07 juin 2009

Bagatelle


Chemin faisant, on ne retient rien pour soi comme cela était. Mais il nous reste des impressions à la volée que l’on recrée pour les autres. C’est ainsi, je crois, que cela se passe au-dessus des mers. Je n’insiste pas.


Mesurer la rudesse de mon père traversant la poussière des étés fut la première leçon retenue par la bagatelle de mes yeux. Il tenait solidement la charrue millénaire, sacrant, suant, mettant le feu aux pierres des champs. Traceur de sillons comme avant les poètes. Pour les semences zébrées de tonnerre, chambardées de soleil et de pluie; pour la récolte, contre vents et marées, de quelques lunes apaisantes qui fuiront demain.

Puis viendront les professeurs de silence attelés à la rigueur des mots comme aux rires lointains des framboises. Tous ceux-là m'ont donné une idée de la vie qui bat, mais aussi du joyeux fardeau de la page.

Journées salivaires qui n'en finissent pas. La vie à la campagne où il arrive que les puits se taisent. La vie dans les livres qui passait jadis à la radio et qui ne saurait être seulement l'affaire des anges! Enfin, je n'ai pas de gros bras dans le trafic du jour. Pas de diplômes mirobolant, aucune estrade. Mais je suis rude, en effet, à ma manière, rural par en dedans! La preuve : j'ai toujours la crainte de manquer de bois dans la voix. Je raclerais du murmure s’il fallait seulement espérer.

Le décor de séchoirs et d'épandeurs s'égosille entre les planches de notre vieille galerie universelle. Perdrons-nous mémoire des traces de braises dans le vent? Qu’est-ce que cette aspiration du grand âge à gosser le vocabulaire?

«Je twisterais les mots s’il fallait les twister.»

***


1 commentaire:

Nina louVe a dit...

miam

que c,est bon
d,avoir le tepms
le temps
de lire toi


merci pour cette poésie dear Jack