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Le 4 décembre, à l'initiative de Québec solidaire, et suite à un travail remarquable du Cercle des femmes parlementaires, mettant de côté les ambitions partisanes et les luttes politiques, les 33 députées de tous les partis de l'Assemblée nationale ont uni leurs voix et leurs larmes pour commémorer le 25e anniversaire de la tuerie de Polytechnique.
Pour rappeler que Geneviève, Hélène, Nathalie, Barbara, Anne-Marie, Maud, Sonia, Annie, Barbara, Maryse, Anne-Marie, Annie, Michèle et Maryse ne sont pas mortes dans la fleur de l'âge pour rien et qu'elles sont encore vivantes dans nos mémoires. Cette commémoration touchante rendait aussi hommage à toutes les femmes victimes de violence, au Québec et ailleurs.
L'annonce de la tragédie de Polytechnique a créé une onde de choc sur le Québec que nous connaissions en 1989. Nous sommes des milliers à nous rappeler exactement ce que nous faisions il y a 25 ans jour pour jour, vers 16 h. J'étais avec mon fils de 9 ans, je préparais le souper. Quelle stupeur! Il m'a fallu plusieurs heures avant de réaliser l'ampleur du drame, des mois à m'en remettre. Comme tant d'autres femmes, j'ai été en deuil.
En deuil de ces 14 jeunes femmes, bien sûr, et en deuil de l'illusion, à l'époque, que le Québec tout entier était féministe.
Dès le lendemain du drame, plusieurs ont qualifié l'événement d'acte isolé, posé par un homme égaré. Pourtant, Marc Lépine avait ciblé uniquement des femmes. Les féministes ont été les premières à tenir un discours différent. À l'époque, j'étais coordonnatrice de l'R des centres de femmes du Québec, regroupant une centaine de centres dans toutes les régions. Le 7 décembre, j'étais aux côtés de ces groupes pour essayer de comprendre, d'expliquer l'inadmissible.
Aujourd'hui, il semble plus facile de reconnaitre que le geste de Marc Lépine, dans son extrémisme, représentait une misogynie ambiante dans une fraction de la société québécoise à l'égard des femmes. Il faut se rappeler la confusion qui régnait alors: c'était difficile d'admettre ces choses-là.
Beaucoup de chemin a été parcouru en 25 ans. De nouvelles lois et politiques promouvant l'égalité entre les femmes et les hommes ont été adoptées. Pensons à la loi sur l'équité salariale, à la création des CPE, du Régime québécois d'assurance parentale, et surtout, à la création du registre des armes à feu, quelques années après le drame. Malgré cela, il est difficile de célébrer.
Près de 1500 femmes ont été assassinées par un conjoint ou un ex-conjoint au Québec depuis 25 ans. Plus de 1000 femmes autochtones ont disparu ou ont été assassinées au Canada depuis ce temps. Le registre des armes à feu a été démantelé par le gouvernement conservateur, détruisant un outil essentiel dans la lutte contre la violence envers les femmes. Le gouvernement du Québec a réussi à conserver les données québécoises de ce registre, mais au prix d'une bataille juridique qui n'est pas terminée. Et plus près de nous, cet automne, un nombre stupéfiant de femmes, et parfois d'hommes, ont fracassé le silence en révélant avoir été victimes de harcèlement et d'agressions à caractère sexuel. Ces personnes, connues ou non, se sont levées pour dire « moi aussi », refusant désormais de vivre dans le silence.
Comme en 1989, le Québec découvre que l'image qu'il a de lui-même n'est pas tout à fait juste. Cette fois, et c'est la preuve que nous avons appris, nous acceptons de faire face à nos démons. Si tant de nos sœurs et de nos frères ont choisi le silence pendant si longtemps, c'est qu'il y a un problème. C'est pourquoi, suite au travail de pression des groupes de femmes et avec l'appui de tous les partis politiques, le gouvernement du Québec tiendra cet hiver une commission parlementaire et un forum itinérant sur les violences sexuelles. Ce sera l'occasion de parler, de débattre! Car il faut trouver des solutions, ensemble, à la violence sexiste. Nous avancerons!
Le premier ministre du Québec s'est engagé lors de la commémoration de l'Assemblée nationale à créer un registre québécois des armes à feu. Attention! Dès le lendemain, il apportait des bémols, affirmant que nous aurions le registre que nous serons en mesure de payer. Je serai de celles et de ceux qui suivront tout cela de très près, refusant de reculer en cette matière puisque le consensus québécois est formel: nous voulons un registre efficace!
En terminant, j'aimerais vous inviter à visionner la vidéo de la commémoration que Québec solidaire a tenue lors de son Conseil national de la semaine dernière, réunissant plus de 200 personnes.
C'est avec Sylvie Haviernik, sœur de Maud tuée il y a 25 ans, que j'ai pris la parole pour rappeler ce drame, mais aussi lancer un message d'espoir, rappelant que nous avons la responsabilité collective d'agir contre toutes les violences qui blessent les femmes et aussi les hommes. Et surtout, pour que nous effacions le nom du tueur de nos mémoires et que nous nous rappelions plutôt de ceux de Geneviève, Hélène, Nathalie, Barbara, Anne-Marie, Maud, Sonia, Annie, Barbara, Maryse, Anne-Marie, Annie, Michèle et Maryse.
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