31 décembre 2016

Paix & Amour!

Paix & Amour! 
Pis y vont voère 
de quel bois
on se chauffe!

Photo Jacques Desmarais, Cambrousse, 17 décembre 2016.

Un saut à La Veillée de l'avant-veille

Ce n'était pas planifié pantoute, mais voici qu'en début de soirée hier soir, il s'est adonné que je passe devant le Métropolis. Ni un, ni deux, au lieu d'aller fourvoyer le petit pitou triste en moi, je me suis retrouvé, ravi, ébahi en plein coeur de La Veillée de l'avant-Veille insufflée par Le Vent du Nord pour la 20e année d'affilée. J'ai bien fait en diable. La Bottine souriante grand format était à l'honneur : Manon Massé leur a remis la médaille de l'Assemblée nationale. S'en est suivi un set époustouflant. Après? Après, l'oiseau est sorti de la cage, crochet droit, crochet gauche, voir 1000 personnes tout sourire balancer, danser en même temps de vieilles danses et contredanses anglaises en suivant la syncope savante du câlleur Jean-François Berthiaume, c'est spectaculaire en grand! On ne danse pas assez au Québec alors que c'est la joie de vivre! Bonne Année grand nez!

30 décembre 2016

Pierre Barouh : Le courage d'aimer

Le courage d'aimer

« Non, je n'ai plus le goût de me flatter moi-même
En cherchant ardemment l'écho de mon je t'aime
Non, je n'ai plus le cœur à déchirer mon cœur
En parodiant des jeux que je connais par cœur
Non, je ne veux plus croire en cette mascarade
Où plus faible est celui qui connaît la parade
J'ai trop mimé ces gestes qu'il faut sublimer
Je n'aurai plus jamais le courage d'aimer
Toi qui m'offres aujourd'hui le plus beau des spectacles
Avec tant de beauté, tu pouvais faire obstacle
À cette lassitude dans mon cœur tout autour
Car je ne le fuis pas, je l'aime bien l'amour
Mais je ne vois plus rien de tout son beau mystère
J'ai peur qu'il ne soit rien que je craigne ou espère
Car malgré tout le rêve en mon âme enfermé
Je n'aurai plus jamais le courage d'aimer
Pourtant si tu voulais, si tu prenais patience
Avec toi je pourrais retrouver l'insouciance
Cette manie que j'ai de conjuguer l'amour
Se tournant à nouveau au futur de mes jours
Alors me reviendraient du fond de mon enfance
Les élans, les frissons des amours sans défense
Sans lesquels il m'est impossible d'espérer 

Retrouver à jamais le courage d'aimer (bis).»

28 décembre 2016

Rose ciel au point vernal

Photo Jacques Desmarais, Béthanie, 26 décembre 2016.

Lundi, 7 h 12, 
furtivement
entre les branches
de l'érable siamois
transplanté bébé
de ma main,
roseraies matinales
liqueur de ciel
un peu gris bleu cendré
comme larron en foire
un instant au-delà
du point vernal
c'est à jamais
plein feu
je prends l'air
doucement
avant de rentrer
le bois.


Lettre à Michel Chartrand de sa fille Suzanne

C'est à mes yeux le plus beau texte politique québécois, le plus complet, le plus rassembleur de cette fin d'année 2016 : Suzanne-G Chartrand, Lettre à Michel Chartrand, Le Devoir, 20 décembre 2016.




Lettre à Michel Chartrand

Michel Chartrand, en 2006
Photo: Jacques Grenier Archives Le DevoirMichel Chartrand, en 2006
Mon cher Michel, en février 1971, de prison, tu m’écrivais une très belle lettre. Je te réponds aujourd’hui en guise de cadeau pour tes 100 ans.
 
Tout l’automne, j’ai passé mes journées avec toi, belle façon de vivre mon deuil, de laisser émerger la sérénité à travers la tristesse. Les Innus disent qu’un être ne meurt jamais, qu’il vit dans le coeur et la pensée des autres. Grâce à mon petit livre hommage (À bas les tueurs d’oiseaux ! Michel Chartrand — Témoignages et réflexions sur son parcours militant, Éditions Trois-Pistoles) fait avec la complicité de ton vieux pote Jean Gladu, alias Leonardo, des centaines de personnes ont vibré à tes pensées, au rappel de tes actions, à l’évocation de tes valeurs, à ton espoir. Bonheur, beauté, dignité, démocratie, solidarité, socialisme…
 
Depuis que tu as quitté cette terre, il y a six ans, il s’en est passé des choses. Mobilisation sans précédent de la population pour soutenir le mouvement des étudiants qui, à partir d’une revendication simple, a réussi à canaliser les énergies contre les politiques néolibérales, dites d’austérité. Mais, toi, tu aurais compris qu’il s’agissait de bien plus que des mesures d’austérité budgétaire : le projet de nos gouvernements est de détruire les acquis sociaux arrachés par les mouvements syndical et populaire, de liquider ce qu’il reste de l’État « providence ». Comme tu l’avais constaté en 1968, cette fois encore, les jeunes ont réussi à mobiliser les moins jeunes et les personnes âgées. Tous marchaient ensemble dans les rues. Le 22 avril 2012, nous étions 250 000 à célébrer nos luttes, nos espoirs et notre Terre, formant un gigantesque arbre dans le parc Jeanne-Mance, à Montréal.
 
Indignation
 
En 1995, tu te disais profondément honteux que toi et les Québécois blancs ayez mis autant de temps à prendre conscience que ta ville, Montréal, était en territoire mohawk, que nous étions encore ignorants et insensibles à ce que vivaient nos soeurs et nos frères des nations et communautés amérindiennes dont nous occupions les terres. Idle No More, Wapikoni mobile, Présence autochtone et mille et une actions témoignent aujourd’hui de la détermination des Premiers Peuples d’être enfin respectés et de faire reconnaître leurs droits. On apprend enfin à les connaître et on commence à les respecter.
 
Toi qui as toujours vilipendé les guerres impérialistes et les coups d’État qui établissent des dictatures politiques (ou économiques) ; là où les peuples menacent le système d’exploitation et d’oppression, tu serais profondément meurtri par le carnage au Moyen-Orient organisé et entretenu par les grandes puissances qui alimentent les mouvements islamistes et xénophobes tous azimuts.
 
Mais tu aurais été heureux d’apprendre qu’une large coalition d’une gauche démocratique qui veut prendre les choses en main et convertir l’indignation en changement politique, Podemos, participe à la direction de plusieurs grandes villes espagnoles ; ce n’est qu’une partie du pouvoir, certes, mais cela permet d’améliorer sérieusement la vie des gens au quotidien, de faire de l’éducation politique et que tous, ensemble, grugent le pouvoir et expérimentent de nouvelles formes de démocratie.
 
Même le peuple chilien, dont tu as tant admiré l’imagination et le courage, se lève et des dizaines de milliers de jeunes ont déferlé comme les vagues du Pacifique à Santiago. Tu avais bien raison, vieux sage, il faut garder confiance dans la jeunesse et dans sa capacité de révolte.
 
Terre-Mère
 
Plus encore qu’hier, il nous faut prendre conscience qu’on ne peut plus vivre sans penser aux conséquences de nos actes, qu’on doit se mobiliser et convaincre que seules les luttes pourront limiter la barbarie : destruction de l’écosystème, des villes et villages, pillage légal et illégal des ressources, assassinats, génocides…
 
La Terre-Mère est à un point de non-retour. On l’a détruite et on continue, entre autres par l’exploitation minière et des énergies fossiles. Air, sol, eau, tout est en danger. Seules des mobilisations massives, et à l’échelle de la planète, pourront stopper l’inévitable, car le futur est maintenant.
 
Tu as fait ce que tu devais faire ; ta fille Hélène ajouterait que tu n’as fait que ton devoir. À nous de poursuivre. Nous, que tu surnommais souvent les « glorified slaves »mus par le désir de consommer davantage, de faire carrière, de se replier sur soi…
 
Tu disais qu’il y avait des coups de pied au cul qui se perdaient, nous en aurions bien besoin pour nous secouer un peu plus. Non seulement il faut faire plus, mais aussi autrement. Dans des médias alternatifs et dans Le Devoir, des voix se lèvent, argumentent et disent qu’il faut reconstruire le système de l’éducation, que c’est par l’instruction que les jeunes se socialiseront et découvriront la solidarité ; qu’il n’y a pas de santé publique sans prendre en considération les facteurs sociaux qui affectent la santé ; que 15 $ l’heure est une question de dignité ; qu’on ne construira jamais un pays sans les peuples et nations autochtones. Tu vois, on continue et tu nous inspires encore.
 
Tu as toujours prétendu que tu n’avais pas de leçons à nous donner, mais il demeure que plus on te connaît, plus ton exemple nous aide à avancer vers plus d’humanité et de démocratie.
 
Je te salue, vieux frère et mon cher petit papa.

27 décembre 2016

Marche de Noël


Photo Jacques Desmarais, Béthanie, 25 décembre 2016. 
Sur la ligne d'eau,
le long du chemin
des vaches,
des yeux calés
et tout l'Harfand
dans la neige
puis au-devant,
verge
d'or
allumée
seule
en trois
personnes
comme
un seul
homme;


Photo Jacques Desmarais, Béthanie, 25 décembre 2016. 

graminées
des fossés
qui savent tout ça
jouant de l'épée
sur la crête
comme filles
remuantes
au soleil
qui dwindligne.

Merci pareil
petit papa Noël.







21 décembre 2016

Tout le monde en parle


Ainsi, tout le monde en parle.
" Les non contemporains constituent le contraire de la masse des spectateurs qui sont assis dans l'arène et qui hurlent. [...]
Intempestivité - Unzeitmässigkeit. Il y a du non contemporain bien avant l'homme. Il y a du non contemporain dans la nature, dans la naissance de tous les vivipares. Le printemps est le Non contemporain en acte. [...]
Son contraire est " l'esprit du temps ", la tempestivitas, la contemporanéité excessive, le change quant à la monnaie, la mode quant au commerce, l'opportunisme quant à la politique. L'extrême synchronisation sociale fait le colportage du journalisme, propose les spectacles, domine les jugements, informe l'opinion. L'esprit du temps convoque les publicitaires, les " principaux acteurs du marché ", les " personnalités qui font l'actualité ", instille les éléments du langage, enfle l'approbation générale, surajoute le " look " au visible [...], la tendance qui se profile au temps qui passe, le vote démocratique au suffrage universel de la clameur. "
- Pascal Quignard, Critique du jugement, Galilée, 2015 p. 85.

Tableau d'hiver

Photo Jacques Desmarais, Béthanie, 18 décembre 2016.



Mon tableau d'hiver, ma tendresse, mon beau jardin underground qui se ramure en silence, branches de mélèze, c'est moi tout copié au petit trot, les sapins, l'érable, les rosiers sauvages, les boules de neige,la talle de lys oranges, les potentilles, les fraisiers, le nid d'oiseau, c'est moi aussi mon âme; le cerisier indien, c'est le vent, le chêne c'est Gervais, l'étable c'est le père William; il ne manque plus que toi mes beaux grands yeux clairs, mon amour, ce sont mes larmes. Let it snow, let it snow, let it snow.

15 décembre 2016

Bonnes nouvelles


Pourtant, maudit, pourtant! Même en mes humbles champs...
« Les nouvelles du front plutôt que les oiseaux ou les ruisseaux. Les articles nécrologiques plutôt que la montagne ou les arbres. »
— Pascal Quignard, Critique du jugement, Galilée, 2015, page 63.



Photo JD., Béthanie, 11 décembre 2016.



07 décembre 2016

Le goût du pays de Francis Legault


C'est pas mêlant, c'est un chef-d'œuvre, un chef-lieu, un moi tout craché, un sirop de calmant de bon film politique. Il est vrai que je suis vendu depuis toujours aux boquettes, chalumeaux, transsubstantiation... 

Jamais printemps québécois ne fut aussi magnifiquement mis en images et avec autant de résonances. Ça fait pleurer Madeleine et le Coco de sucre surtout a coulé abondamment. Excusez-là. 

Merci Francis Legault! C'est ce qui s'appelle avoir fait une grande tournée. Magnifique!

Legault : « J'ai voulu faire un portrait de société à travers un rituel. J'espère pouvoir le présenter à l'étranger, car c'est un beau portrait de nous. »


Un portrait au sirop d'érable

05 décembre 2016

La roze en l'air

(Photo JD., Béthanie, 4 décembre 2016).


point de fuite qui dodeline
en cerf-volant
oiseau bleu et blanc
sur la tête fine
des cèdres
des baumiers
et penche un peu en rêve
se pique le rétif

rase quasiment
vers les grands pins

la roze en l'air
des chevreuils peureux
bardés de secrets
telluriques





Contre les mauvais dire

Voici mon premier mausolée pour le fond de la nuit, disait l'auditeur satrape à son maître. 
— C'est un peu charivari tout autour! 
Non, maître, c'est la vieille sucrerie un peu en démanche, certes, c'est le chagrin, c'est comme ça, ce sont les valses, puis la solitude, les saisons manquées, les mauvais dire, les vents, la grêle, les bêtes, l'oubli. Pourquoi s'en faire s'il s'agit ici de gésir sans plus jamais révérence? Mon maître, ne voyez-vous pas le lutin au sapin de lumière?


03 décembre 2016

Tu mimes-tu?


Photo Pascale Coupal.

Lignes cruelles

lignes 
de coeur 
de vie 
qui se jettent 
tête première
dans le grand M
« il y a beau temps
il y a bel âge »
les étoiles de neige
les étoiles de mer
de grâce de ma main

les étoiles inaccessibles ℑ
dans les cheveux des filles
que l'on a aimées



Jacques Desmarais, Gaspésie, septembre 2015.

La watchlist des éléphants américains


"Je suis un professeur dangereux ", aurait-on pu suggérer à Platon pour qu'il le fasse dire à Socrate. C'est un professeur de philosophie bien vivant qui a titré ainsi son texte d'opinion paru dans le NYTIMES.COM du 30 novembre, George Yancy, un professeur des États-Unis; son nom s'est retrouvé sur une watchlist gérée par des jeunes gardiens de la droite républicaine! 

On ne veut pas s'adapter, on ne veut pas ajuster la pratique de la philosophie au chaos des brutes.
Merci à Catherine Mavrikakis d'avoir signalé ce témoignage troublant.

Crédit Leigh Wells

I Am a Dangerous Professor

02 décembre 2016

Fable de la convergence


Petite fable bête et très méchante. Il était une fois à travers branches un pays de loups aux prises avec un temps réfractaire qui perdurait à cause de la séparation. C'était une prétention. Falaises, collines, oiseaux, les sexes étaient cois. Dans les chaumières, on broyait du noir, on désespérait de ne plus croire ni au Soleil, ni au jus d'orange. Terrible terrible. C'était écrit dans le Ciel : une grande claque devait venir lever le voile, séparer l'ivraie du bon grain. Et en effet, les Augures eurent la bonne idée d'inviter à la grande Tour le roi de l'Astuce et des pirouettes. L'occasion était belle, il faisait encore doux, il y avait des frôlements dans l'air, c'était à la grande promenade dominicale où les dames font comme ceci, et les messieurs font ce qu'ils peuvent comme Roger Bontrain. Mais ce n'est pas tout : comme chacune et chacun le sait, la flèche du temps crève parfois l'écran, traversent les coeurs et vient y défossiliser les vieilles rancoeurs dans la saumure, l'orgueil irrité, l'ingratitude, l'angry des trolls en chipote. Or, sachez bonnes gens qu'on jumela le roi avec une Manon des sources d'Hochelaga plus vraie que bitume, bonne comme du bon pain, une pauvresse qui jamais auparavant n'eut le privilège d'être portée aux nues à la grande messe. Fin comme un limier, le coeur sur la main, compatissant, le roi brillant, gentil, le combattant des tricheurs, le gant doré contre la droite se fit chevalier, enleva humblement ses souliers de Verdun, mouchoir à la main au cas où. Trois fois! Trois fois, comme un paon décoloré il frappa à la porte de la loge de l'orpheline. « N'aie crainte, amie. Nous marcherons ensemble sur les épines. C'est la première fois, n'est-ce pas? Moi, on m'invite régulièrement. Hum. J'ai l'habitude. Hum hum. Tu verras. C'est la première fois, n'est-ce pas? Je me ferai si petit à tes côtés, à peine, si tu me le concèdes, un reflet du nous nous enrobé dans mes chapeaux de feutre. C'est vraiment la première fois pour toi? On ne verra que toi [...] ».

Retourner à Uzeste en 2016

Je n'ai pas encore lu ce texte d'une cinquantaine de pages de Jean Paul Damaggio, Revenir d'Uzeste en 1986, qu'il offre à lire en accès libre sur le blogue des Éditions de la Brochure. Mais je le ferai, c'est garanti, afin de suivre les deux personnages, Testa Cassé et le lecteur que tu es, parce que l'auteur que j'aime depuis plus de quarante ans avec force échos de nos tribulations louisianaises, il dit que c'est par l'écriture de ce récit de 1986 qu'il a trouvé sa voix et celles, prolifiques, qu'il a voulu répercuter depuis et jusqu'à aujourd'hui avec courage et fraternité. Ça résonne du métier d'instituteur, mais avant, l'enfant, tous les enfants « et leurs souffrances », écrit-il, puis l'ordinaire familial, familier, local, l'ordinaire militant, les signaux emblématiques de vie dans les recettes de soupe maison, et ça regarde loin, ça mijote moûts itinéraires avec radar persistant sur au moins trois continents. Sans jamais oublier de retourner parfois en Italie, peut-être plus souvent en Espagne, passant par la Côte Vermeille, Collioure et vive la vie!

Note


Testa Casé. Me fait tout de suite rappeler le nom de Questa dans Le Nez qui vogue, roman de grand air à la Villon de Ducharme. Il faudrait que je vérifie l'orthographe. Et mes intuitions. Peu importe, je vole-colle drette là, ça résume tellement bien l'ambiance du pauvre gars tout seul dans son coin avec son chien qui est mort : Questa Cassé. Ciboire!