31 août 2015

Le peuple invisible, là, dans la maison d'à-côté.

Jean-François Nadeau au cours de ses deux dernières chroniques du lundi au Devoir repasse avec un haut-le-coeur dans le village algonquin de Kitcisakik . La question centrale, en effet, est la suivante : « Comment se fait-il qu’on n’accorde pas spontanément au sort des Amérindiens la meilleure attention? Cette attitude générale qui suppose que le destin de ces hommes compte moins que celui des autres, et que l’ordre moral peut en conséquence être retranché de l’ordre politique sans le faire périr, cette attitude, la nôtre, est un non-sens absolu. »
Suite autochtone, Le Devoir, 31 août 2015.
Haut-le-coeurLe Devoir, 24 août 2015.

En complément, des traces cinématographiques :

Manon Barbeau,  Escale à Kitcisakik, là où repose Wapikoni qui a bêtement perdu la vie lors d'un accident de la route. 

Le peuple invisible, long métrage documentaire de Desjardins-Monderie, ONF, 2007. 

29 août 2015

Lumière d'août


Lumière d'août comme une fontaine « ou une fille », orientée vers le grand sud. C'est éphémère, bien sûr, le haut bord de la passion en éclats. Mais le jardinier cultive en lui-même la patience des saisons. Il fredonne... « Il fait toujours beau quelque part ».

Photo JD., Béthanie, 22 août 2015.

Lucienne Corbillard

Exclusif - La Commission de révision permanente des programmes, présidée par l'ancienne ministre Lucienne Robillard, rendra public lundi son second rapport, a appris Radio-Canada.


Bon! C'est un cas classique de libération, je dirais même que c'est un cas lisse! Voilà que madame Lucienne Robillard avec ses yeux de piment fort aurait enfin terminé de revirer et de revirailler dans « le bon sens » et à hauts tarifs journaliers chacune des roches, des rochettes et des pierrettes du jardin communautaire! On pourra donc continuer à jeter du sable dans l’engrenage de la machine à gogo de l’État qui coule, et au besoin, sur la tête du pauvre monde! Aussi, après un ballon d'essai lancé plus tôt ce printemps dans le ciel du pays sage du Québec gris et pris à la gorge par la grande soif de vivre, on verrait donc enfin se confirmer la liberté de vendre des alcools licites et là! Vive la Canadienne! Vive Lucienne la magicienne! Vive le vino libre! (Si boire de tabarflasque!).


28 août 2015

Le petit jardinier

Photo JD. Hommages.
Il y a peu quelqu'un sur FB a publié via YouTube une chanson de Jacques Blanchet extraite d'un disque que j'aime beaucoup beaucoup, mais que je n'ai pas fait tourner depuis des lustres faute de table appropriée : Marie-José Thériault chante Jacques Blanchet avec André Gagnon au piano. Jacques Blanchet et Lucille Dumont étaient parmi les artistes préférés de mon père. Pour ma part, il s'adonne que j'ai entendu chanter Marie-José sur scène lors d'une soirée hommage à son père, le grand écrivain Yves Thériault. C'était précisément le 7 décembre 1981 à la salle Le Plateau. J'étais en compagnie de Michael Thomas Gurrie, journaliste sportif même si ça dérange. Ce soir-là, je suis littéralement tombé sous le charme de cette voix douce qui fait vibrer les textes magnifiques de Blanchet. Un exemple ici avec quelques crépitements de feu : Le petit jardinier.






En passant, madame Thériault m'informe qu'elle prépare un hommage à Jacques Blanchet pour octobre 2015. À suivre.

Mentionnons enfin qu'en cette année 2015, c'est le centenaire de la naissance de l'écrivain Yves Thériault.




19 août 2015

La violence faite aux femmes autochtones au Canada s'aggrave

Hier en soirée, je revenais en auto. Repassait à la radio l'interview de Viviane Michel à Médium large à propos de la honte sans nom entourant la violence et les meurtres de femmes autochtones, et ce, insiste Mme Michel, pas seulement dans l'Ouest, mais aussi au Québec. Il faudra en effet faire pression sur le nouveau Parlement canadien cet automne pour qu'une enquête et des actions appropriées à la situation scandaleuse soient menées au plus haut niveau politique. Merci Viviane et bon courage.

12 août 2015

Crapaudines

En ce 12 août, jour dédié à l'achat d'un livre québécois...

Retentissement. La lenteur n'est pas fatalement le signe d'un défaut de mémoire. J'ai longtemps eu dans mes rayons avant de le lui rendre enfin un livre de Gerald Manley Hopkins que m'avait prêté pour la sprung prosodie Michaël La Chance. Or, dans ses Crapaudines, ruisselantes merveilles forgeant du dehors la profondeur, l'on trouve d'entrée de jeu en exergue cette citation de Hopkins qu'il me plaît de partager à mon tour : 
« Chaque chose mortelle fait une chose, toujours la même : 
Elle fait l'offrande de l'être intérieur qu'elle demeure;
S'assujettit — va par elle-même; moi-même dit-elle et s'épelle
S'écriant Je fais ce que je suis, c'est ce que je fais ici. »






La négation du génocide culturel par Stephen Harper

L'anthropologue Serge Bouchard sur sa page FB du 3 juin 2015 :

« Se saisir des enfants d'un peuple, en abuser en toute impunité, leur interdire de parler leur langue maternelle, oublier à dessein le nom des 63 Premières Nations du Canada, détruire les cultures, effacer l'existence de ces peuples dans l'histoire, dévaloriser les identités et porter atteinte à leur dignité collective, changer les noms, entourer cette politique de silences coupables et d'insensibilités cruelles, si cela n'est pas un «génocide culturel», j'en perds mon latin, mon grec et mon bon sens. Quelle petitesse, quelle mesquinerie de la part de Stephen Harper qui conteste le terme «génocide culturel» pour mieux en atténuer l'impact. La Commission de Réconciliation n'a pourtant pas révélé une réalité étonnante. Ce génocide culturel appartient aux évidences historiques de l'histoire du Canada. Le gouvernement fédéral a voulu détruire les cultures amérindiennes depuis l'an zéro de la Fédération. La politique canadienne a tenté de faire disparaître ces peuples distincts du portrait national et tous les efforts ont été investis par les Affaires Indiennes pendant plus de cent ans pour tuer l'Indien dans l'Indien. Il n'est aucune autre manière de le dire. »

09 août 2015

Journée internationale des peuples autochtones

Le Chef Ghislain Picard souligne sur sa page FB que c'est aujourd'hui le 9 août la journée internationale des peuples autochtones. C'est parmi mes souvenirs marquants dans l'exercice de mon travail que je me remémore ce voyage à Eastmain en mars 2014 où nous avions été reçus avec chaleur et amitié. Une photo avec le Chef Edward Gilpin témoigne de notre rencontre. Une jeune fille narquoise dont j'ignore le nom s'était subrepticement jointe à nous juste avant le clic de la photo... Bonne journée & longue vie! 




Photo Maria Pia



08 août 2015

Le Fleuve, lumière et traceur de vies



Monique Durand poursuit dans Le Devoir de ce jour sa série de textes sur les Éclats de lumière en cette année internationale de la lumière. Vraiment magnifique, en mouvement sur le Saint-Laurent des deux côtés de la rive avec une photo prise au Bic, me précise l'ami Réjean Bertrand sur FB.  Ne peux pas m'empêcher de partager! La citation de Louis-Edmond Hamelin, géographe et linguiste, vieux sage que j'admire, donne le ton. Il y a le Fleuve entre majesté et froidure. Il y a les gens.



ÉCLATS DE LUMIÈRE (7)

Fleuve lumineux


Le Devoir, 8 août 2015 | Monique Durand - Collaboratrice | Actualités en société

Nous sommes faits des lumières de ce colosse fluvial aux pieds de vent qui s’en va s’abîmer dans l’Atlantique.
Photo: Monique DurandNous sommes faits des lumières de ce colosse fluvial aux pieds de vent qui s’en va s’abîmer dans l’Atlantique.

La lumière est au coeur de ce qui fait de nous des humains. Elle est un phénomène physique mais aussi une construction culturelle. À l’occasion de cette année 2015, décrétée celle de la lumière par l’ONU, plongez dans une série sur divers états de la lumière. Septième de huit textes.​

Baie de Sept-Îles, 26 juillet. Un énorme cargo rouge et blancs’évanouit dans la brume. On ne discerne plus que la ligne vaporeuse de sa coque s’atténuant sous nos regards. Aucun moutonnement des vagues visible, même s’il vente à écorner les « beus ». Ça y est, la masse de fer et de bois est disparue. Et toute la baie avec elle. Comment écrire sur les lumières du fleuve sinon par petits éclats de fulgurance et fragments de souvenirs ? Les lumières du Saint-Laurent sont aussi multiples et diverses que son long squelette d’eau s’évasant en estuaire, en golfe, puis fonçant tous azimuts vers l’océan, long squelette dont chaque vertèbre est une rivière. Composition géophysique incomparable, d’eau douce dans son amont, d’eau saumâtre en aval de l’île d’Orléans, puis d’eau salée à partir de Tadoussac. Des marées ressenties aussi profondément qu’à Trois-Rivières. D’immenses étendues lacustres qui dilatent son cours : lacs Saint-François, Saint-Louis, Saint-Pierre. Avec des rives dont l’urbanisation décroît au fur et à mesure qu’on va vers l’est. Des climats qui peuvent changer dix fois par jour. Des brouillards, des squalls, des averses de pluie, de neige, de grêle, des coups de vent et des calmes plats.

« Le Saint-Laurent a modélisé la façon dont le territoire québécois a été habité. Encore aujourd’hui, il attire et fixe la population », dit Louis-Edmond Hamelin, géographe québécois de réputation internationale. « C’est un être définitoire, et pas seulement un axe de transport », poursuit-il dans un entretien publié récemment par les Presses de l’Université du Québec. Être définitoire avec des cultures diverses de part et d’autre de ses rives, rive nord, Repentigny, Donnacona, Cap-Tourmente, Baie-Trinité, Rivière-au-Tonnerre, Blanc-Sablon, rive sud, Verchères, Baie-du-Febvre, Saint-Jean-Port-Joli, Grosses-Roches, Mont-Louis, Petit-Cap. Autant d’univers, d’histoires, de phares dans la nuit et de types de luminosité diurne projetés dans les paysages.

Les lumières du fleuve sont indissociables des humains qu’elles enveloppent et qui muent avec elles d’un rythme à un autre, d’une humeur à une autre. Côte sud, côte nord, soleil levant ou soleil couchant, les yeux droit dans l’épée de feu ou dans le décor flambant à contre-jour, nous sommes faits des lumières de ce colosse fluvial aux pieds de vent qui s’en va s’abîmer dans l’Atlantique. Constitutifs d’elles. Lumières tantôt crues, avec des ciels très hauts, tantôt plus diffuses, dans des ciels voilés. Lumières d’hiver, presque aveuglantes, « luminosité extrême », dit Louis-Edmond Hamelin, lumières d’été, douces et claires, de printemps, un peu lactées, tirant sur le pastel, d’automne, mordorées.

Elles nous ont façonnés. Peuple au moral changeant d’un seul coup d’oeil à la fenêtre. Peuple vivant en dents de scie, excessif comme son climat, prompt aux réjouissances et à la dépression, passant de candeur à nostalgie comme le beau temps succède à la pluie et la mer étale aux vagues déchaînées. Lumières folles, avec un goût de liberté. Grisaille, avec un goût de cafard. C’est selon les jours, les saisons et les lieux.

Lundi matin d’octobre, 6 h 30 sur le traversier Camille-Marcoux qui franchit le Saint-Laurent de Matane, en Gaspésie, vers Godbout, sur la Côte-Nord, en un peu plus de deux heures. La boule rouge sort de l’eau, comme d’un tableau japonais. Les hommes dorment, allongés sur les bancs du navire, leurs mains croisées derrière la nuque en guise d’oreiller. Travailleurs qui s’en vont oeuvrer dans les mines, les forêts ou les usines nord-côtières, laissant une partie de leur vie derrière. Ils ont retiré leurs grosses bottes. À côté d’eux, un énorme sac de sport, pas de valises à roulettes ici, et une boîte à lunch. Godbout se rapproche avec ses hallucinants feux d’automne qui se mirent dans l’eau de l’estuaire. La boule rouge est maintenant un énorme paquebot rose dans l’horizon, où passe un goéland. Tout à l’heure, sous le plein soleil, les hommes mettront la clé de contact dans leur camion 4 X 4, ils se salueront gaiement avant de foncer, chacun vers sa destination. Ils ne changeraient pas d’existence, ils aiment cette frisquette lumière qui donne envie de se mettre à l’ouvrage, tout bonnement de vivre.

Rideau de mille petites lumières

Fragments de souvenirs lumineux du Saint-Laurent. C’est Marguerite, à Gaspé, qui ouvre sa cantine à la barre du jour et prépare sa pâte à crêpes. Simon, harnaché dans ses bottes qui lui montent jusqu’à la poitrine, lançant sa mouche au confluent de la Moisie et du golfe, son minuscule appât volant dans la lumière mate. Le vieux Walter, de Rivière-Madeleine, terminant la cuisson lente de sa vie, assis sur ses marches d’escalier, au grand soleil. C’est un long héron bleu dans une flaque du fleuve à Cap-Santé, où se mirent les premiers astres du soir. Un vol d’oies blanches sur Kamouraska, chacune comme une ampoule allumée dans l’azur. Un après-midi d’arc-en-ciel après la tempête, un bout de l’arc sorti du fleuve comme un monstre luminescent. C’est une terrasse au bord de l’eau dans la basse ville de Québec, où le couchant se reflète sur l’écaille des huîtres et les verres de sancerre. C’est un matin de pluie au port de Montréal. On appareille nous aussi avec ce navire battant pavillon grec et s’éloignant lentement. On rêve. De départs et de nouveaux printemps.

Fleuve de lumières, tout spécialement quand on entre dans le miroitement de ses eaux, tempérées à l’ouest, plutôt glaciales à l’est. On y pénètre lentement, le coeur peut nous manquer tellement c’est froid parfois, on esquisse deux ou trois pas sur fond de joncs, de vase, de sable ou de pierres, on recule, puis on revient, on entre enfin dans la joie, « saucé » de pied en cap. Cris de stupeur glacée ou jouissive insinuation dans l’élément tiède, juste rafraîchissant. L’âme étincelante du Saint-Laurent est un rideau de mille petites lumières qui tombe sur nos yeux.

Retour à la baie de Sept-Îles en ce 26 juillet. Des trous de bleu s’élargissent à travers la brume. Les fumées se dissolvent. Le cargo rouge et blanc reparaît soudain. On pense que le soleil ne reviendra plus jamais sur le Saint-Laurent, que c’en est fini de la transparence, que la cécité sera notre lot à jamais. Et chaque fois, comme un petit miracle, on recouvre la vue. Le ciel s’entrouvre. Lumière et fleuve nous sont redonnés.

Réfraction, dispersion, réflexion...

Par le dos de la cuiller des gouttes d'eau,
Béthanie sur la terre le 5 août 2015, 
entre 18 h 52 et 18 h 56 
réflexion échappée belle...






Photos Jacques Desmarais