24 juin 2010

La Saint-Gens du pays ou le métier à tisser

Je l'ai constaté souventes fois ces derniers temps, lorsque mes camarades de travail créent une petite surprise en entourant le bureau d'un collègue dont c'est l'anniversaire, ou bien encore parmi les échos des voisins du quartier réunis pour un des leurs, le
« HappyBirthday » est revenu au galop au palmarès des gentillesses. Je ne moralise pas. Je le constate. Le peuple peut bien chanter ce qui lui plaît. Mais nous savons depuis Gramsci que ce qui plaît spontanément peut aussi être un effet béton de l'idéologie « dominante ».

Je craignais pour ma part qu'on ne se souvienne déjà plus que la chanson Gens du pays qui émergea sur la montagne il y a 35 ans (j'y étais) fut un coup de poésie imprévisible, inespéré, tout simplement révolutionnaire. Il est donc heureux qu'en ce 24 juin 2010 cette étonnante chanson populaire et son auteur — qui lui n'est jamais tout à fait à la mode, comme le note si bien Josée Boileau dans Le Devoir d'hier —, soient à nouveau au cœur de la Fête nationale.

Je cite de mémoire, peut-être tout croche, je cite pour mémoire Chanson pour Bob Dylan qui est à elle seule un manifeste pour la poésie enracinée avec les chênes et les fonds de montagnes : « Quel est donc ce langage qui fait que je t'entends, qui fait que je t'attends comme animal en cage (...) dans la prison des mots qui nous désappareillent (...) C'est la voix du premier poète dont il reste un lointain écho au petit clocher de nos têtes, ah! la musique que vous faites camarades jargon d'argot qui chantez chinois dans vos fêtes (...) »

Gilles Vigneault, grand cerf-volant géographe de l'amour, a dit un jour : « La mort a tant de synonymes ». Semer des graines de chansons qui ensoleillent et décolonialisent les fêtes intimes et collectives de ce pays, c'est un sacré beau métier.

Discographie de Vigneault.


2 commentaires:

Nicolas Comtois a dit...

Tamiser la lie du pays. Le lier à sa terre en le modelant de son eau douce. Souffler soi-même le Nord venteux et le goût des baies surettes. Oui. Beau métier à Vigneault.

Jack a dit...

Tamiser la lie tam di li dam...

C'est très beau, Nicolas.