10 décembre 2015

L'inoubliable dépassé



La vie. Le cercle de l’arbre. La vie spiralée à la campagne où il arrivait que les puits se taisent en ces journées salivaires de grandes chaleurs qui n'en finissent pas. Ça va finir! Les saisons s’entretiennent les unes les autres, se succèdent en poupées russes invisibles, remuant parfois le radical palimpseste, l’insupportable en filigrane, bardassent sans cesse le sol raviné aux mille sexes assoiffés qui germent et germinent sous le Soleil de la Terre. Enfin une pluie battante à l'horizon! Mais voici venir déjà l’automne. La prévision ultime. En ce temps-là, Doloré, mon père, faisait de la conjugaison au champ avec son cheval le plus musclé, ou le moins têtu, attelé, maniant de ses bras veinés la charrue, jurant, suant, mettant le feu aux pierres qui jaillissent et roulent sous le socle. Traceur de sillons pour amadouer le ventre. Allers-retours comme les vers d’un vaste poème masculin dans la signature éphémère et bouleversante des êtres. Penser à plus tard avant le gel. Semer en mai. Espérer le bon vent. Silence. La douceur. La luisance d'un calme dimanche.
Mesurer la rudesse traversant la poussière des travaux et les jours fut la première leçon aratoire retenue par la bagatelle de mes yeux. Ruralité sonore, comme rivière millénaire. À l’air libre. Si concrètement portageuse. L'inoubliable dépassé. 
Et voilà l'art de l’enfance de l’art comme révélée.

2 commentaires:

Anonyme a dit...

Merveille et Force
la circonférence du grand pin
la voix de Billie Holyday
chantant Strange Fruit …
vos propositions souvent accrochent
bouleversent
ce matin
Comme vous savez dire
Après avoir engranger
Pour qui a touché du doigt
Nous voilà tapis
Silencieux, les yeux posés
Sur les mots porteurs
contant, célébrant
la vie devenue si fragile
en l’instant présent
débandade quotidienne, déboussolé
votre prose transporte, console
elle appelle
une prise de parole
à slamer haut et fort
une mise en mouvement
à arpenter les routes
à mettre le nez dehors
à refuser
à inventer les minutes
essayer d’éclabousser
nos vies désenfantées
merci

Anneaux Nîmes

Jack a dit...

C'est vraiment trop touchant, Anneaux Nîmes. Ça ne peut pas rester enfermé, ces bons mots. J'aime beaucoup « nos vies désenfantées».