19 juillet 2007
Laverdure
J'avais déjà mon voyage de bouquins entre les mains : Prochain épisode, Album Miron, une plaquette sur le jazz de Hucher, plus le CD Midi 20 du Grand Corps Malade que je finirai par écouter alors qu'il est en ville à guichets fermés et après que des centaines de milliers d'oreilles s'y soient aventurées.
Poussé sans doute par l'ange des livres, j'ai toutefois fait des zigzags dans les rayons de la librairie et j'ai fini par feuilleter avec plaisir+la surprise ce recueil, Sept et demi de Bertrand Laverdure. À la prochaine virée+ paye, c'est assuré, je le prendrai ce bouquin (seulement 12,50 $) et vous en reparlerai peut-être.
Mais pour l'heure, cette poésie-prose dans une mise en page bien centrée m'a tout de go semblé drôlement joyeuse+ grave à la fois, aiguillonnée dans le fouillis contemporain avec quelques dards savants, soucieuse de ne pas aggraver ni le monde ni nos lubies de lecteurs qu'on veut aspirer (boire plutôt) avant que nous ayons ouvert la bouche... Non sans que quelques traces d'inquiétude s'immiscent en filigrane, camouflées par la posture d'une plume habile et quelques beaux clins d'oeil aux explorateurs poètes de sa tribu, fatalement anonymes, donc plutôt collectifs.
«Sept et demi déclenche une heureuse mutinerie dans la langue et la logique, parmi les œuvres et les êtres aimés (...) la pensée dans ses rythmes découvre tous les panoramas – comme quoi en restant ici on peut aller partout», peut-on lire dans la présentation du recueil.
Comment dit-il aussi? De mémoire quelque chose comme : j'offre mes virgules à la semaine.
C'est profondément personnel. Et ça, j'aime ça!
On peut voir pitonner Laverdure dans l'ombre de la scène slam à Montréal, toujours souriant, humble compilateur de notes des slameurs. Et pourtant, il en a écrit une shot déjà (roman, poésie, articles dans Spirale..).
Sept et demi est publié chez Le Quartanier (éditeur et revue)+ un site des plus stimulant.
En tout, du très beau travail littéraire.
13 juillet 2007
Carnets pelés 12 - Dispute de goélands
« Ce petit qu'il faut qu'on fusille
on le mena devant la croix.
Cigarettes, blancheurs de fille,
il tira de sa poche, trois.
Une, il la mit à son esgourde,
l'autre à sa lèvre, puis en l'air,
il jette son chapeau qui tourne comme le soleil du désert. La troisième, soit une sainte, sur le calvaire il la perdit. C'est elle qui poussa la plainte puisque les hommes n'ont rien dit. »
Jacques Audiberti, Vera Cruz, Des Tonnes de semence (1941), rééd. Poésie/Gallimard, 1981, p. 110
9 mars 2003
Lecture de quelques passages de Précis de décomposition de Cioran, coll. Tel, Gallimard (1949), éd. de 1984. Une belle gibelotte. L’auteur parle de la généalogie du fanatisme. Il écrit :
«L'envie de devenir source d'événements agit sur chacun de nous comme un désordre mental. » (p. 12).
La folie de « prêcher » serait liée à l'instinct de conservation, « ... soif mortelle de fictions... ». La source de tout cela serait notre propension à se voir comme le centre du temps : « Nos réflexes (...) transforment en planète la parcelle de chair et de conscience que nous sommes. » (p. 14).
1997
Aux Herbes Rouges, François Charron publie La passion d’autonomie (...)
suivi de Une décomposition tranquille.
25 février 1996
Dans Les cinq sens de Michel Serres, on relève ceci : la vérité est vue comme l’ultime décision du «je» en état de survie. Il s’agirait d’un passage dont l’issue est déterminante, et non pas l’implication figurative de la métaphysique « naturelle » du logos tournée vers l’adéquation des énoncées avec le réel. Par exemple, sortir par le hublot d’un navire en perdition. Expérience vécue par l’auteur. Nous ne sommes pas dans la dentelle.
En cette même année de 1996 paraît en français chez Métailié Le neveu d'Amérique de Luis Sepulveda. Nous ne sommes pas dans la dentelle. Le « je » souillé, attristé, torturé, par quel hublot béni sortira-t-il vivant de toute cette folie politique? Et les salopards, quelles sont leurs chances de survie? En quelle année le Kanasuta de Richard Desjardins qui nous scande-t-il la « légitime défense? »
Sepulveda gagne trois belles semaines au « cube » pour avoir dit la vérité à un officier aimant se faire licher le cul et qui était animé de fantasmes littéraires avec pour seul talent celui de plagier les vers d'un poète sirupeux. L'officier avait demandé à l'écrivain son avis sur « ses poésies ». Au cube! Au trou! Au hublot de merde!
«On ne pouvait s'allonger qu'en diagonale, mais les basses températures du sud, les pluies et l'urine des soldats incitaient à se recroqueviller et à désirer devenir minuscule afin de pouvoir débarquer sur une des îles de merde flottante qui jonchaient le sol, et suggéraient des vacances de rêve. Je restai là-dedans trois semaines, me racontant des films de Laurel et Hardy, me récitant les romans de Salgari, de Stevenson, de London, jouant de longues parties d'échecs et me léchant les doigts de pied pour les protéger des infections. Dans ce cube, je me suis juré et rejuré de ne jamais me consacrer à la critique littéraire. » (Le neveu..., p. 32),
Printemps 1990
Lors d’un entretien donné à Jean Larose sur les ondes de Radio-Canada, à l’ex-Chaîne culturelle (bravo! M. Lafrance pour votre médaille de la Légion du Déshonneur!), entendu le carillonneur Gaston Miron proférer une sentence qui m’a marqué, très souvent aidé le long du long de mes petites pérégrinations noctambules. Le poète se moquait, en effet, de la sempiternelle madame La Muse qui s’amuse à tricoter du silence, à nouer l’angoisse, à paqueter l’angine de poitrine avec son visage tanné de beau grand soleil intérieur reflétant l’invisible, néanmoins clignotante boule de cristal, synonyme abâtardi de la chère Inspiration qui peut cependant, passant par le nez, sentir la transpiration si l’on consent le moindrement ce clin d'oeil du côté de Vanier, le gros plein d’encre... Ce n’est pas avec de l’inspiration qu’on fait des poèmes, martelait Miron, mais avec des mots!
Savait-il alors (sans doute) qu’il faisait sienne une idée de Mallarmé disant à Degas : « ce n’est pas avec des idées mais avec des mots qu’on écrit de la poésie »?
En terre de Mironnie, on dit que «les mots nous regardent ».
Quelque part en 2006
Dans le documentaire François Charron, poète (Au fil des mots, Productions téridan), on peut entendre l'auteur de Le monde comme obstacle lire quelques-uns de ses vers :
« La perte est à peine concevable. »
« Ce qui manque est infini »
Et dire encore ceci :
« Parfois les mots en savent plus que nous »
26 août 1994
À Haute voix (Radio-Can), François Charron, toujours, disait : « Les mots écoutent eux-mêmes les mots. ». Et plus loin, au bout du quai qui se décomposera sous nos pieds : « Mourir passe par ma bouche »
Saudit! Ô minuit bleu dièse, vite, crache-nous une réplique!
« Plage à marée basse. Les bruits du langage se sont retirés. Fonds de vase avec ses trous, ses amas de solitude. Nous sommes avant ou après l’écriture. Là où personne n’écoute. Dispute de goélands. Leurs dos de cendres claires font filer les mailles d’un ciel bas.»
— Georges Perros, Lettres à Michel Butor, tome 2, 1968-1978, p. 8.
Mais, mon cher Georges, bûcheur d'éternité saline, cette fois, je ne te laisserai pas le dernier mot, car citer sans explorer, c'est comme lire sans trépasser.
Charron cite lui-même un chercheur français qu'il ne nomme pas.
C'est qu'à travers tout ce fatras, la poésie, en effet, qu'est-ce?
« La poésie, disait le chercheur inconnu, ce n'est jamais ça ».
07 juillet 2007
Petit tour en couleur au Jazz...
Du monde au jazz...
Je suis allé flatter ce beau petit Ste-Cat qui déambule rue Ste-Catherine... Je ne sais pas s'il est en chat leur, mais le minou content s'est avancé tout près de mon oreille et a dit très distinctement : «Yes yes, yes yes!»*
Vieille affiche de 1980, première année du FIJM. J'étions allé au show de Ray Charles...
Qu'elle grâce dans les doigts... On dirait qu'ils dansent.
Heureux hasard, l'ami Marco (chandail blanc écrit «Brasil») m'a spotté de loin, de dos, alors que j'étais au kiosque à bière. Tu parles!
Un Dixie Band comme apéro...
Pirate mexicain découpant des fleurs à la mangue
Jolie serveuse bien à son affaire
À la fontaine, le jazz grenouille vert lime c't'année...
C'est pour machter avec le chandail rose jazzé longtemps de Stanley Péan (Espace Musique) qu'on voit de dos, malheureusement, parce que j'étais trop gêné de lui demander si je pouvais tirer son portrait.
Jean, jeune Brésilien hyper sympathique de passage en coup de vent pour une saucette au festival. Il s'est dit enchanté de Montréal.
Faut dire que l'ami Marco, historien, lui-même Brésilien de coeur et d'âme, est capable de beurrer épais... Juste assez pour avoir du fun.
* Pour ceux qui l'ignorent, le Ste-Cat est animé à la sueur du front de Caroline Legault.
Photos : jd
Je suis allé flatter ce beau petit Ste-Cat qui déambule rue Ste-Catherine... Je ne sais pas s'il est en chat leur, mais le minou content s'est avancé tout près de mon oreille et a dit très distinctement : «Yes yes, yes yes!»*
Vieille affiche de 1980, première année du FIJM. J'étions allé au show de Ray Charles...
Qu'elle grâce dans les doigts... On dirait qu'ils dansent.
Heureux hasard, l'ami Marco (chandail blanc écrit «Brasil») m'a spotté de loin, de dos, alors que j'étais au kiosque à bière. Tu parles!
Un Dixie Band comme apéro...
Pirate mexicain découpant des fleurs à la mangue
Jolie serveuse bien à son affaire
À la fontaine, le jazz grenouille vert lime c't'année...
C'est pour machter avec le chandail rose jazzé longtemps de Stanley Péan (Espace Musique) qu'on voit de dos, malheureusement, parce que j'étais trop gêné de lui demander si je pouvais tirer son portrait.
Jean, jeune Brésilien hyper sympathique de passage en coup de vent pour une saucette au festival. Il s'est dit enchanté de Montréal.
Faut dire que l'ami Marco, historien, lui-même Brésilien de coeur et d'âme, est capable de beurrer épais... Juste assez pour avoir du fun.
* Pour ceux qui l'ignorent, le Ste-Cat est animé à la sueur du front de Caroline Legault.
Photos : jd
05 juillet 2007
Ce Bob Sleigh!
Fabuleux ce Dylan, intense, aventureux, rock&roll, poète, en spectacle hier à la salle Wilfrid-Pelletier.
J'étais dans la rangée BB-1!
C'est-à-dire au centre de l'univers populaire
le plus intéressant de ce côté-ci des Amériques.
Oui, F avec un Y, dans la salle, il y avait en masse de yuppies pas du tout en manque de roupies, à belles casquettes, de jolies minois qui miaulent, des ministres souriante t et beaucoup de têtes blanches...
Mais ils étaient tous dans mon dos !
Très souvent debouts!
Who's gonna throw that minstrel boy a coin?
Who's gonna let it roll?
Who's gonna throw that minstrel boy a coin?
Who's gonna let it down easy to save his soul?
Maison natale de Robert Allen Zimmerman, Duluth, Minnesota.
Moi, j'ai dansé à petits pas, on ne pouvait pas résister,
comme le grand slaque noir que j'avais vu dans un club à Bahia.
Un beau set sans trou. Ouverture avec Everybody must get stoned. J'ai adoré sa reprise de I'll be your baby tonight et Don't think twice, it's all right...
À mes côtés se trouvait un type du New Jersey. Fan de Robert Bob, tu dis? Il était au spectacle de Québec la veille. Il a vu Dylan «more than one hundred times!»
J'étais placé en ligne droite avec le micro du centre, le clavier, Dylan. Et sans blague, à la fin,
j'ai été le premier à reconnaître et à applaudir spontanément l'intro un peu rare
de Like a Rolling Stone, quelques secondes avant que toute la salle ne déferle.
Sa Bobness, je n'ai pas rêvé, a levé les yeux en ma direction... Ah! Il avait l'air content.
03 juillet 2007
Parti faire le train
«Quel est ce train qui meurt...»
Lors de la dernière émission radiophonique de Train de nuit sur Radio Centre-ville, j'avais ouvert avec ce vers de Guillaume Apolinaire que j'affectionne tout particulièrement.
Comme le train ici, à Tétreauville, ne se fait entendre qu'à une heure du matin, j'ai pris comme figurant dans le vidéo qui suit un moteur d'avion... Ouais! Ouais!
Cela annonce les vacances, en effet. Aujourd'hui, j'ai reçu par courriel un poème dru touffu épicé blues de Michel Garneau. Cela fit ma journée. Demain, show de Dylan. Puis, c'est les vacances en effet. Les vacances!
Mais crime que je lis mal! Ça devrait aller comme suit :
«où va donc ce train qui meurt au loin
dans les vals et les beaux bois frais du tendre été si pâle?»
Parti faire mon train...
A+
Lors de la dernière émission radiophonique de Train de nuit sur Radio Centre-ville, j'avais ouvert avec ce vers de Guillaume Apolinaire que j'affectionne tout particulièrement.
Comme le train ici, à Tétreauville, ne se fait entendre qu'à une heure du matin, j'ai pris comme figurant dans le vidéo qui suit un moteur d'avion... Ouais! Ouais!
Cela annonce les vacances, en effet. Aujourd'hui, j'ai reçu par courriel un poème dru touffu épicé blues de Michel Garneau. Cela fit ma journée. Demain, show de Dylan. Puis, c'est les vacances en effet. Les vacances!
Mais crime que je lis mal! Ça devrait aller comme suit :
«où va donc ce train qui meurt au loin
dans les vals et les beaux bois frais du tendre été si pâle?»
Parti faire mon train...
A+
Excursion pensée critique 2 - Loïc Wacquant, vagueur de grands vents
Body and Soul
Loïc Wacquant est un jeune sociologue français entendu sur les ondes de Dimanche Magazine il y a quelques années. Ses propos m'avaient frappé, à la fois liés de part en part à un travail ethnologique sur le terrain, mais aussi traversés, animés par l'épistémologie de la pensée critique. Précision des faits, déblayage idéologique pour expliquer et comprendre.Héritier de Foucault et surtout de Bourdieu dont il fut l'élève et le collaborateur, Wacquant enseigne à Berkeley. Ses travaux portent principalement sur la ville et l'urbain, l'analyse de la violence en France, au Brésil, à Chicago...
Je voudrais d'abord piquer à Wacquant un «programme de lecture» en regard de ce qui se fait actuellement en sciences humaines autour de la pensée critique. Ensuite, on trouve sur Daily un entretien filmé début avril, avant les présidentielles françaises. Wacquant appelle à voter à gauche et fustige Sarkosy qu'il considère comme l'homme le plus dangereux jamais sécrété par la droite française. Bien que les résultats soient maintenant scellés (à double tour) et qu'il n'y ait plus aucun effet «idéologique», l'intérêt de l'entretien demeure parce qu'on y trouve une analyse qui déborde largement la France et fait entrevoir l'état du monde actuel dans les démocraties occidentales. L'état du monde dans le sens des conséquences «appliqués» de la politique néolibérale transnationale en cours.
Pistes de lecture : la pensée critique aujourd'hui
«La pensée critique doit, avec zèle et vigueur, démonter les fausses évidences, révéler les subterfuges, démasquer les mensonges, pointer les contradictions logiques et pratiques du discours du Marché Roi...»
«Lisez les analyses des dérives meurtrières de la rationalité produites par Zygmunt Bauman dans Modernity and the Holocaust; les expérimentations littéraires (j’emplois cet oxymore à dessein) par lesquelles José Saramago déconstruit l’ordre social dans L’Aveuglement; les théories de l’équité et du développement économique alliant rigueur scientifique et engagement moral du récent prix Nobel Amartya Sen dans Development as Freedom; le compte-rendu que Nancy Scheper-Hughes fait des contradictions de l’amour maternel dans les bidonvilles du Brésil dans Death Without Weeping ou le portrait saisissant qu’Eric Hobsbawm dresse du vingtième siècle dans The Age of Extremes ; l’épopée de la notion de liberté, surgie à l’ombre de l’esclavage, retracée par Orlando Patterson dans Slavery and Social Death et Freedom in the Making of Western Culture ; ou bien encore l’anatomie des mécanismes de légitimation du pouvoir technocratique par Pierre Bourdieu dans La Noblesse d’État, et vous serez vite convaincu que la pensée critique est vivace, productive, en plein travail et qu’elle progresse. Et qu’elle ne se limite pas, par ailleurs, aux seuls intellectuels qui marchent explicitement sous sa bannière : beaucoup de chercheurs, artistes et écrivains contribuent à l’alimenter indépendamment et même parfois en dépit de leurs engagements politiques et civiques dès lors qu’ils révèlent des possibles sociaux latéraux qui sont écartés, refoulés ou réprimés, mais bien présents, en pointillé ou en gestation, dans notre présent.»
Obstacles à la pensée critique
Ou comment on génère et gère l'amollissement de la pensée :
« (...)le principal obstacle à la pensée critique aujourd’hui (...) c’est la formation d’une véritable internationale néolibérale, ancrée par un réseau de think tanks centré sur la côte est des États-Unis et relayée par les grands organismes internationaux, World Bank, Commission Européenne, OCDE, World Trade Organization, etc., qui diffuse à une vitesse exponentielle les produits de la fausse science afin de mieux légitimer les politiques socialement réactionnaires mises en place partout à l’ère du marché triomphant. J’ai essayé de le montrer dans Cárceles de la miséria pour la politique de « tolérance zéro » qui s’est « mondialisée » en moins d’une décennie sous l’impulsion du Manhattan Institute de New York City et de ses épigones et « collaborateurs » actifs ou passifs à l’étranger, et dans Los Parias urbanos à propos du pseudo-concept d’« underclass » qui sert, dans tous les pays où il est utilisé, à « blâmer la victime » en attribuant les nouvelles formes de pauvreté urbaine à la soi-disant émergence d’un nouveau groupe de pauvres dissolus et désorganisés. Pierre Bourdieu et moi avons essayé, dans Las argucias de la razón imperialista (Buenos Aires, Paidós, 2001), de jeter les linéaments d’une analyse critique du déploiement et des effets réels et symboliques de cette nouvelle vulgate planétaire qui nous présente le monde fabriqué par les grandes multinationales comme l’aboutissement ultime de l’histoire et la marchandisation de toutes choses comme l’achèvement le plus haut de l’humanité. Vulgate qu’on retrouve dans toutes les bouches, y compris dans celles des gouvernants et des intellectuels qui s’affichent « de gauche » et se croient progressistes (parfois sincèrement).»
Cf. La pensée critique comme dissolvant de la doxa... in Le Magazine de l'Homme moderne
Interview
Loïc Wacquant s'engage contre Sarkozy
Quelques bouquins de Wacquant
Réponses. Pour une anthropologie réflexive, (avec Pierre Bourdieu) (1992),
Les Prisons de la misère (1999), Corps et âme. Carnets ethnographiques d’un apprenti boxeur (2000), Punir os pobres (2001), Simbiosi mortale (2002), Pierre Bourdieu and Democratic Politics (2005), Das Janusgesicht des Ghettos (2006), Parias urbains. Ghetto, banlieues, État (2006).
Article critique dans Wikipedia
Site de l'A.
Puis, en programme double, il y a Les Mutins de Pangée (France) qui présenteront à l'automne 2007 leur Chomsky & Compagnie dont voici la bande annonce :
02 juillet 2007
Excursion pensée critique 1 - Jeux d'écluse
Un wagon tout neuf en série (bien, on verra) s'ajoute à Train de nuit et se donne comme itinéraire des excursions dans la pensée critique.
La pensée «critique» n'est pas dans un moribond sur son lit de mort. Mais les pelletées de terre transnationales du néo-libéralisme remplissent jusqu'à ras bord la vue, les oreilles, les cerveaux et ce, de si quotidienne manière qu'on se trouve aujourd'hui à en perdre plus que son latin.
L'un dira : chou! La philo n'est pas de la littérature! Qu'est-ce que ça vient poindre, ce nez plate, dans ta boîte de jazz? Sous le charmant ciel montréalais?
D'abord, les paysages littéraires, même les plus escarpés, ne défilent jamais sous nos yeux en couche chaude : ils font un monde à partir du monde, retournent au monde en découpant des trous de miroir dans la pensée et plantent parfois dans le sol des graines si radicales, celles qui vont à la racine de l'Homme, disait Marx.
Georges Leroux, mon professeur de philosophie disait : «La littérature, c'est de la philosophie autrement». Cette remarque m'accompagne intimement lorsque je lis.
Puis, sans faire une démonstration à gogo à tout prix, je dirais simplement aussi que le jazz, forme populaire de l'art qui contamine la tête, le coeur et les pieds, les hanches et le souffle, les oreilles des foules, donne le goût de l'amour et atteint l'alcool le plus secret, le jazz, cette rare invention culturelle typiquement américaine comme le pensait, entre autres, Marguerite Yourcenar, le jazz quand il ne fait pas dans la «gestion de risques» pour dire comme l'ami Serge Truffaut, suppose plus que le doigté, la connaissance, la chance, pour renverser les formes et les structures établies... Le jazz est un carrefour où poussent les racines...
À tous les matins que le bon Dieu me donne, bien que je sois généralement dans le contentement, mais vraiment, d'être en vie, j'oublie dans quel calvaire de régime nous vivons. Les journaux n'y font rien. Ni les discours réveilleurs de Michel Chartrand que je suis allé entendre très souvent,ni les Normand Baillargeon, les Bouveresse, les Chomsky, les Prévert, les Jonathan Coe, les Wittgenstein de la planète. Tout cet outillage critique dans ma petite tête oublieuse... C'est ce que je disais récemment à Normand Baillargeon suite à une conférence à la librairie Zone libre.
Naïveté de boxé-boxeur face à la doxa... Cela me surprend et je me dis : faudrait parfois que je prenne des notes!
Au détour de ces «excursions sommaires», il m'apparaît que la pensée critique sert au premier chef la création littéraire dans ce qu'elle offre de plus vif, de tranché au canif. Même quand on croit avoir tout oublié, même quand ronronne dans la mélasse des radios et des télés la courtoisie à plume de nos commanditaires... La littérature, je le dirai sans fioriture et sans prétention savante, laisse cette impression avant, après le langage, cette bonne fille d'impression entre deux craques, si pugnace, évoquée par Proust prenant le thé l'après-midi, à quatre heures... Ce petit filet dans le ciel pour fins de mémoire ouvre le ciel et la terre et soi-même...
La pensée «critique» n'est pas dans un moribond sur son lit de mort. Mais les pelletées de terre transnationales du néo-libéralisme remplissent jusqu'à ras bord la vue, les oreilles, les cerveaux et ce, de si quotidienne manière qu'on se trouve aujourd'hui à en perdre plus que son latin.
L'un dira : chou! La philo n'est pas de la littérature! Qu'est-ce que ça vient poindre, ce nez plate, dans ta boîte de jazz? Sous le charmant ciel montréalais?
D'abord, les paysages littéraires, même les plus escarpés, ne défilent jamais sous nos yeux en couche chaude : ils font un monde à partir du monde, retournent au monde en découpant des trous de miroir dans la pensée et plantent parfois dans le sol des graines si radicales, celles qui vont à la racine de l'Homme, disait Marx.
Georges Leroux, mon professeur de philosophie disait : «La littérature, c'est de la philosophie autrement». Cette remarque m'accompagne intimement lorsque je lis.
Puis, sans faire une démonstration à gogo à tout prix, je dirais simplement aussi que le jazz, forme populaire de l'art qui contamine la tête, le coeur et les pieds, les hanches et le souffle, les oreilles des foules, donne le goût de l'amour et atteint l'alcool le plus secret, le jazz, cette rare invention culturelle typiquement américaine comme le pensait, entre autres, Marguerite Yourcenar, le jazz quand il ne fait pas dans la «gestion de risques» pour dire comme l'ami Serge Truffaut, suppose plus que le doigté, la connaissance, la chance, pour renverser les formes et les structures établies... Le jazz est un carrefour où poussent les racines...
À tous les matins que le bon Dieu me donne, bien que je sois généralement dans le contentement, mais vraiment, d'être en vie, j'oublie dans quel calvaire de régime nous vivons. Les journaux n'y font rien. Ni les discours réveilleurs de Michel Chartrand que je suis allé entendre très souvent,ni les Normand Baillargeon, les Bouveresse, les Chomsky, les Prévert, les Jonathan Coe, les Wittgenstein de la planète. Tout cet outillage critique dans ma petite tête oublieuse... C'est ce que je disais récemment à Normand Baillargeon suite à une conférence à la librairie Zone libre.
Naïveté de boxé-boxeur face à la doxa... Cela me surprend et je me dis : faudrait parfois que je prenne des notes!
Au détour de ces «excursions sommaires», il m'apparaît que la pensée critique sert au premier chef la création littéraire dans ce qu'elle offre de plus vif, de tranché au canif. Même quand on croit avoir tout oublié, même quand ronronne dans la mélasse des radios et des télés la courtoisie à plume de nos commanditaires... La littérature, je le dirai sans fioriture et sans prétention savante, laisse cette impression avant, après le langage, cette bonne fille d'impression entre deux craques, si pugnace, évoquée par Proust prenant le thé l'après-midi, à quatre heures... Ce petit filet dans le ciel pour fins de mémoire ouvre le ciel et la terre et soi-même...
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