31 janvier 2017
Paix
On a si peu à offrir en ce temps, nos larmes, la mémoire à tenir, un grand souci pour les enfants qui ont perdu leur papa, et pour les grands, les épouses, un profond désir d'amour et de paix. Ça fait mal.
Il y a comme six cœurs bouleversant sur mon pauvre drapeau blanc de neige.
28 janvier 2017
Les récits émouvants de Chagall
Je le sais bien que ma carapace ne vaut pas cher, que j'ai la larme à l'œil facile quand on me déjoue au cinéma, au théâtre, en musique, quand on me parle de ruralité... Mais c'est bien la première fois que la catharsis allume un feu au musée! Marc Chagall (1887-1985), malgré toutes les horreurs du siècle passé, n'a rien de triste. Mais ses chèvres, ses vaches, ses violons, ses vagabonds, cette femme qui crie à la mort, la zemer au violon qui nous entoure tout le long de la visite, ouf! À un moment donné, c'est juste le coeur. Autoportrait devant la maison, 1914; La naissance, 1917; La mort, huile sur toile, 1908-1909.
Photo JD., Autoportrait devant la maison, 1914, MBAM, 26 janvier 2017 |
Photo JD., La naissance,1917, MBAM, 26 janvier 2017 |
Photo JD., La mort,1908-1909, MBAM, 26 janvier 2017 |
26 janvier 2017
Coup de griffe
C'est la voix du premier personnage aux accents de télépathie venu au banquet des éveillés pour qui le passé est dorénavant complètement imprévisible. « Je veux bien, dit-il, assumer le dissolu, tordre jusqu'à plus soif les égophores ombrées de la vieille caverne de l'amour. Voudra-t-on pour cela me mettre à la porte encore une fois? Me sacrer là avec de gros mots qui brûlent, qui abrasent la lande ouverte au sauvage où je ne pouvais pas ne pas naître? Là où, sans que je le demande, on m'a donné le premier rôle? Je sais, c’est méchant. Ce sont mes chants offerts à la lumière crue du soleil. »
25 janvier 2017
Jour sale aux États, sale Président!
N'en rajoutez plus, la cour est pleine. Mais la semaine n'est pas terminée! Encore 1445 jours à venir!
Elioy Hannon, Today was the Worst Day yet, Slate, 25 janvier 2017.
Aussi, malgré l'écoeurantite aiguë, Francine Pelletier dans son billet au Devoir a raison d'affirmer qu'il nous faut suivre la « joute », le « bras de fer », la régression, l'ostie de mur!
Francine Pelletier, Trump, encore lui, Le Devoir, 25 janvier 2017.
Elioy Hannon, Today was the Worst Day yet, Slate, 25 janvier 2017.
Aussi, malgré l'écoeurantite aiguë, Francine Pelletier dans son billet au Devoir a raison d'affirmer qu'il nous faut suivre la « joute », le « bras de fer », la régression, l'ostie de mur!
***
Francine Pelletier, Trump, encore lui, Le Devoir, 25 janvier 2017.
« Plus capables, je sais. J’en connais même qui veulent se désabonner de Facebook simplement pour ne plus être bombardés par les mimiques grotesques du nouveau président. D’autres n’ont jamais compris pourquoi nous, les médias, nous nous épanchons sur le phénomène avec autant de minutie. Ce n’est pas le même pays, après tout.
Mis à part la fascination avec le vaudeville qu’est Donald Trump, il est impossible, quand même, de se désintéresser de lui. C’est immense ce qui se passe actuellement aux États-Unis. On a beau se dire qu’on ne verrait jamais un vulgaire gérant d’estrade accéder au pouvoir ici, le phénomène Donald Trump, ce qu’il représente en dehors de ses travers à lui, nous concerne tous. La grogne de l’homme blanc vieillissant devant l’establishment (bonjour, Rambo Gauthier), le ressentiment devant les « étranges », le sentiment d’être désemparé devant un monde trop vaste, trop virtuel, trop changeant… est l’affaire de tout le monde. Trump nous force à reconsidérer ce qui paraissait à ce jour marginal, ou alors l’affaire des Européens — le populisme de droite.
Je crois, en fait, que Trump pourrait s’avérer un cadeau inespéré pour la gauche, une autre raison pour s’y intéresser. Mieux encore que Bernie Sanders, l’homme à l’incomparable toupet est un formidable antidote au manque d’inspiration et de direction qui gruge les forces progressistes depuis 30 ans. Nous en avons eu un aperçu le week-end dernier, lorsque près de trois millions de personnes ont pris la rue partout sur la planète. Aucune manifestation jusqu’ici ne pouvait se vanter d’une telle étendue, d’une telle diversité. Un phénomène de mondialisation qui, pour une fois, était au service de l’homme et de la femme de la rue.
Mais, bon, ne nous emballons pas trop vite. Encore faut-il que ce ras-le-bol (« Take your tiny hands off my rights ») reliant la lutte des femmes à celle des Noirs, à celle pour l’environnement et la liberté de presse, cette « intersectionnalité » sur six continents, donne quelque chose qui dure. Tout comme pour le mouvement Occupy, Black Lives Matter et le soulèvement étudiant de 2012, la démonstration n’a pas encore été faite que ce genre de protestations peut changer la donne.
Pendant ce temps, Trump poursuit (pour reprendre son expression) son « carnage ».On renégocie les traités de libre-échange, on sabre les fonds destinés à l’avortement à l’étranger, on revient en arrière. Mais au-delà des applications spécifiques du nouveau credo américain, America First, il y a un nouveau monde qui se dessine à l’horizon, la meilleure raison, à mon avis, pour s’intéresser à Donald Trump.
Le nationalisme frileux du 45e président représente aussi la rupture avec l’ordre international en place depuis la Deuxième Guerre mondiale. Comme le dit le dernier rapport du National Intelligence Council, il faut se préparer « non seulement à la fin des États-Unis comme maître du monde, mais aussi à la fin des fondements de beaucoup de son pouvoir : une économie internationale ouverte, des alliances américaines en Europe et en Asie, des règles protégeant les droits de la personne et des institutions comme l’Organisation mondiale du commerce qui influencent la façon dont les nations se comportent et résolvent leurs conflits ».
Il ne s’agit pas seulement d’un mauvais moment à passer, d’un divertissement de bas étage, en d’autres mots. Trump signifie aussi une remise en question de ce qui nous a permis de tourner la page sur près d’un demi-siècle de véritables carnages, de réelles atrocités. L’idée que nous devions non seulement rebâtir ce qui avait été détruit, mais nous donner collectivement la main, protéger ce qui dorénavant serait universellement reconnu comme les « droits humains », constitue un grand moment dans l’histoire de l’humanité. Ce parcours n’a pas été sans embûches ni sans graves omissions, de la part des États-Unis notamment, mais il s’agit néanmoins d’une plage de lumière qui jure aujourd’hui avec la noirceur qui nous hante.
Privé de l’attitude bienveillante des années d’après-guerre, de quoi le monde aurait-il l’air en 2020?, se demandent les auteurs du rapport cité plus haut. Nous serons de plus en plus morcelés, de plus en plus aux prises avec des conflits régionaux, des sociétés civiles perturbées toujours davantage par le racisme, le terrorisme et les attaques informatiques. Nous nous dirigeons, en d’autres mots, vers une période de chaos — ce que Donald Trump, en rupture non seulement avec l’ordre international, mais avec la moitié de son électorat et avec son propre parti, incarne mieux que quiconque.
Le garder à l’oeil est le moins qu’on puisse faire. »
Mon pays, ce n'est pas un pays, c'est ...
23 janvier 2017
Fabrice Koffy, Griotik
Il y a bien longtemps que je n'avais pas eu la joie de revoir Fabrice Koffy Poesic qui était en spectacle en ce dimanche à la salle Claude-Léveillée de la PDA, flanqué d'un quatuor de musiciens vraiment remarquables, dont son complice de longue date Guillaume Soucy. Fabrice sur scène, c'est un soleil. Un doux soleil avec de l'ivoire, léger, dansant, bon enfant, mais toujours à l'affût du rayon qui dardera, qui va marquer un temps, que l'art de dire de ce poète qui griotise va vous ménager avec un brin de narquoiserie et de brousse, avec ce « hein? » si caractéristique, rieur, parfois inquiet qui ponctue les récits, désamorce sans le taire le grave, le coupant des histoires de la rue, des rondes intimes, du visage du monde qu'on voudrait bien changer avant de s'endormir, parce que, c'est drôle ça, « les gens n'aiment pas les gens ». Le Fabrice solidaire a aussi fait une place à Amelie Prevost qui, le temps d'un slam, est venue sur scène avec son grand souffle refaire le monde justement en détricotant l'Histoire officielle. Il y avait aussi Normand MC June Delinelle aux bouteilles d'eau, à la table aux CD et à l'amitié. Quel charme ce spectacle souriant inscrit dans la série des Dimanches métisés de Vision Diversité. La scène musicale et poétique francophone de Montréal est grouillante de beautés, de talents et de liberté. Que du plaisir ici!
Photo Jacques Desmarais, Aurélien, Fabrice, Guillaume, PDA, 22 janvier 2017. |
Photo Jacques Desmarais, Amélie Prévost, championne de slam 2016. |
21 janvier 2017
The show tout croche must go on!
Analyse du gouvernement des États-Unis désormais entre le mains d'une équipe à gogo qui improvise.
Élisabeth Vallet, La tour de Babel, Le Devoir, 21 janvier 2017,
***
Élisabeth Vallet, La tour de Babel, Le Devoir, 21 janvier 2017,
« Marqué par une entrée en fonction désorganisée, le nouveau gouvernement devra in prononcés par Barack Obama étaient soupesés : « La tâche [qui attend le président] est d’une telle ampleur qu’il ne peut l’accomplir seul. » Devant la complexité des enjeux, ajoutait-il, nul doute que le nouveau président devra se reposer sur son équipe.
Car c’est dans l’aile Ouest que les décisions vont se prendre. Avec Trump, bien sûr. Et surtout ses conseillers.
Vendredi, l’Amérique a tourné la page sur un président cérébral qui faisait appel à une pluralité de conseillers, les laissant débattre ; il tranchait en ayant pris la mesure de la complexité des enjeux, au terme d’un processus parfois long — trop long —, en renonçant à se jeter dans la mêlée en politique intérieure et à marchander avec le Congrès.
Dans le même temps, le processus de transition qui s’est achevé vendredi avec la passation des pouvoirs a confirmé une intuition entêtante : Trump n’avait pas plus prévu d’occuper la Maison-Blanche que W. avait pensé l’occupation de l’Irak. Or, on ne passe pas, en 24 heures, d’un plan visant à mettre en place une chaîne de nouvelles câblée au bureau ovale.
L’improvisation
Dès lors, l’équipe Trump a dû improviser et n’a pu déployer que des têtes de pont dans les différents ministères (536 personnes), à défaut de pouvoir remplacer les 4000 agents qui relèvent du politique. Elle a même dû se résoudre, dans des domaines cruciaux comme la sécurité nationale, à maintenir en poste plus de 50 personnes clés du gouvernement Obama, tels le secrétaire adjoint à la défense, Robert Work, ou encore le directeur du Centre national de contre-terrorisme, Nicholas Rasmussen.
Le sentiment d’improvisation est similaire avec les auditions des membres du cabinet devant le Sénat, qui ont trahi les incohérences du gouvernement. C’est ainsi que Betsy DeVos a pu justifier la présence des armes dans les écoles du Wyoming en raison des grizzlis, et ignore tout du programme pour les enfants présentant des difficultés d’apprentissage dans les écoles publiques ; ou encore que Rex Tillerson n’a pu répondre aux questions du sénateur Rubio sur la situation aux Philippines ou le nucléaire iranien.
Les auditions ont également fait état de profondes divergences idéologiques entre les membres du cabinet et des dissonances entre la nouvelle équipe présidentielle et le Parti républicain. Mais il y a aussi des discordances importantes entre les « ministres » et les conseillers dans l’aile Ouest.
Ainsi, certains sièges non pourvus au Pentagone seraient liés au désaccord entre Mattis, confirmé par le Sénat il y a quelques jours, et l’équipe de conseillers — avec Steve Bannon et Jared Kushner. Il est difficile d’imaginer que l’économiste Peter Navarro, qui prend la tête du National Trade Council, ne va pas heurter le club des milliardaires, même si ces derniers n’ont guère plus d’expérience de gouvernement que le président qu’ils entourent.
« Tout ira bien »
« Tout ira bien », a dit Barack Obama mercredi dernier… Mais, au fil des crises, le gouvernement pourrait s’abîmer dans un climat délétère. Car la politique américaine est par définition imprévisible. Les ennemis se succèdent et ne se ressemblent pas, la distinction entre politique externe et interne est parfois floue, les enjeux sont parfois plus volatils.
Un président qui aura su s’entourer de conseillers d’expérience, et qui aura mis en place un véritable processus décisionnel visant à trier les différentes options, va pouvoir réagir à un imprévu en se fiant à l’intuition, aux expériences de ses conseillers.
On se souviendra qu’en 1962, Kennedy avait privilégié les canaux officieux de Khrouchtchev plutôt que le canal officiel lors de la crise des missiles de Cuba, évitant de justesse une confrontation nucléaire. Dans ce sens, la recherche scientifique montre combien la personnalité du président et son mode de gestion sont déterminants…
Deux conséquences
Il y a deux conséquences à cette cacophonie institutionnelle. Le risque est que les politiques, notamment en période de crise, soient totalement improvisées, que, face à un président narcissique et centralisateur, les conseillers s’affrontent. Que certains claquent la porte, tandis que d’autres deviennent omnipotents.
La seconde tient au fait qu’à défaut de pouvoir faire percoler leurs points de vue au sommet, de pouvoir présenter la complexité des enjeux au cabinet, la tour de Babel bureaucratique va se trouver d’autres exutoires : The Washington Post, en réorganisant son équipe, et The New York Times, en consacrant une page de son site Web aux moyens de communication sécurisés avec ses reporters, ont saisi la balle au bond.
Mis à l’index par un président provocateur, alors qu’ils enquêtent encore sur son élection, le FBI et la CIA n’auront ni allégeance ni fidélité, rappelant les années Nixon. Au gouvernement par tweets répondront les fuites d’un gouvernement indiscipliné. »
Car c’est dans l’aile Ouest que les décisions vont se prendre. Avec Trump, bien sûr. Et surtout ses conseillers.
Vendredi, l’Amérique a tourné la page sur un président cérébral qui faisait appel à une pluralité de conseillers, les laissant débattre ; il tranchait en ayant pris la mesure de la complexité des enjeux, au terme d’un processus parfois long — trop long —, en renonçant à se jeter dans la mêlée en politique intérieure et à marchander avec le Congrès.
Dans le même temps, le processus de transition qui s’est achevé vendredi avec la passation des pouvoirs a confirmé une intuition entêtante : Trump n’avait pas plus prévu d’occuper la Maison-Blanche que W. avait pensé l’occupation de l’Irak. Or, on ne passe pas, en 24 heures, d’un plan visant à mettre en place une chaîne de nouvelles câblée au bureau ovale.
L’improvisation
Dès lors, l’équipe Trump a dû improviser et n’a pu déployer que des têtes de pont dans les différents ministères (536 personnes), à défaut de pouvoir remplacer les 4000 agents qui relèvent du politique. Elle a même dû se résoudre, dans des domaines cruciaux comme la sécurité nationale, à maintenir en poste plus de 50 personnes clés du gouvernement Obama, tels le secrétaire adjoint à la défense, Robert Work, ou encore le directeur du Centre national de contre-terrorisme, Nicholas Rasmussen.
Le sentiment d’improvisation est similaire avec les auditions des membres du cabinet devant le Sénat, qui ont trahi les incohérences du gouvernement. C’est ainsi que Betsy DeVos a pu justifier la présence des armes dans les écoles du Wyoming en raison des grizzlis, et ignore tout du programme pour les enfants présentant des difficultés d’apprentissage dans les écoles publiques ; ou encore que Rex Tillerson n’a pu répondre aux questions du sénateur Rubio sur la situation aux Philippines ou le nucléaire iranien.
Les auditions ont également fait état de profondes divergences idéologiques entre les membres du cabinet et des dissonances entre la nouvelle équipe présidentielle et le Parti républicain. Mais il y a aussi des discordances importantes entre les « ministres » et les conseillers dans l’aile Ouest.
Ainsi, certains sièges non pourvus au Pentagone seraient liés au désaccord entre Mattis, confirmé par le Sénat il y a quelques jours, et l’équipe de conseillers — avec Steve Bannon et Jared Kushner. Il est difficile d’imaginer que l’économiste Peter Navarro, qui prend la tête du National Trade Council, ne va pas heurter le club des milliardaires, même si ces derniers n’ont guère plus d’expérience de gouvernement que le président qu’ils entourent.
« Tout ira bien »
« Tout ira bien », a dit Barack Obama mercredi dernier… Mais, au fil des crises, le gouvernement pourrait s’abîmer dans un climat délétère. Car la politique américaine est par définition imprévisible. Les ennemis se succèdent et ne se ressemblent pas, la distinction entre politique externe et interne est parfois floue, les enjeux sont parfois plus volatils.
Un président qui aura su s’entourer de conseillers d’expérience, et qui aura mis en place un véritable processus décisionnel visant à trier les différentes options, va pouvoir réagir à un imprévu en se fiant à l’intuition, aux expériences de ses conseillers.
On se souviendra qu’en 1962, Kennedy avait privilégié les canaux officieux de Khrouchtchev plutôt que le canal officiel lors de la crise des missiles de Cuba, évitant de justesse une confrontation nucléaire. Dans ce sens, la recherche scientifique montre combien la personnalité du président et son mode de gestion sont déterminants…
Deux conséquences
Il y a deux conséquences à cette cacophonie institutionnelle. Le risque est que les politiques, notamment en période de crise, soient totalement improvisées, que, face à un président narcissique et centralisateur, les conseillers s’affrontent. Que certains claquent la porte, tandis que d’autres deviennent omnipotents.
La seconde tient au fait qu’à défaut de pouvoir faire percoler leurs points de vue au sommet, de pouvoir présenter la complexité des enjeux au cabinet, la tour de Babel bureaucratique va se trouver d’autres exutoires : The Washington Post, en réorganisant son équipe, et The New York Times, en consacrant une page de son site Web aux moyens de communication sécurisés avec ses reporters, ont saisi la balle au bond.
Mis à l’index par un président provocateur, alors qu’ils enquêtent encore sur son élection, le FBI et la CIA n’auront ni allégeance ni fidélité, rappelant les années Nixon. Au gouvernement par tweets répondront les fuites d’un gouvernement indiscipliné. »
20 janvier 2017
Patti Smith chante au Nobel de Dylan
A Hard Rain's gonna fall
Je crois bien que j'étais sur le carreau le 10 décembre dernier, où en phase maniaco, ou encore, au mieux, seul dans ma cambrousse là où je n'ai que les étoiles pour me connecter; en tout cas, sorry Robert Bob, j'avais manqué ceci. Entendre cette chanson aujourd'hui le 20 janvier 2017 entre les échauffourées de Washington, c'est désirer encore plus fort, avec un fond de larmes, que le chant des poètes ne meure jamais!
19 janvier 2017
Merci infiniment Françoise David!
Photo Jacques Desmarais. |
En conférence de presse ce matin.
18 janvier 2017
Mourir et naître à Scoudouc
En septembre 2003, Robert Lévesque dans feu l'hebdomadaire Ici, parlant alors de Son Excellence Hermé, mentionnait avoir été grandement touché par la délicatesse mélancolique du regard d'Herménégilde Chiasson. Je n'ai qu'un seul recueil de ce géant, Vous (Les Éditions d'Acadie,1991), acheté à Moncton, il me semble, en tout cas en Acadie il y a plusieurs années. La remarque de Lévesque imbibe de bleu ma propre lecture de cette écriture sans cérémonie qui coule de source et va directement au coeur.
« Vous n'allez pas encore me dire, avec la voix du renoncement, que tout est souffrance. Je sais déjà tout ça. Vous n'allez pas encore m'en faire le reproche et me prendre pour le responsable de votre désarroi. Je n'ai fait que promettre ce que je ne pouvais pas donner. Je sais tout ça. [...] Mais vous me l'avez tellement rappelé [...] ». (P. 89).
Dans Le Devoir du 17 janvier 2017, on peut lire avec grand intérêt l'article de Dominic Tardif qui a rencontré l'auteur à l'occasion de la réédition du Mourir à Scoudouc (Éditions Perce-Neige), texte fondateur de la jeune littérature acadienne publié dans le tumulte des années 1970 marquées au fer rouge par le combat et le réveil acadien contre le mépris, notamment celui des jeunes lors de la grève à l'Université de Moncton en 1968.
16 janvier 2017
Lumière des oiseaux et leurs traces dans le sable
Je sais que je radote, mais je ne me résous pas à enterrer cette ex-citation:
« Poussons plus loin le vol de l'imagination. Au bout de sa lunette, notre individu aperçoit des ailes irradier dans la lumière, puis, plus bas, sur la plage, une autre personne qui est en train de tracer des signes dans le sable humide. Le sable n'est-il pas une merveilleuse surface pour écrire? Écrire sur le sable, c'est s'exprimer dans la matière des mots, des signes qui nous apparaissent d'autant plus importants qu'ils sont éphémères. [...] De toute manière, le sable est directement relié à l'écriture et à la transmission des connaissances : les premiers empereurs n'ont-ils pas inventé l'écriture chinoise en observant les traces des oiseaux sur le sable? ».
— Pierre Morency, Lumière des oiseaux, Boréal/Seuil, 1992, p. 299.
Photo Jacques Desmarais., Esterillos Este, Côte d'Or, 18 février 2015. |
Lettre d'Erika Soucy à Bernard « Rambo » Gauthier
Je ne regarde pas beaucoup la tivi et si j'ai manqué quelque chose, la lecture de ce beau vrai billet d'Erika Soucy sur sa page FB au lendemain de l'entrevue de Bernard « Rambo » à TLMEP est bien inspirante. Je ne viens pas d'une région dite éloignée, mais je sais qu'à seulement 100 kilomètres de Montréal la vie peut être bouleversante d'abandon. Je sais ce que veut dire se perdre dans le métro et avoir la chienne quand on y arrive en émigrant des régions. Erika Soucy évoque l'urgence d'entreprendre des chantiers de partage du commun au Québec, en éducation, en culture, en économie, en écologie, et surtout pas exclusivement sur ceux qui roulent tout seuls sans horizon, quoi qu'on pense des coups de gueule qui les rallument et de la critique tous azimuts qui se regarde critiquer. Dans son billet, Erika Soucy porte aussi la voix des femmes. À juste titre!
Erika Soucy
Salut Bernard,
Je viens de regarder attentivement ton entrevue à Tout le monde en parle. Aussi attentivement que j’ai pu regarder tes passages à la Commission Charbonneau. Tu le sais, ça fait longtemps que je m’intéresse à ton travail, à la façon dont tu prends parole pour les travailleurs de la Côte-Nord.
Avant d’aller plus loin, je tiens à te parler des femmes de chez nous. De celles qui aiment jaser de « linge pis de leurs patentes ». Je les connais bien, elles sont mes tantes, mes cousines, ma mère… Et elles tiennent la maison debout. As-tu oublié comment ça marche une famille, sur la Côte-Nord, quand l’homme fait du 40 / 10 ? Honnêtement… Tu le sais comme moi que c’est la femme qui administre. Que c’est elle qui se retrouve avec la charge d’organisation quotidienne que demande une famille. C’est elle qui reste, c’est elle qui éduque, c’est elle qui calcule pis qui poste ben souvent les chèques pour payer les « tarmes », c’est elle qui sait ce qui est bon pour ses enfants, c’est elle qui voit à ce qu’ils manquent de rien chaque jour, c’est elle qui surveille, s’inquiète pis qui mets ses culottes ben souvent. En plus de laver celles des autres. Si tu veux jaser de linge, ça va être à ce niveau-là.
Je comprends que c’était une joke. Mes mononcs en disent des pires plusieurs fois par jour, l’affaire c’est que mes mononcs ne se présentent pas comme député de Duplessis aux prochaines élections. Tu le sais comme moi : tu vas passer, Bernard. On le sait tout le monde que tu vas être élu. Alors je me permets, à titre de citoyenne originaire de la Côte-Nord, de t’exposer mon point de vue qui, je l’espère, sera considéré plus sérieusement qu’un conseil sur des marques de brassières.
Tu as dit, ce soir, vouloir aider la relève de chez nous. Je ne sais pas si ça a été coupé au montage, mais je n’ai pas pu déceler la façon dont tu prévoyais aider cette relève. Je n’ai pas de recette miracle à t’exposer, seulement quelques observations.
Tu trouves-tu ça normal, Bernard, que les hommes de chez-nous travaillent sur la construction de père en fils depuis des générations ? Ça paraît ben, dit de même, ça fait noble… Mais tu penses pas que ça peut être la source du problème ?
Mettons… Parlons de nos enfants. De ceux qui restent et qui resteront peut-être encore à Sept-Îles, Godbout, Rivière-au-tonnerre, Port-Cartier, Havre-Saint-Pierre, mais aussi Baie-Comeau, Betsiamites, Ragueneau, Longue-Rive, Forestville… dans vingt ans. On investit comment dans leur avenir, Bernard ? En envoyant papa faire ses heures pour son chômage c’t’année ? Ça met du pain sur la table une couple de mois, je peux pas te contredire là-dessus, mais à long terme, ça change quoi ? Quand l’école compte trente élèves pis qu’on s’intéresse à rien de plus que ce qui passe à TV ou de c’est quoi la meilleure marque de froque de ski-doo ? Quand on n’a pas de programme culturel pour nos jeunes, quand y’ont jamais vu un noir de leur vie pis qu’y chient dans leurs shorts juste à penser au métro de Montréal… Quand on a un paysage magnifique qui se meurt parce qu’on n’a pas appris que c’était important d’y faire attention ou qu’on refuse simplement d’en faire un attrait touristique parce qu’on a peur des étrangers. Ceux qui immigrent mais aussi les autres : les snobs de la ville qui ont aucune idée de comment ça se passe pour vrai icitte.
Qu’est-ce que ça change, à long terme, que Papa travaille au printemps ? Rien, Bernard. Rien. Les p’tits Kevin, Billy, Derek pis Jordan ils vont faire comme leur père dans vingt ans, parce que c’est ce qu’on leur aura toujours montré : faire son temps en espérant de pas se faire day-offer trop de bonne heure, pour être bon pour avoir son chômage.
Et si la solution était dans l’ouverture, dans la culture, dans la connaissance ? Et si c’était pour nos écoles qu’il fallait que tu gueules fort à l’assemblée nationale ? Si on éduquait nos flots, sacrament ! Ils feraient peut-être mieux que nous autres, plus tard ? Ils auraient peut-être des nouvelles idées, développeraient peut-être des compagnies ? Ils verraient peut-être que ceux d’ailleurs viennent pas les voler, mais que ce sont peut-être des gens avec qui ils pourront éventuellement échanger et même, faire affaire ?
Moi aussi j’t’année de me faire fourrer par en arrière, Bernard. Quand on sait que la Romaine sera jamais rentable, mais qu’on a convaincu ma région qu’elle était nécessaire pour créer des emplois, ses emplois; les seuls emplois qu’on occupe de père en fils, depuis des générations… Je me dis qu’il serait temps que « les miens » se prennent en mains pour faire partie de la solution.
15 janvier 2017
Poème à chaudes larmes
Prévert
CHANSON DU GEÔLIER
Où vas-tu beau geôlier
Avec cette clé tachée de sang
Je vais délivrer celle que j'aime
S'il en est encore temps
Et que j'ai enfermée
Tendrement cruellement
Au plus secret de mon désir
Au plus profond de mon tourment
Dans les mensonges de l'avenir
Dans les bêtises des serments
Je veux la délivrer
Je veux qu'elle soit libre
Et même de m'oublier
Et même de s'en aller
Et même de revenir
Et encore de m'aimer
Ou d'en aimer un autre
Si un autre lui plaît
Et si je reste seul
Et elle en allée
Je garderai seulement
Je garderai toujours
Dans mes deux mains en creux
Jusqu'à la fin des jours
La douceur de ses seins modelés par l'amour.
Paroles, 1945.
Avec cette clé tachée de sang
Je vais délivrer celle que j'aime
S'il en est encore temps
Et que j'ai enfermée
Tendrement cruellement
Au plus secret de mon désir
Au plus profond de mon tourment
Dans les mensonges de l'avenir
Dans les bêtises des serments
Je veux la délivrer
Je veux qu'elle soit libre
Et même de m'oublier
Et même de s'en aller
Et même de revenir
Et encore de m'aimer
Ou d'en aimer un autre
Si un autre lui plaît
Et si je reste seul
Et elle en allée
Je garderai seulement
Je garderai toujours
Dans mes deux mains en creux
Jusqu'à la fin des jours
La douceur de ses seins modelés par l'amour.
Paroles, 1945.
Résolution
J'ai pris la résolution cette année de ne plus être gentil. Mais que serait le monde, me dit le psy, sans la gentillesse? Émergez-vous, poursuit-il, apprenez à dire non, mais restez, voyons! Ah! non! Je pars, je suis résolu. Tenez, je viens de dire un gros non méchant. Mais avec la tête que j'ai et mon coeur brûlant de mouton qui fume comme dans la chanson, je mets ma patte au feu que je ne résisterai pas. Tête brûlée de boutades, va!
Photo Jacques Desmarais, Tête au feu, 26 décembre 2016. |
11 janvier 2017
Pascal Quignard, le versant de la pensée qui est fleur jaillissante
J'ai posé le livre de Pascal Quignard. Je ne le comprends déjà plus, lambeaux de rêve, mais je sais à nouveau qu'avec cet auteur, le lecteur que je suis n'en sort pas indemne, aime la terre, les roses et les bêtes sauvages qui n'attendent rien du regard, du jugement des autres. Parce qu'il est question de création libre, toutes les lignes de Critique du jugement sont bouleversantes comme un socle bouleverse la terre de la neuve prairie, comme la solitude protège son fruit, comme une délivrance.
La vie du lecteur dans les livres, le besoin si humain, indispensable comme l'air de se faire raconter des histoires par ces extra-terrestres que sont les écrivains. Quignard pense bien entendu au roman, mais l'on pourrait aussi évoquer la catharsis d'Aristote dans l'art, le paradoxe de l'acteur qui joue vrai de Diderot, la surprenance du poème qui déprend. Que se passe-t-il, en effet?
La vie du lecteur dans les livres, le besoin si humain, indispensable comme l'air de se faire raconter des histoires par ces extra-terrestres que sont les écrivains. Quignard pense bien entendu au roman, mais l'on pourrait aussi évoquer la catharsis d'Aristote dans l'art, le paradoxe de l'acteur qui joue vrai de Diderot, la surprenance du poème qui déprend. Que se passe-t-il, en effet?
« Il y a un sorite inéluctable, qui tient à la condition du lecteur du roman. [...] Ainsi, ce qui était si intense, si passionnant, plus passionnant que ma vie même, c'était faux. Un terrible dépit naît à proportion de la beauté des livres.
J'éprouve de la peine à croire que ce que j'ai tant aimé était un mensonge.
On peut le dire de la femme qu'on aimait.
On peut le dire du livre qu'on tient encore et qu'on va reposer. » (p. 214-215)
Photo JD. |
06 janvier 2017
Apostrophe
Texte de septembre 2007, reprisé.
Photo : Cyrille Weiner/Tangophoto d'après un dessin d'Ernest Pignon-Ernest, musée Rimbaud, Charleville-Mézières, France. - |
Traces de foin volageur
sous le soleil traîneux des Ardennes
entre les mots drus, grugés, piquant la langue
Négrillon de chagrin sur le dos d'un enfant
Le poète écrit en chrétien au dieu Leilah :
« Mes affaires ne vont pas si mal sauf que là
Je n'ai même jamais connu quelqu'un qui s'ennuyât
autant avec les catins des soirs bleus d'été »
Liqueurs, cotonnades, soieries, vierge café
C'était Monsieur le foudroyé!
05 janvier 2017
Une craque dans le ciel
Il y avait une réparation à faire dans un coin secret de mon ciel. Avant qu'il me tombe sur le coco. Que le coco avec tous ses rêves soit brisé en mille miettes. J'ai gaulé en esprit! C'est maintenant réglé. Mon Dieu Seigneur, merci de votre patience. On n'en parlera plus!
Photo Jacques Desmarais, Estrie, Cambrousse, 4 janvier 2017, 12h01. |
01 janvier 2017
Tu me fais tac
Patience dans l'azur. Ça va venir. Reprise d'un texte expérimental publié sur le Train en septembre 2007.
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