Triste d'apprendre le décès d'Éric Volant à Montréal le 9 septembre dernier, un professeur en éthique (Les morales et leurs sources, UQAM, 1985) que j'ai aimé. Celui qui jeune étudiant avait tout lu Nietzsche était au plus haut point soucieux de la responsabilité de celui qui parle dans la cité. Car la prise de parole est un pouvoir et toute énonciation comporte des jugements de valeur. (C'est bien sûr le cas au carré quand on énonce de l'implicite volontaire et populiste du genre Parce que nos valeurs, on y croit!)
« Un des grands défis contemporains, écrivait Éric Volant, c'est le perfectionnement de la communication pour parvenir à des décisions morales qui soient l'oeuvre commune de groupes opposés. » Par ceci, il rappelle avec à-propos que les préférences sur le terrain des valeurs sont de l'ordre de la négociation circonstancielle et toujours provisoire, du dialogue, le maître mot en éthique appliquée, dirait-on de nos jours. Pourquoi donc? Parce que le relativisme où tout se vaut au milieu de la marre de nos dilemmes est au fond une illusion assez pernicieuse, mais d'autre part, et cela me semble essentiel à discuter : « Nous ne pouvons imposer à autrui une valeur ou un comportement comme nécessaires ou évidents. Ce qui n'enlève pas pour autant la responsabilité morale [dans le lexique de M. Volant morale et éthique sont synonymes], de nos choix. » Des Morales, Crises et impératifs (Éd. Paulines, 1985).
Éric Volant était un professeur rigoureux qui a animé jusqu'au printemps dernier le groupe FB Mort en Variations. Sa réflexion de longue haleine sur le suicide est profonde. Enfin, je dirais que cet amoureux des grands Maîtres en peinture était très doucement aiguillonné par la vie et l'aventure partagée de la sagesse, cette « discipline du coeur [...] qui permet l'accès à des façons de penser multiples et opposées » (Humain, trop humain I).
Je me promets de lire son beau livre La maison de l'éthique (Liber 2003), dans lequel la maison est vue comme méthaphore de l'être-là, l'être de finitude qui habite la terre. La question fondamentale n'est pas qui suis-je? ou qui es-tu?, mais plutôt où suis-je? et où es-tu? D'où parles-tu? Où loges-tu? Où vas-tu?
Site l'Encyclopédie de la mort
Conférence Comment habiter et cohabiter ce monde, Uqam, mai 2010
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