15 mai 2012

L'échec de Line Beauchamp


Ressentiment amer! Line Beauchamp démissionne sur la même note, pour ne pas dire le même « mode » que sa gestion du conflit étudiant depuis le tout début. Utilisant le poids de son autorité, elle déclare que « personnellement, en tant que Ministre de l'Éducation, je n'ai jamais réussi à leur faire faire un compromis ». La ligne de commandement de l'autorité politique légitime, on veut bien. Encore faut-il avoir le sens de la culture vivante, le désir de rendre les gens heureux — comme le pensait Montesquieu à propos des lois —, inviter tout le monde à sa table; encore faut-il espérer le sens de l'éthique pour réguler au mieux les comportements sous tension en raison des inévitables conflits de valeurs en jeu dans toute société normale. Or, un compromis ne s'ordonne pas, il se construit par un dialogue (mot charnière de l'éthique) franc et ouvert, soucieux de départager les intérêts de TOUTES LES PARTIES en cause et visant à rassembler, à converger, à sortir du dilemme le cœur plus léger, à tout le moins avec la satisfaction de prendre la meilleure décision possible dans les circonstances données. Dialoguer au lieu de se taper sur la tête, voilà le défi! Tout le contraire de ce qui se passe depuis 14 semaines!

La culture au Québec comme ailleurs a changé. La jeunesse du monde entier en témoigne de façon marquée, surtout depuis la crise de 2008. Mais voici un gouvernement usé et sans-génie, comme le signale Chantal Hébert, comme si nous étions 30 ans en arrière. C'est assurément un gouvernement à battre à plates coutures aux urnes. Mais en attendant cette joute, il est à mon avis certain que ces élites en place qui réduisent tout à l'économisme vont tout faire pour que leur bras politique traditionnel conserve le pouvoir, dont celui d'écrire les lois, de les faire trancher par le juridique, de les faire appliquer au besoin par la force, comme on le voit tristement tous les jours aux nouvelles télévisées. Le juridique a ses limites, comme le souligne Georges A. Legault, professeur émérite de l'Université de Sherbrooke; le juridique dit la loi, tranche, coupe parfois la poire en deux, régule, mais il ne règle pas les conflits à leurs sources. On est loin du dialogue et de la médiation, termes qui de toute évidence ne sont pas dans le lexique de Line Beauchamp, ni dans celui du gouvernement qu'elle quitte. Et au lieu de s'en expliquer, elle aura tout fait et jusqu'au dernier filament de fiel de ses propos pour imposer son autorité espérant provoquer « un électrochoc », comprendre, ramener à la raison ces chefs étudiants impassibles et fous!

Nous sommes dorénavant dramatiquement avertis par le Premier ministre qui sort rarement de son légalisme à courte mèche mouillée « que la limite est atteinte ». Quel est le sens de cet avertissement, de cette menace en fait? Mâter par de force « s’il le faut » le mouvement étudiant qui aux yeux de Jean Charest est un groupuscule? Loi spéciale? Déviarger encore plus le climat pour vaincre le péril jeune en campagne électorale? Je n'espère surtout pas le pire!

M'est avis qu'il va falloir de toute façon user d'une lucidité vive comme l'éclair, lucidité qui n'a pas tout à fait le même sens que celui des Lucides à grands toupets. Disons : lucidité et unité.

2 commentaires:

Mario Cholette a dit...

J'aime ton texte, il est réfléchi et posé.

Jack a dit...

Salut Mario! Merci.