28 novembre 2011

Paysans du monde entier... unissez-vous!

Je me souviens d'une conversation avec R., un enfant voisin en cambrousse quand nous avions, guère plus, une dizaine d'années. Nous étions dans le bois, je crois que nos pères travaillaient ensemble ce jour-là. Notre échange portait sur la faim dans le monde. Je le dis comme je le pense,  jeunes flots, fils de cultivateurs depuis des générations, nous éprouvions de façon nette, avec il est vrai un brin de chevalerie, ce qu'est le drame de la faim dans le monde.  Nous avions conscience que ce drame humain incompréhensible concerne au premier chef le cultivateur dans sa vocation profonde, soit : nourrir le monde.

Il y a quelques années déjà, mon cousin Mario Desmarais a réalisé un documentaire des plus renversants intitulé La guerre alimentaire. D'une manière très étoffée cette fois  les faits qui sautent à la gorge du drame des drames sont ici illustrés sur la pellicule à partir de l'Irak (berceau de l'agriculture), de l'Inde avec le riz, au Madagascar avec les pêches, au Brésil avec la concentration des terres, aux États-Unis avec Mosento, etc.  Encore ici, le sentiment rural animait au plus profond la démarche du réalisateur qui a dédia son film (narré par Geneviève Bujold) à son père qui fut aussi un homme de la terre pendant une période de sa vie.

 De son côté Jean Ziegler vient de publier Destruction massive  (Seuil) et il a donné aujourd'hui une interview à Radio-can à l'émission Bien dans votre assiette.  L'auteur repose dans toute son ampleur et son désastre politique la contradiction principale de notre temps. Vu globalement, au stade actuel du capitalisme monopolistique, nous sommes en effet comme jamais auparavant dans l'histoire de l'humanité en mesure de produire des richesses considérables, et ce, dans tous les domaines d'activités.  C'est vrai également pour l'industrie agroalimentaire. Malgré un gaspillage énorme, la domination de la mal-bouffe et l'acculturation galopante des capacités de bien se nourrir (notamment en cuisinant soi-même), on estime que nous avons à l'heure présente la potentialité de nourrir 12 milliards de personnes sur la Planète bleue.  Or, demeure cette question de mort : toutes les cinq secondes, une personne crève littéralement de la faim.  35 millions par années, soit la moitié de tous les décès sur la terre!  

C'est en effet massif et l'indignation profonde, viscérale, elle se trouve là.   C'est-à-dire dans le dumping des produits agricoles des pays riches qui brisent les marchés locaux et la vie de milliers de ruraux traditionnels, dans la spéculation à la bourse des denrées de base qui font dramatiquement augmenter les prix (mais, blé...), spéculation refuge des cowboys du fric qui a pris de l'ampleur depuis la crise financière de 2008, dans le vol des terres par des monopoles étrangers qui font de la monoculture et après moi, le déluge, dans l'utilisation massive des récoltes (Brésil, USA) pour faire des agrocarburants... (Pourquoi meurt-on de faim?

En un mot comme en mille, une large partie du problème de la faim est « alimentée » par les choix économiques imposés par les puissants. Jean Ziegler a donc le mérite de systématiser les faits épars de la production mondiale des aliments dans un cadre économique inhumain qui n'hésite pas à scraper du monde pour le profit de la piastre de quelques futés qui se pensent seuls sur l'île de la liberté individuelle de commercer.  

Ziegler voit un signe d'espoir dans la solidarité internationale des unions paysannes et la révolte qui gronde en Afrique notamment.  Mais une frange importante des Paysans sont de sortie, pour employer le titre d'un ouvrage de l'ami Jean-Paul Damaggio.  Il faudra beaucoup plus que les habitants! Il faudra trouver le moyen de canaliser l'action des urbains autant que celles ruraux par l'éducation, par la culture, par le refus net de laisser mourir une partie de l'humanité.

Paysans de Paris, de Montréal...

Qu'en pense notre premier ministre à l'esprit si sensible au point de faire du bénévolat pour trouver des familles d'accueil aux chiens et chats abandonnés de ce beau Canada de l'Ouest, grenier du monde?


  

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