«En plein milieu d'un rêve exceptionnel
Caressé par Vénus
Bercé par le Père Noël
Brrrr la réalité
Brrrr »
- Jean-Pierre Ferland, La réalité
Jeudi, retour sans parachute d'un congé sidéral où j'ai joué dans la terre. Trois urgences ont les pieds enflés sur mon bureau. Bah! Minute! Longue pause avec mes camarades attitrés. Y. vient prendre de mes nouvelles. Il s'inquiétait. Sa sollicitude me touche. J'ai les bras ensoleillés et pleins de grafignes. J'ai joué de la hache à travers les branches loin dans ma cambrousse. Dix heures trente-huit: merda! J'ai oublié le rendez-vous à la demie pour mon évaluation de rendement annuelle! La salle Abitibi??? C'est à l'autre bout du corridor! Où est mon dossier, calvaire? On vient me chercher avec petite fureur dans les yeux. Je sors de cette rencontre à midi avec deux nouvelles actions sur les bras à faire tu suite! Je passe en vitesse à la cafétéria à 13 h chercher un lunch que je bouffe sur le pouce à mon bureau. J'ai même pas faim. Et bref, ça scalpe vite en maudit mon petit bronzage frais émoulu, ma belle sûreté de gars dispos. Puis les fils de la machinerie se recomposent comme les réflexes du chien de Pavlov dans cette tête que je ne portais plus depuis sept jours. Je décline avec regret l'expresso de trois heures que JDM et moi prenons habituellement en vitesse chez Juliette, avec Juliette. Réunion impromptue à 16 h à mon poste! Ça décale d'autant la rédaction du projet qu'on m'avait demandée pour 11 h ce matin! Aux gars de la section qui quittent, je dis : les Canadiens vont l'emporter ce soir. Pouah!, réplique Nico, vous allez avoir un pied dans la tombe! Je bosserai intensivement jusqu'à 19 h passé. À la fin, j'ouvre quelques-uns des 84 courriels accumulés. Ah! Il y a celui de Stef. reçu la veille qui rappelle que c'est MAINTENANT le souper de départ à la retraite de l'ami et collègue Ducharme? Heureusement que je l'ai vu! Je croyais que c'était le 25. Mon bureau est un bordel. Je range tout ce qui est « protégé ». Tant pis pour le match, je file tout de go au resto grec rejoindre mes collègues. Je n'ai pas un sous qui m'adore dans les poches. En mettant le pied au Carré St-Louis qui n'est pas carré, je pense au roman de Mistral. Je salue Émile en passant. Je croise Vic Vogel, on se dit allô, il est de très bonne humeur! À défaut de vin, j'achète deux St-Ambroise au dépanneur avec ma carte de crédit. Ducharme est vraiment content de me voir. Je donne un bec en pincette à la belle Hé! Je l'ai fait pleurer trois fois en parlant du devenir soi. « Deviens qui tu es ». Oui! Oui!, dit-elle. J'adore cette fille aux cheveux immaculés. En cognant tigne tigne tigne avec une cuillère sur un verre, Mario le kid communique à point nommé les résultats du Canadien. Yé! YÉ! Je quitte la Cabane grecque le cœur léger vers les 22 h. Sous la demi-lune un peu cantée au-dessus de la rue St-Denis, manifestement de bonne humeur elle aussi, cris, klaxons, claquements des petits drapeaux accrochés aux chars des valeureux partisans confirment la victoire écrasante! Je pense à Nico! Je me retrouve au métro entouré par des cohortes de bleu-blanc-rouge encore suintant l'exubérance des gradins du Centre Bell. J'en ai interviewé un qui m'a raconté l'ambiance, donné quelques faits saillants; puis j'ai dit à un autre avec le fer à cheval peinturluré dans la face : ça va te faire de la peine de te débarbouiller tout à l'heure? Pas grave, je vais recommencer à la prochaine partie! Il faut qu'une émotion collective zèbre parfois cette ville pour que tombe le quant-à-soi des voyageurs qui ordinairement ne s'adressent pas la parole dans le métro. Mais il faut bien reprendre l'ordinaire chemin du retour à la maison. Je plonge dans ma lecture. Les Bienveillantes. La guerre continue. Tiens, le tilleul dans la cour est en fleurs.
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