12 octobre 2010

Monsieur Shawn Cotton

Photo Jacques Desmarais


D'accord, nous sommes en pleine poussière dans la répétition générale. Nous gardons l'oeil ouvert pareil. Le fanal allumé. Pour la tournée à venir. Depuis mes 16-17 ans, depuis la main du bourreau qui finit toujours par pourrir, j'aime ça la poésie. Terre à bois debout, je ne saurais pas dire comment, pourquoi, madame Bertrand. Il se trouve des écritures, c'est bien sûr, qui me touchent plus que d'autres, beaux champs d'avoine éparpillés, pas grave, dans mes restes de trouille emboisée. Elles offrent des tas de planches diurnes qui se démènent pour être parfaitement clouées en plein jour sur une scène improbable. Il y a des craques et des craquelures au mur laissant passer les flèches, courants chauds, frets, avec des voyelles de lumière pour faire plaisir aux filles et aux tilleuls, de l'air libre enrubanné avec de l'accent dans les bocks et des zigzags en paquet de dix en rangées circonflexes. Je suis toujours content quand cela arrive. Je ne sais même pas quoi dire dans ce temps là. Mais il n'y a point de point à la ligne. C'est plus qu'un plaisir, plus qu'une découverte. C'est l'attirance, la naissance, la surprenance, la remembrance, la ouïssance... Pas nécessairement dans cet ordre. C'est la continuité de quelque chose qui me dépasse et qui n'est pourtant pas d'yeux. C'est le raccord avec des noms écrits au début ou à la fin, une personne derrière la ligne et son ascendance, un vers, une personne, un poème, le recueil, un regard surtout. Je ne suis pas tant admirateur de carrière et de miroirs. Je suis juste reconnaissant de croiser parfois sur ma route de campagne ces « décrocheurs d'étoiles » qui vous délivrent quasiment gratuitement la parole.

D'accord, c't'une maladie.

Voilà donc. Hier soir au slam, j'ai rencontré Shawn Cotton que j'ai trouvé excellent. Aujourd'hui, j'ai grappillé son Jonquière LSD (Les éditions de l'Écrou, 2010) qu'il m'a dédicacé avec une citation de Kerouac. J'avais les poches plutôt vides. Je lui dois cinquante cents.


Page 23 :

On avait longtemps rêvé
dans les ventilateurs inutiles et puis je m'étais envolé
par la piste qui passe par le salon ça traînait partout les départs de fêtes et les mois d'amis oubliés
le lendemain j'avais un clou à la place des mains
et qui creusait sous tes manches
pour retrouver le son de ta peau la note de peine imposée






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