23 juillet 2014

La Frenière au Jardin


À Saint-Ferdinand, P.Q., en ces Appalaches qui résonnent Bois-Francs, il y a deux Soleils en attraction, l'un s'appelle Mondor, l'autre Séguin, et il faut savoir qu'un bon matin de 1975 ils se sont levés à l'unisson avec le désir d'insuffler nord-est, avec un bec verseur creusant sillons à l'orée d'une cascade de collines chantantes aux accents irlandais, quelque chose comme un petit paradis. Généreux à la volée en mains, en sueur, en imagination, en parcours divers à travers la Terre, leur rêve amoureux une fois tressé est devenu fleurs, cailloux, lumière. C'est Le jardin de vos rêves qu'a revisité dernièrement avec ses mots d'oiseau parfois blessé l'ami Jean-Marc La Frenière.     

Photo Jo.  Rencontre avec La Frenière au Jardin de vos rêves le 25 juin 2010.

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Au jardin, texte de Jean-Marc publié sur son blogue le 22 juillet 2014.

À Sonia Mondor et Pierre Séguin

Même en plein soleil, un orage cogne dans ma tête. Il voyage des neurones jusqu’au fin bout des doigts, ceux de la main avec laquelle j’écris. En panne d’espérance, en manque de mots, je me retire de l’idiotie des jours. Je parcours un immense jardin. J’ouvre la fenêtre des yeux pour accueillir les sons, les images, les fées. Un petit vent se lève et les arbres sourient sous la caresse des feuilles. La pensée s’accroche à la beauté des fleurs, l’intelligence des racines, le miracle d’être là, tous les sens aux aguets. J’avance vers la lumière, de la rosée sur les chevilles, la barbe pleine de temps, les oreilles grandes ouvertes dans le chant des cigales. Sur le blanc d’un carnet, j’accueille des insectes, les ailes des odeurs, les petits pas de l’herbe, le toussotement des grives, toute une vie souterraine. Sous l’arche végétale, un restant d’ombre se traîne sur une patte. Des gnomes se balancent sur une échelle de corde. Deux silhouettes de femme s’étreignent dans le vent. Elles dansent au bord de l’invisible. Les mots s’ébrouent près d’une vieille brouette. Les parenthèses se mêlent aux outils de jardin. Entre deux ombres où fleurissent les heures, le soleil bondit sur la poitrine du jour. Je parcours les sentiers sur la pointe d’un crayon. J’apprends à lire des phrases dans les feuilles géantes, à déchiffrer le monde, à déchirer la nuit, à respirer la vie. Sous la peau de la terre, des veines courent partout, portant la sève de l’âme jusqu’à la chlorophylle. C’est une communion. Deux jardiniers grattent la terre, la nettoient, l’embellissent. C’est comme laver la vie. La beauté luit dans les couleurs de l’herbe, les odeurs de l’arbre, les saveurs de l’eau. C’est au jardin qu’on empoigne le monde, qu’on embrasse la vie. Le moindre insecte nous fait la courte échelle. Le jardin est un monde où survit l'espérance. Pourquoi chercher ailleurs ? La nature tient toujours ses promesses.

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