Perros n’est pas un hérosse à long bec sec
avec des cannes de bègre grelottantes
qui pelotent une plage noire de la Bretagne
Perros ne fait pas dans la dentition
de petits pas de calmant de sabots de bois
c’est plutôt un rire franc de calvados
sous un tonneau qui sue
à boire, à boire mes Dames,
à petit goulot dézippé sur le bord de l’amer
« La mer est toujours à boire
Le ciel à prendre d'assaut.
Mais si vous voulez m'en croire
Restons-en là. »
Perros, l'effarouché d'éclisses qui flacottent
avec ses petits pleurs bâtards de grogne
de chien des champs essoré, le soir
sur une bécane à gaz de patente à gosses...
M’aimes-tu mon amour?
Tu vois, je m’enfarge encore
dans la craque du trottoir
Perros, alambic, flaque de bagosse,
appellation non contrôlée
piqueries de haut de femme dans l’atelier du hasard
« Mais y a pas le feu! »
à boire, à boire Marquise fantôme,
tout seul dans son char quand on descend Pie IX, le soir,
et qu’on devient aveugle ou borgne,
laid ou débordé
à cause du métier
Perros, correcteur sévère
empilé chez Gallimard
banderole trouée de muet,
tête d'hameçon de papiers collés,
un bras copié dans la gorge,
la ligne en marge du temps
comme tumeur de silence
qui déboule l’escalier
Silence
Aux étudiants : « Je leur parle du silence, ce qui les laisse, pour le moins, rêveurs. Moi aussi.» (39)
Plus tard, dans sa vie, gales qui mordent, cellules cancéreuses à la gorge. Opération. Brûlure au cobalt. Mutilation assez forte de la voix. En 1977, il écrit : « ... ceux d'ici se sont très bien habitués à mon silence. Il y a longtemps que je m'étais habitué au leur! Il y a si peu d'hommes intéressants, dans la paisible quotidienneté. On se demande ce qu'il faudrait aux hommes pour sortir de leur cloaque organique. La misère? » (132)
Tu m’aimes-tu?
« Les solitaires ne savent plus ce que c'est que d'aimer. Et personne ne sait ce qu'il entend par là. Pourtant, ça tient au corps.» (48)
« Mais c'est vrai que la vie est un rêve. On ne le sait jamais assez. » (51)
« [...]rien n'est plus comique que d'opter pour l'ailleurs qui drague l'ici.» (83)
Sur lui-même
Il n'aime pas sa personne. Il a détesté se voir dans un truc télé. « Les Papiers Collés ils sont à peu près rétablis. Ils me sortent par les yeux, et le reste. Un vrai calvaire. Pour un type qui n'aime pas ce qu'il écrit, je suis servi. » (65)
« Je n'attends naturellement rien de cette publication. Comme des autres. Mais rien ne prouve que je n'écrirai pas un petit quelque chose un jour. Aucune envie, au reste.» (74)
« Mais quelle torpeur, qui m'empêche aussi de m'écrire, de donner encore et toujours raison absolue à ces pattes de mouche à merde. Je tombe parfois dans un trou quasi flaubertien, un bizarre fatalisme, que je refuse, auquel j'interdis de prendre pose, mais qui n’en fait pas moins son indescriptible ravage. On ne sort de cette little mort qu'en travaillant, c'est-à-dire en colmatant, en prévoyant plutôt la seconde d'interruption qui foutra tout en l'air. Or il est probable que ma “pensée” (!) ne souhaite qu'une chose : cette seconde. Mais, paradoxe évident, j'en aurais pour des heures à écrire là-dessus.» (p.80)
« Tout faisant ventre.» (127) « [...]je m'emmouscaille... » (130) « Mes côtes se finistérisent.» (136)
« La santé, c'est comme la liberté, ça n'existe que quand on en manque.» (136)
La littérature en carrosse
« Je n'ai jamais vécu grâce, ou à cause de la littérature. C'est autre chose qui m'a mû. Meuh, disent les vaches. Mais quand son “métier” prend le pas sur sa distraction, il est emmerdant.» (116)
Écrits sans forge
« Tirant chèque sur chèque à la banque du temps Sans moindre provision
ce que nul n'osait dire Sinon la mort le jour de l'ultime paiement
Fou de la liberté ne cessant de forger Les barreaux de sa cage,
Ecce homo. Amen. Y a pas le feu!» (120)
Le métier de sablier
« Je te passe la plume. Embrasse ton monde.» (59)
« Qui n'écrit pas? Jusqu'aux marins qui me donnent leur livre de bord, on ne sait jamais, je pourrais en tirer quelque chose, qu'ils me disent! Ah! Ces braves gens qui savent que l'on écrit! Ils voudraient bien que ça nous rapporte! Pourquoi vous ne faites pas un roman policier, ou polisson, qu'ils disent, ou à peu près! Merde. " (134)
L’habit se pogne le moine
« Mon smoking, ce serait plutôt la solitude.» (118)
qui pelotent une plage noire de la Bretagne
Perros ne fait pas dans la dentition
de petits pas de calmant de sabots de bois
c’est plutôt un rire franc de calvados
sous un tonneau qui sue
à boire, à boire mes Dames,
à petit goulot dézippé sur le bord de l’amer
« La mer est toujours à boire
Le ciel à prendre d'assaut.
Mais si vous voulez m'en croire
Restons-en là. »
Perros, l'effarouché d'éclisses qui flacottent
avec ses petits pleurs bâtards de grogne
de chien des champs essoré, le soir
sur une bécane à gaz de patente à gosses...
M’aimes-tu mon amour?
Tu vois, je m’enfarge encore
dans la craque du trottoir
Perros, alambic, flaque de bagosse,
appellation non contrôlée
piqueries de haut de femme dans l’atelier du hasard
« Mais y a pas le feu! »
à boire, à boire Marquise fantôme,
tout seul dans son char quand on descend Pie IX, le soir,
et qu’on devient aveugle ou borgne,
laid ou débordé
à cause du métier
Perros, correcteur sévère
empilé chez Gallimard
banderole trouée de muet,
tête d'hameçon de papiers collés,
un bras copié dans la gorge,
la ligne en marge du temps
comme tumeur de silence
qui déboule l’escalier
Silence
Aux étudiants : « Je leur parle du silence, ce qui les laisse, pour le moins, rêveurs. Moi aussi.» (39)
Plus tard, dans sa vie, gales qui mordent, cellules cancéreuses à la gorge. Opération. Brûlure au cobalt. Mutilation assez forte de la voix. En 1977, il écrit : « ... ceux d'ici se sont très bien habitués à mon silence. Il y a longtemps que je m'étais habitué au leur! Il y a si peu d'hommes intéressants, dans la paisible quotidienneté. On se demande ce qu'il faudrait aux hommes pour sortir de leur cloaque organique. La misère? » (132)
Tu m’aimes-tu?
« Les solitaires ne savent plus ce que c'est que d'aimer. Et personne ne sait ce qu'il entend par là. Pourtant, ça tient au corps.» (48)
« Mais c'est vrai que la vie est un rêve. On ne le sait jamais assez. » (51)
« [...]rien n'est plus comique que d'opter pour l'ailleurs qui drague l'ici.» (83)
Sur lui-même
Il n'aime pas sa personne. Il a détesté se voir dans un truc télé. « Les Papiers Collés ils sont à peu près rétablis. Ils me sortent par les yeux, et le reste. Un vrai calvaire. Pour un type qui n'aime pas ce qu'il écrit, je suis servi. » (65)
« Je n'attends naturellement rien de cette publication. Comme des autres. Mais rien ne prouve que je n'écrirai pas un petit quelque chose un jour. Aucune envie, au reste.» (74)
« Mais quelle torpeur, qui m'empêche aussi de m'écrire, de donner encore et toujours raison absolue à ces pattes de mouche à merde. Je tombe parfois dans un trou quasi flaubertien, un bizarre fatalisme, que je refuse, auquel j'interdis de prendre pose, mais qui n’en fait pas moins son indescriptible ravage. On ne sort de cette little mort qu'en travaillant, c'est-à-dire en colmatant, en prévoyant plutôt la seconde d'interruption qui foutra tout en l'air. Or il est probable que ma “pensée” (!) ne souhaite qu'une chose : cette seconde. Mais, paradoxe évident, j'en aurais pour des heures à écrire là-dessus.» (p.80)
« Tout faisant ventre.» (127) « [...]je m'emmouscaille... » (130) « Mes côtes se finistérisent.» (136)
« La santé, c'est comme la liberté, ça n'existe que quand on en manque.» (136)
La littérature en carrosse
« Je n'ai jamais vécu grâce, ou à cause de la littérature. C'est autre chose qui m'a mû. Meuh, disent les vaches. Mais quand son “métier” prend le pas sur sa distraction, il est emmerdant.» (116)
Écrits sans forge
« Tirant chèque sur chèque à la banque du temps Sans moindre provision
ce que nul n'osait dire Sinon la mort le jour de l'ultime paiement
Fou de la liberté ne cessant de forger Les barreaux de sa cage,
Ecce homo. Amen. Y a pas le feu!» (120)
Le métier de sablier
« Je te passe la plume. Embrasse ton monde.» (59)
« Qui n'écrit pas? Jusqu'aux marins qui me donnent leur livre de bord, on ne sait jamais, je pourrais en tirer quelque chose, qu'ils me disent! Ah! Ces braves gens qui savent que l'on écrit! Ils voudraient bien que ça nous rapporte! Pourquoi vous ne faites pas un roman policier, ou polisson, qu'ils disent, ou à peu près! Merde. " (134)
L’habit se pogne le moine
« Mon smoking, ce serait plutôt la solitude.» (118)
PERROS, Georges, Lettres à Michel Butor, tome 2, Editions Ubacs, 1983, 157 pages.