE LA MER ET L'EAU DOUCE (1967), ÉLOGE DU CHIAC (1969), LES ORDRES (1974). [...] je retiens de lui son instinct sûr pour aller chercher la beauté de l'image et sa compréhension de la lumière. Son incroyable intuition à appréhender les situations documentaires, les êtres, rien ne lui échappait. Un sixième sens pour les choses qui se manifestaient de façon non dite, dans le silence. Avec les années nous avions mis au point une méthode de travail très efficace qui nous permettait de tomber dans la réalité des gens qu'on filmait. L'échange entre nous et les participants donnait des moments sublimes, entre autres de musique, comme avec monsieur Boudreault, le Quêteux Tremblay, Zachary Richard,madame Audet, Dennis McGhee, Calvin Carrière, Nathan Abshire, madame Innes Catalon, Emmanuel Kerjean, Philippe Bruneau, etc. Une véritable chorégraphie de l'instant présent. Pas un mouvement n'était fait inutilement. Tous nos gestes nous rapprochaient de la vérité. Il me confiait: "André, tous les mouvements de la caméra, les décisions du preneur de son, tes interventions, doivent converger vers le même but..." Vu de l'extérieur des badauds se seraient demandés ce qu'on faisait. Dans les meilleurs moments on se comprenait sans mots. Je regardais brièvement Michel qui jetait un coup d'oeil à Claude et c'est parti. On savait que ça allait être bon. 
Michel avait souvent les deux yeux ouverts. Un pour ce qu'il tournait, l'autre pour surveiller ce qu'il se passait. Il découpait toujours ses séquences question de donner du vocabulaire au monteur. "Je tourne pour le monteur. Et non pas seulement pour faire des belles ima-ges !" Parfois certains tournages intenses exigeaient pour Brault de vivre dans l'oeilleton (le viseur) de la caméra pendant six heures entrecoupées du repas du midi. En fin de journée je lui demandais:"Pas trop crevé ?" Il me répondait:" Il faudrait que tu l'essaies juste une heure, sans arrêt...". 

On lui doit aussi son formidable travail d'animateur et de rassembleur du milieu. Michel était de toutes les batailles. Pour améliorer le sort du Programme français à l'ONF, pour militer pour la survie de la Cinémathèque québécoise, pour créer le premier syndicat des techniciens, pour mettre sur pied l'Association des réalisateurs et réalisatrices de films du Québec, pour exiger des fonds pour notre cinéma auprès de Téléfilm Canada ou de la SODEC, pour obtenir du temps d'antenne pour les films québécois, etc. Il était partout. Et surtout c'était un être généreux qui ne ménageait pas ses encouragements et ses efforts. Il faisait confiance aux gens et dès qu'il s'enthousiasmait pour une aventure cinématographique il était de la partie avec ses conseils, sa longue expérience, son compagnonage rassurant et toute son amitié.

En documentaire Michel croyait profondément à l'importance de donner la parole et l'image à des gens et des populations qui normalement sont exclus des tribunes officielles. Ceux qui n'ont pas de voix. Une préoccupation profondément démocratique qui n'est peut-être pas complètement étrangère avec une expérience marquante vécue alors qu'il était enfant. C'est lui qui nous la racontée. Un jour à l'école la maîtresse de français demande aux élèves de lui faire le portrait d'un chat. Dans son enthousiasme Brault prend sa feuille et un crayon et dessine un chat. La maîtresse ramasse les réponses de ses élèves et parmi les descriptions de chats elle découvre le dessin de Michel. Elle le brandit devant les élèves et ridiculise celui qui avait dessiné plutôt que d'écrire. Peut-être qu'à partir de ce moment-là Brault s'est méfié des mots et des écrits et a décidé qu'il allait nous prouver qu'une image vaut mille mots...

Désolé d'avoir pris autant d'espace pour vous parler du départ d'un grand cinéaste et d'un ami, mais c'est un sujet que je n'arrive pas à traiter en quelques mots. Ce sera une présence difficile à remplacer d'où l'importance de bien mesurer ce qu'il nous laisse. La photo ci-jointe [cf. la page facebook] a été prise à Gençay (Poitou) en 1977 après le tournage de notre film La terre d'amitié. Michel, Claude Beaugrand, Andy Chmura et moi étions crevés mais heureux. »

Merci André Gladu!






En supplément :
Marc Cassivi, Si vous saviez monsieur Brault, La Presse, 24 novembre 2013.

17 septembre 2013

To Ramona


 
                                                                                                              
 Ramona, come closer
Shut softly your watery eyes
The pangs of your sadness
Will pass as your senses will rise
The flowers of the city 
Though breathlike, get deathlike SOME TIME
And there's no use in tryin'
To deal with the dyin'
Though I cannot explain that in lines.

Your cracked country lips
I still wish to kiss
As to be by the strength of your skin
Your magnetic movements
Still capture the minutes I'm in
But it grieves my heart, love
To see you tryin' to be a part of
A world that just don't exist
It's all just a dream, babe
A vacuum, a scheme, babe
That sucks you into feelin' like this.

I can see that your head
Has been twisted and fed
With worthless foam from the mouth
I can tell you are torn
Between stayin' and returnin' 
Back to the South
You've been fooled into thinking
That the finishin' end is at hand
Yet there's no one to beat you
No one to defeat you
'Cept the thoughts of yourself feeling bad

I've heard you say many times
That you're better THAN no one
And no one is better THAN you
If you really believe that
You know you have 
Nothing to win and nothing to lose
From fixtures and forces and friends
Your sorrow does stem
That hype you and type you
AN' Making you feel
That you gotta be just like them.

I'd forever talk to you
But soon my words
Would turn into a meaningless ring
For deep in my heart
I know there'S no help I can bring
Everything passes
Everything changes
Just do what you think you should do
And someday, maybe
Who knows, baby
I'll come and be cryin' to you.





15 septembre 2013

La charte sur un toi brûlant

L'écrivain et cinéaste Jacques Godbout (vu à Canal Savoir hier et présentement à Dessine-moi un dimanche), militant de la première heure du mouvement laïc québécois en 1960, mentionne à son tour un élément d'ordre éthique à mon humble avis essentiel au débat : en braquant le lead sur les valeurs plutôt que sur la laïcité, l'avant projet de charte des valeurs, qui dans son texte même de 25 pages est embrouillé, détourne l'attention et risque de noyer le mouvement historique de la laïcité, si bien analysé par ailleurs par Guy Rocher. C'est que par définition, une valeur peut embrasser plusieurs figures (valeurs personnelles, familiales, professionnelles, collectives, ça n'a plus de fin, mais tout ne se vaut pas dans le genre « vivre et laisser vivre »!) et une valeur est ce qui nous mobilise, nous fait vibrer. Cela implique une préférence, un choix à assumer pour un temps donné, le plus universellement possible dirait Georges A. Legault, une valeur n'étant pas un dogme moral de l'ordre du devoir, d'où les tensions entre des valeurs légitimes et tout aussi mobilisatrices, mais qui ont des conséquences distinctes sur le plan de l'action, du style de vie (au sens de Wittgenstein), du fabuleux « vivre ensemble ». Le devenir soi ensemble, pour dire enfin comme Jean-François Malherbe, c'est effectivement fabuleux si l'on pense deux secondes à co-construire quelque chose comme une idée neuve du bonheur. J'oserais demander là-dessus ce qu'en pensent les philosophes Michel Seymour, Normand Baillargeon et Christian Nadeau.

14 septembre 2013

À coeur joie

À coeur joie gaudia 
dans les guédelles
se réjouir, allumer
éprouver, rayonner
inonder, grouiller, 
de grappe en grappe
stepper trois pieds d'haut
les feux de crocodiles
dans nos souliers,
mais de papa loup
au panda masqué
faudra-t-il,
petits comiques,
c'est ma question,
arrêter de sacrer?


11 septembre 2013

Le 11 septembre des Chiliens et de nous tous

De triste mémoire, au temps du régime sanglant de Pinochet (1973-1990), la Villa Grimaldi à Santiago fut un des lieux importants de détention et de torture de la DINA.  Depuis 1997, cette maison est devenue un lieu de mémoire pour les disparus et les personnes exécutées.

L'ami Jean-Paul Damaggio qui a séjourné au Chili en 2012 nous en parle dans un billet du blogue des Éditionns de La Brochure.

« Lieu génial, hautement culturel, l’œuvre d’un humaniste.
Lieu changé en centre de torture, hautement toxique.
Lieu changé en mémoire à l’aide d’une citation.
Invité surprise pour ça : Mario Benedetti.
"El olvido está lleno de memoria".
“L’oubli est plein de mémoire”.
Elles s’appellent : Ángela Jeria et Michelle Bachelet.
La mère et la fille.
Dans cette maison elles survécurent.
L’une est même devenue présidente de son pays.
Hier, elles ont posé un œillet rouge sur la liste des morts.
Avant-hier, des dizaines de milliers dans les rues ont manifesté.
Quarante ans après.
Quarante ans après, El Mercurio est toujours là.
Ce journal a rendu compte de la manifestation.
Pour retenir la centaine de casseurs.
C’est classique, c’est mondial, c’est meurtrier.
Si vous voulez frapper les médias, cassez, cassez et cassez encore.
Du moins certains médias comme El Mercurio.
Un jour, à la Maison Neruda de Santiago, un seul journal était à disposition.
El Mercurio !»

[...]

« Le Chili du 11 septembre, ce n’est pas un anniversaire, ajoute Jean-Paul, c’est un tournant de notre histoire. »


03 septembre 2013

Ruisseau volant vu par en dedans

Souhaiter savoir nager voler avec un oeil de riopelle qui crève l'écran.

Photo © Jacques Desmarais - Ruisseau volant vu par endans, Ste-Anne-des-Lacs, 1er septembre 2013

Stridulation


Septembre! La lumière du jour rapetisse. Les cigales tout autour de la Grande-Allée à Ahuntsic se font moins tonitruantes. Mais leurs prières stridulantes de spoutnik par petites ondes aiguisées comme des smarties sonores bordent encore subtilement la soirée. Nous sommes toujours bien en été! Et il y a de l'amour dans l'air.

02 septembre 2013

La crosse de bois

La crosse de bois est morte dans son sommeil en souriant
sous l'ombre fraîche des feuilles vertes qui respirent au vent
comme un coeur qui bat au delà.

Photo © Jacques Desmarais - La crosse de bois, Ste-Anne-des-Lacs, 1er septembre 2013