30 novembre 2014

Refusons l'austérité en images

Quelques images de la manifestation du 29 novembre à Montréal par Éric Robertson (99% MEDIA)

Refusons l'austérité partout!

D'un blogue à l'autre, l'ami René Merle (France), fait écho de la manifestation Refusons l'austérité qui s'est déroulée hier à Montréal et Québec. (En passant, j'aime bien le terme de contre-réforme utilisé ce matin par Amir Khadir en entrevue à Désaultels le dimanche, parce que sous couvert de nécessité absolue et de responsabilité intergénérationnelle, c'est bien de cela que se chauffe et se gargarise le gouvernement Couillard : une contre-réforme « pour sortir des années 70 », selon le ministre Martin Coiteux.) 

Maintenant, dans son appréciation, j'aime particulièrement la remarque suivante de René : « Belle illustration, pour les naïfs ou les manipulateurs “identitaires” de tout poil, en Europe comme en Amérique, que la juste lutte pour le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, pour être efficace, loin de se référer à des leaders nationalistes soi-disant au dessus des classes et des opinions, est indissociable de la lutte pour les droits sociaux et la démocratie. »

Très juste! Merci René!


29 novembre 2014

100 000 personnes à la manif à Montréal!

Clameurs de la rue.
Cf. plus bas le compte rendu de Jean-François Nadeau dans Le Devoir.

(Photos jd et Jo).














Cri populaire contre l'austérité


1er décembre 2014  |Jean-François Nadeau | 


Photo: Graham Hugues La Presse canadienneÀ Montréal, en pleine période de magasinage du temps des fêtes, l’accès au centre-ville était rendu quasi impossible en raison de la manifestation.

Trompettes, caisses claires, vuvuzelas, crécelles, sifflets: le centre-ville de Montréal, samedi après-midi, lançait un immense cri contre les ravages sociaux que suscitent les politiques économiques du gouvernement du Parti libéral dirigé par Philippe Couillard. Les rues étaient gorgées de manifestants d’un trottoir à l’autre sur plusieurs kilomètres.

L’événement était organisé par une panoplie de groupes différents sous le thème de «Refusons l’austérité». Groupes de femmes, mouvements sociaux, syndicats, mouvement étudiant, organisations autochtones: tous soutiennent sous ce parapluie commun que le gouvernement provoque un orage inutile et dangereux. Il manquait curieusement des représentants de la communauté anglophones pour que la société québécoise soit très largement représentée par cette offensive.

La manifestation, débutée sur le coup de 13 h à la Place du Canada, s’est terminée après une suite de zigzags dans les rues du centre-ville à la Place des festivals. Là ont défilé sur une scène divers acteurs du monde social québécois: groupes de femmes, leaders édudiants, figures de proue des syndicats. Une communication en duplex permettait d’entendre d’autres orateurs à Québec où se tenait une manifestation semblable.

Sylvie Moreau, 49 ans, était venue de Beauharnois en défiant les difficultés que pose pour elle le fait d’être aveugle. «Si ce gouvernement ne voit pas ce qui se passe maintenant, il fait semblant de ne rien voir. Ils font régresser la société. Je suis plus en sécurité au milieu de tout le monde ici que soumise à ce gouvernement.»

Armando Tremblay, 31 ans, travailleur dans le monde du cinéma, se disait outré par une suite de mesures qui «affaiblissent les plus pauvres, au point de faire disparaître la classe moyenne». Pour lui, les gens criaient enfin leur dégoût à l’égard «d’une vieille politique qui profite comme toujours aux mêmes».

Julie Daoust, une jeune mère de famille de 36 ans, était d’avis comme un très grand nombre des manifestants présents que les femmes étaient les premières touchées par les coupes massives du gouvernement. «Ces coupes concernent beaucoup les femmes. Dans les CPE, les services sociaux, en éducation, ce sont des femmes qui les premières écopent de ces mesures qui ont conduit à des échecs partout ailleurs. Ça ramène les femmes en arrière et je trouve ça profondément inacceptable dans une société comme la nôtre.»

Des familles entières, très souvent, marchaient avec de jeunes enfants. Les étudiants étaient nombreux, tout comme des membres du monde enseignant. Des membres de divers syndicats, la CSN, la FTQ et la CSQ, des syndicats professionnels du gouvernement s’étaient mobilisés. Jacques Létourneau, le président de la CSN, a affirmé qu’«on ne laissera pas le PLQ de M. Couillard détruire l’état social au Québec». Comme plusieurs autres leaders de la manifestation, il a servi une mise en garde «aux trois docteurs» — Barette, Couillard et Bolduc — que nombre de manifestants, à l’aide de pancartes, accusaient d’avoir prêté un «serment d’hypocrite».

À Montréal, en pleine période de magasinage du temps des fêtes, l’accès au centre-ville était rendu quasi impossible en raison de la manifestation. Les organisateurs ont promis d’autres actions et, surtout, «un printemps chaud».

Manif contre les austériens


Nous préparons crémone et mitaines. Nous y serons.




Des personnalités publiques s’engagent contre l’austérité

Le Devoir, 29 novembre 2014 | Arij Rehai - Collaboratrice | Québec
La campagne Refusons l’austérité culminera par deux marches simultanées ce samedi, l’une à Montréal et l’autre à Québec. Elles font écho à la manifestation du 31 octobre dernier (notre photo).
Photo: Annik MH de Carufel Le DevoirLa campagne Refusons l’austérité culminera par deux marches simultanées ce samedi, l’une à Montréal et l’autre à Québec. Elles font écho à la manifestation du 31 octobre dernier (notre photo).
« On ne l’a pas élu pour ça ! » fustige Normand Baillargeon. Succinct, le professeur et essayiste résume l’essentiel de la campagne « Refusons l’austérité », une initiative lancée le 2 novembre dernier par des organismes de la société civile, des syndicalistes et des organisations étudiantes pour dénoncer les compressions budgétaires dans les programmes sociaux et les services publics annoncées par le gouvernement Couillard.
 
Baillargeon fait partie des quelques autres personnalités publiques ayant choisi de soutenir la campagne et encourageant publiquement la participation citoyenne au mouvement contre l’austérité. Le chanteur Daniel Boucher, l’écrivain Yves Beauchemin et le commentateur Gabriel Nadeau-Dubois se sont aussi prêtés au jeu, le temps d’une courte capsule vidéo.
 
« Il y a un sérieux déficit démocratique en ce moment, ajoute M. Baillargeon. Les décisions prises par le gouvernement sont présentées comme une fatalité, comme si nous n’avions pas le choix. On ne s’embarrasse même plus de promettre qu’elles sont prises pour le bien commun. »
 
La campagne culminera par deux marches simultanées ce samedi, l’une à Montréal et l’autre à Québec. Elles font écho à la manifestation du 31 octobre dernier, organisée par la Coalition opposée à la tarification et à la privatisation, et ayant rassemblé des milliers de personnes dans les rues montréalaises sous l’étendard commun d’une opposition aux mesures d’austérité.
 
De telles actions s’organisent à mesure que Québec fait tomber le couperet, prévoyant des coupes de 3,7 milliards de dollars cette année dans le but d’assainir les finances publiques. Alors que le gouvernement provincial parle d’efforts budgétaires, les organisateurs deRefusons l’austérité adoptent un ton plusalarmant. Les communiqués publiés parlent de « démantèlement de l’État-providence » et mettent en gardent contre la possibilité d’une « société déstructurée et désorganisée ».
 
Mais à quoi s’oppose-t-on au juste ? « L’austérité n’est pas une réalité, c’est un discours », explique Christian Nadeau, professeur de philosophie politique à l’Université de Montréal, qui appuie aussi la campagne. « [C’est] le discours des riches qui veulent encore plus de richesses pour eux-mêmes. »
 
Les mesures d’austérité seraient donc des choix politiques. Des choix qui seraient selon lui « réfléchis, ciblés, orchestrés, préparés », en plus de dépasser la bannière d’un parti politique particulier. « Elles n’appartiennent pas nécessairement au Parti libéral du Québec. On retrouve le même type de discours au sein du Parti québécois et, surtout, au sein du patronat », ajoute M. Nadeau.
 
Normand Baillargeon se rallie aussi à l’idée que la question de l’austérité dépasse le gouvernement Couillard et s’inscrit dans une perspective historique plus longue : « Il y a quelque chose de très cohérent dans les mesures d’austérité. Au provincial, c’est les compressions budgétaires. Au fédéral, les coupes à Radio-Canada. Tous les exemples montrent une convergence vers une atteinte délibérée à la démocratie. »
 
Si le concept paraît évanescent, les effets n’en seraient pas moins réels. Pour les deux professeurs, les dégâts se mesurent par un accroissement des inégalités sociales. Même son de cloche auprès de Rosalynn Nguyen, animatrice de l’émission-débat Quelque show sur les ondes de CBC et l’une des personnalités ayant soutenu la campagne.
 
« Le gouvernement Couillard préfère nous faire sentir coupables en nous faisant croire que nous n’avons plus les moyens de nous permettre des services publics de qualité », ajoute-t-elle. Au lieu de servir la population, le gouvernement actuel imposerait de force une « cure minceur » en« sabrant l’éducation, la santé, les CPE et l’aide aux plus démunis, attaquant de front les valeurs d’entraide et de soutien à la collectivité ».
 
« Tout ça laisse penser que le politique — soit la décision collective — est entièrement soumis à l’économie. Pourtant, c’est le politique qui doit commander à l’économie. Pas l’inverse !, explique M. Baillargeon. Un débat sur les finances publiques doit se faire sans occultation des données pertinentes par le gouvernement », renchérit-il.
 
Nguyen, Baillargeon et Nadeau maintiennent tous les trois que les mesures d’austérité visent à affaiblir la société civile et que, pour s’y opposer, il faudrait un mouvement fertile émanant des organisations syndicales et des mouvements sociaux. La mobilisation souhaitée par la campagne Refusons l’austérité serait donc un premier pas en ce sens.
 
« Il faut répondre [à l’austérité] par une autre manière de voir qui relève de la solidarité », soutient Christian Nadeau. L’enjeu serait pluriel, ne se limitant pas à la sphère économique : « Nous nous opposons à l’abandon des plus démunis, aux hiérarchies artificielles, à la destruction de la culture et de l’éducation, au machisme institutionnel, à la mise sous tutelle de la démocratie et à la corruption. »
 
L’idée qu’une prise de position contre l’austérité passe par un engagement dans l’arène publique résonne aussi chez Rosalynn Nguyen. « Considérant l’urgence de la situation, il est impératif de se mobiliser. Manifester en prenant la rue est une première étape concrète pour se rassembler, échanger des informations et des idées pour trouver de nouveaux moyens pour rejoindre et conscientiser chacun des contribuables québécois », martèle-t-elle avant de conclure que « le Québec vivra une grande noirceur si le peuple ne se mobilise pas ».

28 novembre 2014

Joual vert!

Un vers est comme un sillon. Pour faucher large et récolter à perte de vue, c'est-à-dire plus loin que soi, je tiens Les chevaux approximatifs — Hommage aux formes (l'Hexagone, 2010) de Michel Garneau comme un grand livre de labour en poésie. Et si l'on n'aime pas mes traces d'habitant et de baculs, qu'on se le dise : ce livre grave et joyeux qui se comprend à petites doses a été barouetté par la vieille roue à aubes de la rue des Teinturiers en Avignon. Le hic c'est qu'à l'origine, il devait y avoir un tome II aux chevaux, mais ni l'Hexagone, ni les Éditions Triptyque, ni je ne sais trop qui... Fa que ça va circuler sous le manteau, si je comprends bien, parce qu'« écrire pour soi, je trouve ça obscène». Mettre en forme pour mieux provoquer le fonne? Les Édits ont statué que le « stupidement brave » est gaga. Tristesse de l'humble lecteur. Je siffle!
Photo Jacques Desmarais, la rue à aubes, rue des Teinturiers, Avignon, 11 juillet 2009.


« Écrire est un geste qui nous vient en héritage
et malgré ce qu'en disent les “classes jasantes”
une génération n'annule pas l'autre
et ce n'est pas un concours
c'est un immense dialogue
et celui de la poésie
est le plus beau et le mieux nécessaire »
Les chevaux approximatifs, page 13.

25 novembre 2014

Manifestation « Non à l'austérité ! »

Ben coudonc, le 29 novembre, c'est samedi qui vient! Comme dirait le grand Gilles, « à semer du vent de c'te force-là, tu te prépares une joyeuse tempête!



Non à l'austérité (page FB du collectif).
Refusons l'austérité (CSN)



24 novembre 2014

GND et Coule pas chez nous!

Comme le dit si bien Stéphane Baillargeon dans Le Devoir d'aujourd'hui en s'inspirant de Diderot, la fuite du plan de communication aux accents guerriers du Tea party « on fonce dans le tas » de TransCanada Pipelines est une sacrée brèche dans le « quatrième mur » des relationnistes patentés.

Par ailleurs, disons par effets de ricochet, le prix du Gouverneur général décerné à Tenir tête de Gabriel Nadeau-Dubois provoque en retour une vague de solidarité remarquable.  GND accepte le prix, mais remet la bourse de 25 000 $ aux citoyens qui tentent de bloquer le pétrole d'Alberta avec le projet de pipeline de TransCanada dans le regroupement Coule pas chez nous.  Mais ce n'est pas tout : il a aussi du même souffle mis sur pied doublonslamise.org qui recueille les dons du public afin de doubler la mise. L'ancien leader étudiant a profité de son passage hier à TLMEP pour rendre son action publique. Résultat : en 24 heures, plus de 230 000 $ ont été amassés!  Bravo Gabriel Nadeau-Dubois!
Photo Jacques Desmarais, Montréal, 15 novembre 2014.

Ci-après, lettre de GND publiée dans Le Devoir de ce jour.
«Je donne ce prix à ceux qui défendent le pays réel»

Le Devoir, 24 novembre 2014 | Gabriel Nadeau-Dubois - Lauréat du Prix littéraire du Gouverneur général 2014 et candidat à la maîtrise en sociologie à l’UQAM | Canada







Gabriel Nadeau-Dubois dénonce « la mollesse et l’indécision du gouvernement libéral » dans les dossiers des projets d’oléoducs passant par le Québec.
Photo: Jacques Nadeau Archives Le DevoirGabriel Nadeau-Dubois dénonce « la mollesse et l’indécision du gouvernement libéral » dans les dossiers des projets d’oléoducs passant par le Québec.

La semaine dernière, le Conseil des arts du Canada m’a décerné le Prix littéraire du Gouverneur général pour mon essai Tenir tête. Cet honneur s’accompagne d’une bourse de 25 000 $. Je ne m’attendais pas à recevoir un tel prix et, une fois la surprise passée, j’ai été saisi d’un étrange sentiment, un mélange de fierté et d’embarras. J’ai été très touché par cette récompense, mais le contreseing monarchiste qui l’accompagne m’enchante moins. Mes convictions indépendantistes, ma sensibilité progressiste, ma conception de la démocratie, peut-être aussi l’habitude de voir les représentants actuels du pouvoir mépriser ces valeurs, me prédisposaient à refuser ce prix. Sur le coup, c’est ce que j’ai cru devoir faire.

Après réflexion, j’ai changé d’idée. Il ne faut pas confondre le nom et la chose. Ce prix est remis par un jury de pairs, composé de femmes et d’hommes du monde des arts et des lettres. Attribué par une institution publique, le Conseil des arts du Canada, il rappelle l’attachement de la société à la culture, à la pensée et la littérature, qui sont des conditions essentielles de la liberté. Ce rappel importe à une époque où le pouvoir exécutif se méfie des intellectuels, où l’appareil d’État muselle la science, où le premier ministre recommande d’user de la sociologie avec modération. L’asservissement est toujours une ignorance imposée, la démocratie nécessairement un savoir partagé. Mon essai, Tenir tête, qui raconte la grève étudiante de 2012, repose sur cette conviction.

La liste des lauréats de ce prix est intimidante. Elle est aussi inspirante. En 1968, Fernand Dumont a reçu le même prix que moi. Il a décidé de l’accepter, mais il s’est empressé de remettre son chèque à René Lévesque. Pourquoi ? Parce que l’homme politique se battait pour faire entrer dans la réalité les idées que les livres de Dumont défendaient. L’an dernier, la jeune poète autochtone Katherena Vermette acceptait elle aussi l’honneur, en spécifiant qu’elle l’utiliserait pour défendre l’autodétermination des Premières Nations. Je pense aussi qu’il ne suffit pas d’honorer les idées, qu’il importe surtout de leur donner vie. Au lieu de refuser le prix symboliquement, j’ai décidé d’y voir une occasion de faire avancer les choses concrètement.

Pétro-fédéralisme

Le Québec est actuellement à la croisée des chemins. Le gouvernement conservateur, appuyé par les deux autres partis fédéralistes, soutient les compagnies pétrolières canadiennes qui désirent transformer le pays en autoroute pour le pétrole sale de l’Alberta. Ces projets d’oléoducs, en premier lieu le controversé Energy East, font peser sur notre environnement des risques démesurés au regard des avantages économiques dérisoires qu’on en retirera. Ce qui est aujourd’hui menacé c’est l’intégrité de toute la vallée du Saint-Laurent, le coeur de notre pays réel.

La mollesse et l’indécision du gouvernement libéral dans ces dossiers s’expliquent surtout par son acceptation aveugle du pétro-fédéralisme canadien. Comme le montrent ses déclarations récentes, Philippe Couillard adhère passivement au projet insensé d’une intégration de tout le Canada aux intérêts pétroliers de l’Ouest, au mépris des peuples qui y vivent. Pour ma part, je suis convaincu que, main dans la main avec les Premières Nations, on ne doit pas renoncer à demeurer maîtres chez nous.

Chaque jour, les rapports affolants des scientifiques nous mettent en garde contre le désastre économique que représente le réchauffement de la planète, auquel contribue plus qu’il ne faut ce pétrole sale. À Ottawa, on refuse d’écouter ces savants. On refuse de soumettre au principe de réalité le désir de gains faciles. Le pétro-fédéralisme vit dans le déni, l’ignorance délibérée des conséquences de ses actes, il est le gouvernement des irresponsables.

N’en déplaise à ceux qui désirent vendre le Québec pour un plat de lentilles, de plus en plus de gens s’opposent à cette dépossession. Dans les derniers mois, des citoyens et des citoyennes de partout s’organisent au sein de la campagne « Coule pas chez nous ! », afin de rappeler au gouvernement fédéral et aux notables de province, que nous avons les moyens de choisir une autre voie pour notre prospérité collective : celle de l’autodétermination économique et politique.

J’ai donc décidé de donner les 25 000 $ qui accompagnent le prix à la campagne « Coule pas chez nous ! ». Dès aujourd’hui, j’invite l’ensemble de la population à se joindre à moi afin de doubler ce montant, en faisant un don sur le site doublonslamise.org. Joignez-vous à moi pour aider ceux et celles qui défendent les intérêts collectifs du Québec.

22 novembre 2014

Sur les traces de Jack : « tu continues, tu continues, tu continues! »

Le premier épisode de la série documentaire Sur les traces de Kerouac à Radio-Canada m'a rejoint au plus profond. Kerouac, et jusque dans sa débarque, ce n'est pas juste Kerouac, c'est l'appel au large, l'aventure, l'audace — certes ici d'une manière particulièrement marquante parce qu'il s'agit de littérature —, mais c'est plus qu'un p'tit gars génial, plus qu'un mauvais garnement de Lowell. Cette histoire résonne de plusieurs manières et participe à l'expérience vitale de tous les francophones en Amérique du Nord. Or mis à part Victor-Lévy Beaulieu qui s'en soucie beaucoup, je n'ai pas entendu souvent autour de moi des voix pour rappeler, brasser, rassembler l'extraordinaire énergie — même parfois dans sa plus triste perdition — des francophones, y compris la profonde mémoire du coeur de ceux et celles qui parmi nous sur le Continent sont dans l'épreuve de l'exil de leur langue. 

Dans l'épisode d'aujourd'hui qui se veut une « préface », il y avait la présence de l'âme de la grande famille. Je retiens entre autres les mots simples, si justes, du jeune Franco-Ontarien Damien Robitaille, parce qu'ils font retentir l'actualité — j'ose dire intérieure — de Jack entre deux cultures. Jack, sa famille, ses origines, ce grand frère en démanche dans la chambre d’à côté qui raconte ses périples, ses amis, ses ciboires de blessures. 

Mais quelle finale avec un poème-complainte de Zachary Richard lu par lui-même et qui traduit pour trois Louis tous les synonymes du qualificatif « coonass » que j’ai entendu de mes propres oreilles en 1974 en Louisiane! Dans ce chapelet au ton beat qui couvre tout le territoire parcouru, des siècles de résistance et de grands champs de chaleur humaine, il n’oublie pas de mentionner ni le nègre blanc, ni le speak white, ni Willie Lamothe. « Nulle part, man.» 

Photo Jacques Desmarais, Club Citoyens Américains, Lowell, 17 juin 2012.

J'étais sur la route dans les parages d'Acton Vale en train de ronner mon char vers ma cambrousse, la radio jouait, ma tête était littéralement soudée à beaucoup, beaucoup d’êtres chers. Anna dans une factrie au Maine, Léo à Port-Huron, Doloré un petit moment à Boston, Rose-Aimée Desmarais qui vient de s’éteindre à Manchester, New Hampshire. Tous ces noms écrits sur le tableau noir près de la table de pool... 


Allez écouter ça! 

Note : le livre numérique ou en format PDF est gratuit :Téléchargez gratuitement le livre numérique Sur les traces de Kerouac sur iBooks : itunes.com/tracesdekerouac ou en format PDF.

19 novembre 2014

Normand Baillargeon : un sceptique dans La Ruche


Je suis un admirateur de Normand Baillargeon, anarcho-syndicaliste, depuis ses années de chroniqueur au journal Le Devoir (on retrouve quelques textes au fil des ans dans les archives numériques du journal). Je l'ai un peu moins suivi sur le blogue de Voir dont le plus récent texte remonte à l'été 2014.                                                                                                        

Auparavant, de 2008 à 2010, il a avait publié un blogue personnel répertorié ici dans Train de nuit. On peut aussi le suivre à la radio de Radio-Canada à l'émission hebdomadaire Dessine-moi un dimanche.

En cet automne 2014, ce professeur-philosophe — philosophe de l'éducation surtout, une denrée rare en philosophie depuis John Dewey — est partout et fait feu de tout bois. Juste avant la rentrée, il déclinait  dans son blogue à Voir  les nombreux titres qui ont été publiés depuis :

« [...] publication de deux essais, dont Chronique des années molles, chez Léméac; et : Une histoire philosophique de la pédagogie, chez Poètes de Brousse. Paraît aussi, Théorie et pratique du bolchévisme, de Bertrand Russell (Éd. Du Croquant, en France) présenté et annoté par Jean Bricmont et moi, sur une traduction substantiellement revue et corrigée. J’ai collaboré à trois ouvrages qui sortent cet automne : un collectif sur la laïcité (PUO), un ouvrage sur l’économie (éditeur oublié…) et un collectif dirigé par Gabriel Nadeau-Dubois sur la gratuité de l’université. La version anglaise du collectif sur le hockey que j’avais dirigé aux PUL avec mon ami Christian Boissinot sort aux PUO sous le titre, je pense : Coach’s corner [...] »


Il est un des invités d'honneur au Salon du livre de Montréal qui débute aujourd'hui (à lire une très belle entrevue publiée dans La Presse), et surtout, un récent passage à TLMEP (voir l’extrait plus loin) a fait un tabac.  


M. Baillargeon est un pédagogue exemplaire avec un grand sens de l’écoute et du respect des autres. Nous sommes en vrai dialogue avec lui.


Aujourd'hui sur sa page FB, M. Baillargeon met en lien un beau petit texte paru dans le blogue français La ruche : La ruche : Je suis sceptique voici pourquoi et voici comment.

Intellectuel critique de haut vol dans la tradition de Bertrand Russell, en philosophie de l'éducation il milite pour la libération des personnes par la culture scientifique, la rationalité, la philosophie et les arts. Encore hier à l’émission littéraire Plus on est de fous, plus on lit, il se faisait l’ardent défenseur d’un manuel en enseignement de la littérature pour les élèves du niveau secondaire — il n'y a aucun corpus national existant au Québec et les lectures proposées aux élèves de 13 à 17 ans varient d'un professeur à un autre selon leur bon jugement! L'idée d'un manuel présentant les divers courants et les différents genres littéraires viserait à permettre aux jeunes lecteurs de comprendre ce qui leur est proposé (sinon imposé) de lire. 


Cette idée communiquée lors d'une table de discussion à la radio me semble tout à fait exemplaire de la manière Baillargeon visant un apprentissage riche, soucieux de la réception cognitive des interlocuteurs auxquels l'on s'adresse. C'est là une question d'accompagnement. Je suis en train de lire la préface écrite par Baillargeon à des textes traduits de Bertrand Russell — cf. Pourquoi je ne suis pas chrétien, coll. Instinct et Liberté, Lux éditeur, 2011, pages 7- 30 - dans laquelle il dit vouloir tout d'abord « rappeler qui est Bertrand Russell [...] », et « dresser un portrait de ses idées sur la religion [...] » espérant de la sorte que le lecteur pourra mesurer la pertinence et l'actualité du propos de Russell (op. cit., p. 8).


Le militantisme de l'auteur du Manuel d'autodéfense intellectuelle (Lux éditeur 2006) — une version datant de 2002, autorisée par M. Baillargeon, est disponible en format PDF ; voir également une recension intéressante de ce bouquin de chasse aux sophismes par Carole Montpetit, L'antipropagande de Normand Baillargeon, Le Devoir, 30 juin 2007 —  est aussi très enraciné en regard des combats de l'heure.  En fait foi la capsule suivante qui soutient la manifestation du 29 novembre prochain contre les mesures d'austérité du gouvernement Couillard. 





Normand Baillargeon est aussi un amateur de jazz (un fan de Yannick Rieu entre autres) et un lecteur convaincu de poésie! Son écrivain favori est Jacques Prévert. Son film favori est Les enfants du paradis. Il a recueilli Gilbert Langevin à la fin de sa vie. Cela m’avait beaucoup touché et j’ai eu le bonheur d’échanger quelquefois avec lui à ce propos. C’est lui qui m'a introduit au chansonnier Jean Custeau, décédé, hélas, il y a peu. Voir notamment mes Carnets pelés 31.   

Extraits de TLMEP, 16 novembre 2014.





Un jour mon professeur Georges Leroux m'a sensiblement dit ceci : des philosophes qui se trempent, il n'y en a pas beaucoup.  Et que serait donc, en effet, un philosophe qui n'aime pas communiquer des idées?  

En un mot comme en mille, l'apport remarquable de Normand Baillargeon sur le plan du dialogue dans la cité est un phare essentiel en haute mer. 

16 novembre 2014

La bataille de Radio-Canada


Presque contre tout espoir, un simple citoyen, Nicolas Bédard, a lancé avec succès à partir de sa page Facebook un mouvement impressionnant de ralliement (cf. info Radio-Canada; cf. aussi Le Devoir et le communiqué de la CSN) afin que les citoyens manifestent haut et fort leur refus de voir la Société Radio-Canada attaquée et démantelée.

Alors que plusieurs membres du CA de la SRC sont des souscripteurs et des béni-oui-oui du parti conservateur au pouvoir, qu'ils ne défendent pas la mission de Radio-Canada qui est un joyau de la culture francophone au Canada, il faut espérer que le mouvement de contestation prenne de l'ampleur. 

J'ai participé en ce dimanche à la marche de Montréal à partir.  Voici quelques photos prises le long du parcours de la marche du square Victoria jusqu'à la tour de Radio-Canada sur la rue Notre-Dame.






Photos Jacques Desmarais


12 novembre 2014

Pigeons la vie!


 « Un pigeon voyageur ne sait faire qu'une chose, qui est de retourner vers son pigeonnier. »


Des voyageurs, du monde 
il y en a partout 
de tous bords tous côtés

il s’en trouve ici dans le métro
avec moi, c'est noir

lorsque je débarquerai
sur l'autre rive invisible
aux trois brins d'herbe,
il y en aura encore 
des cohortes et des cohortes
avec des becs grands ouverts 

Ils se taisent aujourd'hui
ou bien font des farces
ou bien chuchotent de fatigue
que ça va mal à shop!

les bras sortis de l’âme
raccourcis clavier mac
trou d'étoile dans le cocon
de l'infidèle-surprise
du monde 

Imaginons le temps de l’univers 
se plier en un seul instant

Imaginons tout l’espace 
concentré en un seul point
à la portée de tous 

hors du temps 
hors l’espace
hors-la-loi l'ours
de la grande horlogerie
qui boude la franchise
de la banquise
des anciens glaciers 
frets nets secs

dehors, dedans
en même temps

« c’est trop climatique
dans tout ce qui reste de lacs
aux creux des allégories »

Malherbe appelle ça
la grande scorie
la troisième cigarette
à faire griller l’esprit
à faire rire les dieux
dissimulés derrière
les buissons-ardents

J'en suis là tout nu
sur mon tas de fumier
physico-chimique
avec ce bagage défait 
de petits os qui boucanent
accroché aux rebords 
d'un ruban de Möbius 
où souffle par avance 
la disparition
d’un nouveau message télépathique
à frappes de mouche robocop
qui te sera livré pour Noël
à travers les nouvelles lunettes,

inconscient
live...

« Tous les voyageurs dans les oranges 
sont priés de descendre avant la dernière station »